Le Parnasse contemporain/1869/Chanson (Lafenestre)

Le Parnasse contemporainAlphonse Lemerre [Slatkine Reprints]II. 1869-1871 (p. 265-266).




GEORGES LAFENESTRE

———


CHANSON


A l’Impruneta les filles sont belles !
Des ailes aux pieds, dans l’œil du soleil,
La tête aux aguets comme les gazelles,
Le sein, droit & fier, aux rosiers pareil.
A l’Impruneta les filles sont belles.

A l’Impruneta les gars sont hardis !
Chevelure éparse où la brise joue ;
Ils seront soldats, bergers ou bandits.
Une pourpre chaude allume leur joue.
A l’Impruneta les gars sont hardis.

A l’Impruneta l’église est étroite !
Le curé subtil range prudemment
Ses filles à gauche, & ses gars à droite ;
Il sait que le fer court vite à l’aimant.
A l’Impruneta l’église est étroite.


À l’Impruneta l’office est bien long !
Les filles, les gars, embrouillant les psaumes,
Cherchent de côté, bâillent au plafond ;
Les fleurs à l’encens mêlent leurs aromes.
À l’Impruneta l’office est bien long !

À l’Impruneta la campagne est verte !
Les filles, les gars, aux derniers versets,
Bondissent, par couple, à la porte ouverte ;
Sous les bras pressants craquent les corsets.
À l’Impruneta la campagne est verte.

À l’Impruneta l’amour va bon train
Dans les ravins creux aux senteurs de fraise :
Le curé subtil y perd son latin.
On s’aime à quinze ans, on s’épouse à seize.
À l’Impruneta l’amour va bon train !