Le Parnasse contemporain/1866/Les Plaintes d’un Icare

Le Parnasse contemporainAlphonse Lemerre [Slatkine Reprints]I. 1866 (p. 79-80).
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LES PLAINTES D’UN ICARE


Les amants des prostituées
Sont heureux, dispos et repus ;
Quant à moi, mes bras sont rompus
Pour avoir étreint des nuées.


C’est grâce aux astres nonpareils,
Qui tout au fond du ciel flamboient,
Que mes yeux consumés ne voient
Que des souvenirs de soleils.

En vain j’ai voulu de l’espace
Trouver la fin et le milieu ;
Sous je ne sais quel œil de feu
Je sens mon aile qui se casse ;

Et brûlé par l’amour du beau,
Je n’aurai pas l’honneur sublime
De donner mon nom à l’abîme
Qui me servira de tombeau.


CHARLES BAUDELAIRE.