La Chanson française du XVe au XXe siècle, Texte établi par Jean GillequinLa Renaissance du livre (p. 146).


LE MIROIR

Air de Joconde.


Miroir officieux, je doi
    T’aimer toute ma vie.
Je possède, grâces à toi,
    La charmante Sylvie ;
Et je te regarde en ce jour
    Comme un dieu tutélaire,
Qui fait pour moi plus que l’amour
    N’aurait jamais pu faire.

Miroir plus peintre que Latour,
    Plus prompt et plus sincère ;
Et vous, mes trumeaux, tour à tour,
    Répétez ma bergère :
Croyez que jamais vous n’aurez
    De plus parfait modèle ;
Et que plus vous l’embellirez,
    Plus vous serez fidèle.

Glace, ne faites votre effet
    Qu’en faveur de ma belle :
Obscure pour tout autre objet,
    Ne représentez qu’elle.
Par le même art, en ma faveur
    Et contre votre usage,
Puissiez-vous, ainsi que mon cœur,
    Conserver son image !

Piron.