Le Magasin d’antiquités/Tome 1/11


Traduction par Alfred Des Essarts.
Hachette (1p. 92-100).



CHAPITRE XI.


Le calme et la solitude ne devaient plus régner sous le toit qui abritait l’enfant. Dès le lendemain matin, le vieillard était en proie à une fièvre furieuse, accompagnée de délire ; sous le coup de ce désordre de ses facultés, il resta plusieurs semaines entre la vie et la mort. Il y avait bonne garde autour de lui ; mais les gardiens étaient des étrangers, de ces gens pour qui les soins de ce genre sont un commerce, qui en font le but de leur avidité, et qui, dans les moments d’intervalle que leur laissait la surveillance du vieillard, se réjouissant de compagnie, comme une horrible troupe de spectres, mangeaient, buvaient, faisaient bombance : car la maladie et la mort sont leurs dieux domestiques.

Au milieu de ce bruit, de cette affluence produite par un malheur, Nelly était plus seule qu’elle ne l’avait jamais été ; seule avec sa pensée, seule dans son dévouement envers celui qui se consumait sur son lit de douleur, seule avec son chagrin sincère, avec sa tendresse sans calcul. Jour et nuit, elle se tenait au chevet de ce malade qui ne connaissait pas son état ; elle allait au-devant de tous ses besoins, elle l’entendait l’appeler sans cesse par son nom, et sans cesse exprimer l’anxiété qu’elle lui inspirait et qui dominait les divagations de la fièvre.

La maison ne devait pas leur appartenir plus longtemps. Il semblait dépendre du bon plaisir de M. Quilp que le malade restât ou non dans sa chambre même. À peine le vieillard s’était-il alité, que le nain prit possession en règle du local et de tout ce qui s’y trouvait, en vertu de pouvoirs légaux que l’on n’avait pas prévus, mais que personne ne songea à mettre en doute. Ayant assuré ce point important, avec l’aide d’un homme de loi qu’il avait amené à cet effet, M. Quilp procéda à son installation dans la maison, où il garda près de lui son affidé, pour défendre ses droits contre tout venant. Il prit donc en ce lieu ses quartiers à son aise, aussi largement qu’il lui plut.

Ainsi il s’établit dans l’arrière-magasin, après avoir eu soin d’abord de couper court à toute affaire de négoce en fermant la boutique. Parmi les vieux meubles, il choisit pour son usage particulier le fauteuil le plus beau et le plus confortable, et pour son ami un autre fauteuil aussi affreux qu’incommode ; il les fit porter dans la pièce qu’il s’était réservée, et se plaça fièrement dans son siège de parade. Cette partie de la maison était fort éloignée de la chambre du vieillard : cependant M. Quilp jugea qu’il serait prudent, comme précaution hygiénique contre la contagion de la fièvre et comme moyen salutaire de fumigation, non-seulement de fumer lui-même sans relâche, mais de forcer son ami légal à en faire autant. En outre, il envoya par exprès, au débarcadère, chercher le jeune homme aux culbutes : celui-ci, qui accourut en toute hâte, reçut l’ordre de s’asseoir sur un troisième siège auprès de la porte, de fumer continuellement dans une grosse pipe que le nain avait préparée à son intention, et défense expresse lui fut faite de la retirer de ses lèvres, fût-ce une seule minute, sous quelque prétexte que ce fût. Ces dispositions terminées, M. Quilp promena autour de lui en riant un regard d’ironique satisfaction, s’applaudissant d’avoir introduit ce qu’il appelait du confort dans la maison.

Le coadjuteur, qui portait l’harmonieux nom de Brass, avait deux raisons puissantes pour ne pas juger aussi favorablement ces dispositions : la première, c’est qu’il ne pouvait réussir à se poser convenablement dans son fauteuil à la fois dur, anguleux, glissant et renversé ; la seconde, c’est que la fumée de tabac lui avait toujours causé des étourdissements et des nausées. Mais, comme il était dans la dépendance de M. Quilp, et qu’il lui importait énormément de conserver la protection du nain, il s’efforçait de sourire, pour témoigner de sa docilité, avec la meilleure grâce possible.

Ce Brass était un procureur de Bevis-Marks, à Londres. Sa réputation était assez équivoque. Grand et maigre, il avait le nez fait en forme de loupe, le front bombé, les yeux enfoncés et les cheveux d’un roux fortement accusé. Il portait un long surtout noir, tombant presque jusqu’à ses chevilles, une culotte courte noire, des souliers très-hauts et des bas de coton d’un gris bleu. Ses manières étaient rampantes, mais sa voix rude ; et ses plus gracieux sourires étaient si rebutants, qu’on eût souhaité plutôt de le voir grondeur et refrogné pour qu’il fût moins désagréable.

De temps en temps, Quilp examinait son compagnon, et remarquant avec quelle répugnance ce dernier regardait sa pipe, qu’il tressaillait quand, par hasard, il avalait de la fumée, et qu’il avait soin de chasser le nuage avec dégoût, notre nain ne se sentait pas de joie, et se frottait les mains en signe d’allégresse.

Puis, se tournant vers le jeune commis :

« Chien que vous êtes ! fumez donc ; bourrez votre pipe et fumez vite, jusqu’à la dernière bouffée ; sinon, je mettrai au feu le bout du tuyau et je vous en appliquerai la cire fondue toute rouge sur la langue ! »

Heureusement pour lui, le jeune garçon était rompu à cet exercice, et il eût fumé au besoin un four à chaux si on lui en avait fait la politesse. Aussi se borna-t-il à marmotter quelque défi entre les dents contre son maître, mais il n’en fit pas moins ce que celui-ci lui avait ordonné.

« N’est-ce pas, Brass, dit Quilp, n’est-ce pas que c’est bon, que c’est doux, que c’est embaumé, et que vous êtes heureux comme le Grand Turc ? »

M. Brass pensa qu’à cet égard le bonheur du Grand Turc n’était guère digne d’envie ; mais il eut soin de répondre que c’était une chose excellente, et que, pour sa part, il pensait comme ce potentat.

« C’est le bon moyen de chasser la fièvre, dit Quilp ; c’est le moyen de conjurer tous les maux de la vie : ne cessons donc pas de fumer tout le temps que nous resterons ici. Vous, chien que vous êtes ! fumez vite, ou je vous ferai avaler votre pipe !

— Est-ce que nous resterons longtemps ici, monsieur Quilp ? demanda le procureur après que le nain eut donné à son commis cette gracieuse admonestation.

— Nous y resterons, je suppose, jusqu’à ce que le vieux malade qui est là-haut soit mort.

— Hé ! hé ! hé ! fit M. Brass. Oh ! très-bien ! très-bien !

— Fumez donc ! cria Quilp. Pas de repos ! Vous pouvez bien parler en fumant. Il ne faut pas perdre de temps.

— Hé ! hé ! hé ! fit de nouveau M. Brass, mais mollement, en portant de nouveau à ses lèvres l’odieuse pipe. Mais s’il arrivait que le malade allât mieux, monsieur Quilp ?

— Nous attendrons jusque-là, pas davantage.

— Quelle bonté à vous, monsieur, d’attendre jusque-là ! … Il y a des gens, monsieur, qui auraient tout vendu, tout déménagé, oui ! au jour même où la loi le leur permettait. Il y a des gens qui eussent eu la dureté du caillou et l’insensibilité du marbre. Il y a des gens qui…

— Il y a des gens qui s’épargneraient la peine de jaboter comme un perroquet, ainsi que vous le faites.

— Hé ! hé ! hé ! dit Brass. Toujours fin et spirituel ! … »

La sentinelle, qui fumait à la porte, intervint en ce moment, et hurla, sans déposer la pipe :

« V’là la fille qui vient !

— Qui ça, chien ? dit Quilp.

— La fille donc ! … Êtes-vous sourd ?

— Oh ! dit Quilp respirant avec délices comme s’il humait son potage, nous avons, vous et moi, un compte à régler ensemble ; j’ai pour vous, mon jeune ami, bonne provision de horions et d’égratignures. Eh bien ! Nelly, ma poulette, mon diamant, comment va-t-il ?

— Très-mal, répondit l’enfant en pleurant.

— La gentille petite Nell ! … s’écria Quilp.

— Charmante, monsieur, charmante, dit Brass, tout à fait charmante !

— Vient-elle se mettre sur les genoux de Quilp ? dit le nain d’un ton qu’il croyait rendre agréable, ou bien va-t-elle se coucher dans sa petite chambre ? Qu’est-ce qu’elle préfère, cette pauvre Nelly ?

— Comme il sait prendre les enfants ! … murmura Brass échangeant une sorte de confidence avec le plafond. Ma parole d’honneur, c’est plaisir que de l’entendre !

— Je ne viens pas du tout ici pour y rester, répondit timidement Nelly. J’ai besoin seulement d’emporter quelques objets de cette chambre ; et puis… et puis je n’y reviendrai plus.

— C’est pourtant une jolie petite chambre ! … dit le nain en y jetant les yeux au moment où Nelly y pénétrait. Un vrai bosquet ! … Est-il bien sûr que vous ne vous en servirez plus ? Est-il bien sûr que vous n’y reviendrez plus, Nelly ?

— Non, répliqua l’enfant s’enfuyant avec les menus objets de toilette qu’elle était venue chercher ; jamais ! jamais !

— C’est une vraie sensitive, dit Quilp la suivant du regard. Cela fait peine… tiens ! Voilà un lit qui va à ma taille. Je crois bien que je m’accommoderai de la petite chambre. »

Encouragé dans son idée par M. Brass, qui ne pouvait manquer d’applaudir à tout ce que disait le nain, maître Quilp se mit en devoir d’exécuter son dessein en s’étendant de son long sur le lit avec sa pipe à la bouche, agitant ses jambes en tout sens et fumant avec énergie. Comme M. Brass admirait ce tableau, et que le lit était doux et confortable, M. Quilp se détermina à s’en servir la nuit pour y reposer, le jour pour s’en faire un divan, et, sans perdre de temps, il y resta en fumant sa pipe. Quant au procureur, qui se sentait tout étourdi et troublé dans ses idées, — c’était l’effet du tabac sur son système nerveux, — il saisit ce moment pour aller prendre, au dehors, une provision d’air qui lui permît de revenir en meilleur état. Pressé par le nain malicieux de fumer derechef, il tomba engourdi sur le canapé, où il dormit jusqu’au lendemain matin.

Tels furent les premiers actes de M. Quilp en prenant possession de sa nouvelle propriété. Durant quelques jours, le soin de ses affaires ne lui permit pas de se livrer à ses méchancetés favorites, car tout son temps se trouva rempli par le minutieux inventaire qu’il fit, de concert avec M. Brass, de ce que la maison contenait, et par la nécessité d’aller vaquer au dehors à ses autres occupations, ce qui heureusement lui demandait plusieurs heures par jour. Mais comme sa cupidité et sa méfiance étaient en jeu, notre nain ne passait jamais une nuit hors de la maison ; et comme, à mesure que le temps s’écoulait, Quilp éprouvait une plus vive impatience de voir la maladie du vieillard arriver à un résultat, soit bon, soit mauvais, il commença à faire entendre des murmures et des exclamations assez vives.

Nell ne cherchait qu’à se soustraire aux avances que lui faisait Quilp pour entrer en conversation avec elle ; le son de sa voix suffisait pour la mettre en fuite, et elle ne redoutait pas moins les sourires du procureur que les grimaces de Quilp. Elle vivait dans une continuelle appréhension de rencontrer sur l’escalier l’un ou l’autre, si elle avait à sortir de la chambre de son grand-père : aussi ne la quittait-elle guère avant la nuit, quand le silence l’encourageait à s’aventurer au dehors pour aller respirer un peu d’air plus pur dans quelque chambre vide.

Une nuit, elle s’était glissée jusqu’à sa fenêtre favorite et s’y était assise, pleine de chagrin, car la journée avait été mauvaise pour le vieillard. Elle crut entendre une voix dans la rue prononcer son nom ; et, s’avançant pour regarder, elle reconnut Kit, dont les efforts, pour fixer son attention, avaient réussi à la tirer de ses réflexions pénibles.

« Miss Nell ! … dit le jeune homme à voix basse.

— Eh bien ! répondit l’enfant, se demandant si elle devait avoir désormais rien de commun avec le coupable supposé, mais entraînée pourtant vers son ancien favori ; que désirez-vous ?

— Voilà longtemps que je veux vous dire un mot ; mais les gens qui sont en bas m’ont repoussé sans me permettre de vous voir. Vous ne croyez pas, je l’espère, miss, que j’aie mérité d’être chassé comme je l’ai été ? …

— Je dois le croire, au contraire ; autrement, pourquoi mon grand-père serait-il si fort en colère contre vous ?

— J’ignore pourquoi. Je suis certain de n’avoir jamais rien fait pour vous mécontenter ni l’un ni l’autre. Je puis le dire hardiment, la tête haute et le cœur tranquille. Et penser qu’on me ferme la porte au nez quand je viens seulement demander comment va mon vieux maître ! …

— On ne m’avait pas dit cela ! … s’écria l’enfant. En vérité, je ne le savais pas. Je suis bien fâchée qu’on vous ait traité de la sorte.

— Je vous remercie, miss. Ça me fait du bien d’entendre ce que vous me dites. Je le disais bien que ce n’était pas vous qui commandiez ça.

— Oh ! oui, vous aviez raison, dit vivement l’enfant.

— Miss Nell, continua le jeune homme se rapprochant de la fenêtre et baissant la voix, il y a de nouveaux maîtres en bas. C’est un changement pour vous.

— C’est bien vrai !

— Et pour lui aussi… quand il se portera mieux ! ajouta Kit en dirigeant son regard vers la chambre du malade.

— S’il guérit ! … murmura Nelly, qui ne put retenir ses larmes.

— Oh ! il guérira, il guérira ! Je suis sûr qu’il guérira ! Il ne faut pas vous laisser abattre, miss Nell. Je vous en prie, ne vous laissez pas abattre. »

Ces quelques mots d’encouragement et de consolation étaient jetés naïvement et n’avaient pas grande autorité, mais ils n’en émurent pas moins profondément Nelly, dont les larmes redoublèrent.

« Sûrement il guérira, dit le jeune homme, qui ajouta d’un ton triste : Si vous ne vous abattez pas, si vous ne tombez pas malade à votre tour, ce qui l’accablerait et le tuerait au moment où il serait pour se rétablir. S’il guérit, dites-lui une bonne parole, une parole d’amitié pour moi, miss Nell.

— On m’a recommandé de ne pas même prononcer votre nom devant lui, d’ici à longtemps ; je n’ose le faire. Et quand je le pourrais, à quoi vous servirait une bonne parole, Kit ? … À peine aurons-nous du pain à manger.

— Je n’espère pas rentrer chez vous, je ne demande pas de faveur. Ce n’est pas pour un intérêt de salaire et de nourriture que j’ai tant épié l’occasion de vous voir. Ne me faites pas l’injure de croire que je viendrais dans un moment si triste vous parler de ces choses-là. »

L’enfant le regarda d’un air de reconnaissance et d’amitié, mais elle attendit qu’il s’expliquât.

« Non, ce n’est pas cela, dit Kit avec hésitation, c’est quelque chose de bien différent. Je n’ai pas inventé la poudre, je le sais ; mais si je pouvais lui faire voir que j’ai été un fidèle serviteur, faisant de mon mieux et ne songeant à rien de mal, peut-être… »

Ici Kit fit une telle pause, que l’enfant dut l’engager à parler et à se hâter, car l’heure était très-avancée, et il était temps de fermer la fenêtre. Il continua donc ainsi :

« Peut-être ne trouverait-il pas trop téméraire de ma part de dire… Eh bien ! oui, de dire, ajouta-t-il, s’armant soudain d’audace : Cette maison a cessé de vous appartenir à vous et à lui ; ma mère et moi, nous en avons une bien pauvre, mais elle vaut mieux pour vous que celle où vous êtes avec de méchantes gens… Pourquoi n’y viendriez-vous pas jusqu’à ce que vous puissiez chercher et trouver mieux ? »

L’enfant se taisait. Kit, soulagé du poids de sa proposition, maintenant qu’il avait la langue déliée, donna libre cours à son éloquence :

« Peut-être me direz-vous que notre maison est petite et incommode ; c’est vrai, mais elle est très-propre. Peut-être me direz-vous qu’elle est bruyante ; mais il n’y a pas, dans tout Londres, une cour plus tranquille que la nôtre. Que les enfants ne vous effrayent pas ; le plus petit ne crie presque jamais, et l’autre est très-paisible ; d’ailleurs, je réponds d’eux. Ils ne vous ennuieront pas beaucoup, j’en suis sûr. Essayez, miss Nell, essayez. La petite chambre qui fait face à l’escalier est très-agréable. De là, vous pourrez voir en partie l’horloge de l’église à travers les cheminées, et savoir presque l’heure qu’il est ; ma mère dit que cette chambre vous conviendrait bien. Voilà. Vous auriez ma mère pour vous soigner, et moi pour faire vos commissions. Nous ne vous demandons pas d’argent, par exemple ! j’espère que vous n’en avez pas l’idée : miss Nell, vous y déciderez votre grand-père, n’est-ce pas ? Dites-moi seulement que vous essayerez. Essayez de nous amener mon vieux maître… Et d’abord, demandez-lui donc ce que j’ai pu lui faire… Voulez-vous me le promettre, miss Nell ? »

Avant que l’enfant eût pu répondre à cette offre pressante, la porte extérieure s’ouvrit. M. Brass, avançant sa tête coiffée d’un bonnet de nuit, cria d’un ton de mauvaise humeur : « Qui est là ? » Aussitôt Kit s’échappa furtivement, et Nell, ayant fermé doucement la fenêtre, rentra dans l’intérieur de la chambre…

Tandis que M. Brass répétait à plusieurs reprises sa question, M. Quilp, également paré d’un bonnet de nuit, sortit à son tour et regarda soigneusement la rue du haut en bas, puis examina les croisées de la maison située en face. N’apercevant personne, il dut rentrer avec son acolyte, jurant, et l’enfant l’entendit du haut de l’escalier, qu’il y avait un complot formé contre lui, qu’il courait le danger d’être volé et dépouillé par une bande de malfaiteurs qui rôdaient en tout temps autour de sa maison, qu’il n’attendrait pas davantage, mais prendrait immédiatement ses mesures pour vendre l’immeuble et regagner ensuite son toit paisible. Ayant proféré à son aise ces menaces et mille autres imprécations, il se jeta de nouveau sur le petit lit de l’enfant, tandis que Nelly remontait l’escalier d’un pas léger.

Naturellement, la conversation courte et interrompue qu’elle avait eue avec Kit devait produire une profonde impression sur son esprit, remplir ses rêves de la nuit et lui laisser de durables souvenirs. Entourée comme elle l’était par des créanciers insensibles, par les gens mercenaires qui gardaient le malade, parvenue au comble de l’anxiété et du chagrin sans rencontrer d’égards ou de sympathie, même chez les femmes qui l’approchaient, il n’y a pas lieu de s’étonner que ce cœur plein de tendresse eût été vivement touché par les sentiments d’un autre cœur bon et généreux, quelque grossier que fût le temple qu’il habitait. Grâce à Dieu, les temples où habitent ces nobles cœurs ne sont pas l’œuvre de la main des hommes, et souvent ils sont plus dignement parés de leurs pauvres haillons que s’ils étaient décorés de pourpre et de dentelles.