Le Livre de jade (1867)/Les Voyageurs/Un navire à l’abri du vent contraire
Alphonse Lemerre, éditeur, (p. 95-96).
UN NAVIRE À L’ABRI DU VENT CONTRAIRE
Selon Sou-Tong-Po.
es voiles tombent lourdement le long du
mât, le vent joue de la flûte avec fureur.
De tous côtés, en écumant, les vagues battent le navire ; on dirait qu’il est posé au milieu d’une grande fleur blanche.
L’ancre, au bout de sa chaîne, descend dans l’eau et s’accroche aux rochers ; de mille et mille lieues le vent se lance contre elle, et ils luttent ensemble.
On dirait que la mer veut escalader la montagne pour atteindre le ciel ; par moments le ciel et la mer paraissent se rejoindre.
Les marins oisifs dorment dans le navire, calmes sur l’océan furieux. Cependant le cœur aussi a ses vents contraires et ses orages.
Lorsque le temps nous permettra de repartir, j’écrirai ma pensée sur le flanc de la montagne.