Le Diable à Paris/Série 3/Exposition interanimale
Exposition interanimale
Métis divers de ruminants et d’insectes, d’oiseaux et de solipèdes, qui prouvent à quel point était fausse la vieille hypothèse de l’unité des races, et montrent aussi tout ce qu’on doit attendre d’ingénieux et de joli du génie humain, dirigé uniquement par la grande méthode expérimentale.
Rapaces et grimpeurs variés. Parmi les spectateurs arrêtés devant les perchoirs des nouveaux volatiles, on en remarque un grand nombre qui pourraient aussi bien figurer dessus.
Il est évident, d’après ces spécimens, que ce n’est que par hasard que les insectes s’étaient si longtemps accordé le luxe d’avoir six pattes, et qu’après les avoir amenés, par des croisements artistement combinés, à l’état de quadrupèdes, on pourra plus facilement encore les élever au rang des bipèdes.
Les animaux doubles, dénommés aussi à plus juste titre caudicéphales sont de la part du public intelligent, l’objet d’une attention toute particulière, Ceci, en effet pourrait bien être le dernier mot du progrès zoologique.
La science monstrologique ne se borne pas à des produits curieux et de pur agrément, elle a surtout en vue l’avancement des diverses industries pratiques, notamment de l’équitation et du sport dont l’influence a été si heureuse pour le progrès des mœurs et de la civilisation.
Partant de ce fait bien connu que le bal rapproche les distances et égalise les
caractères, les savants ont eu la charmante idée de l’employer pour induire à de
premières familiarités les animaux de races différentes. Toutefois il est bon, pour
plus de sûreté, de les affubler au préalable de têtes qui leur soient aussi peu naturelles
que possible.
L’affaire est bien engagée, la séduction marche grand train, la science n’a plus qu’à attendre l’heureux dénouement de son habile subterfuge.
La boxe fera également merveille pour opérer des rapprochements qu’on aurait jugés impossibles. C’est en se pochant les yeux et s’enfonçant réciproquement quelques côtes qu’on apprend à s’estimer, et de l’estime à la tendre affection il n’y a qu’un pas. Procédé infaillible surtout à l’égard des animaux de provenance anglaise.
Spécimen destiné à faire pressentir que les affinités animales s’étendent jusqu’à l’homme inclusivement et que les bêtes n’y gagnent pas toujours.
D’où il appert que toutes les bêtes peuvent jouer l’homme au naturel, et réciproquement.