Sous l’éclatant soleil de la zone torride,
Et dans l’autre hémisphère, un génois intrépide
Conquit pour l’Ibérie un pays enchanté,
Le Pérou, par l’Incas autrefois habité ;
Sous des cieux sans nuage on y voit la nature
Étaler en tous lieux sa splendide parure ;
Dans les airs embaumés et sur le bord des eaux,
De tous côtés voltige un peuple entier d’oiseaux.
Il en est un surtout dont le charmant plumage
D’un scintillant bijou nous présente l’image :
C’est le beau colibri, volant de fleurs en fleurs,
Et faisant au soleil chatoyer ses couleurs.
Dans les champs ; dans les bois, la flexible liane
S’élève, court ou rampe au loin dans la savane ;
L’anana, le mangoust suspendent en ces lieux,
Au versant des côteaux, leurs fruits délicieux ;
Sur des fleuves géants la légère pirogue
Fend la vague écumeuse, et rapide elle vogue ;
Du bord des frais ruisseaux s’élance le palmier,
Où, vers le soir, gémit le fidèle ramier ;
L’altier magnolia, dont la lige s’incline,
Balance dans les airs sa tête purpurine ;
Aux flancs des noirs rochers, le cactus épineux
Se dresse en étalant son carmin radieux.
Ah ! qui pourrait penser que sur ces beaux rivages,
Où s’offrent en tous lieux les riants paysages
Et les fruits succulents d’un Éden enchanteur,
L’habitant de Mexique ignore le bonheur ?
Aux plus rudes travaux sa vie est consacrée,

Il baigne de ses pleurs cette riche contrée ;
Vainement la nature, en ces brillants climats,
Prodigue ses bienfaits ; il ne les connaît pas.
Avant l’aurore il part, et, loin de sa chaumine,
Il va s’ensevelir tout vivant dans la mine ;
Là, pour un maître dur, avide de trésor,
Au péril de ses jours il cherche un filon d’or.
Descendez, pénétrez dans sa noire minière,
Où jamais du soleil ne plonge la lumière ;
Dans cet abîme affreux descendez avec moi :
De la création vous y verrez le roi,
Celui que l’Éternel a fait à son image,
Vous le verrez traînant les fers de l’esclavage ;
Mais, au moins, s’il succombe, un Croyant généreux
À ce suprême instant lui fermera les yeux !
En ces antres profonds qu’a maudits la nature,
Il console l’esclave, il panse sa blessure ;
Il soutient ardemment un noble et saint effort,
De ce frère mourant pour alléger le sort ;
Et s’il ne peut briser une chaîne cruelle,
Toujours il rend la paix à son âme immortelle.


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