Au fond d’un noir cachot un condamné sommeille ;
Un lévite à genoux près de sa couche veille.
Il veille pour celui que le trépas attend.
Faisant pour se lever un effort languissant,
Le captif, en ouvrant son humide paupière,
Gémit lorsque du ciel il revoit la lumière ;
De la sanglante mort, devant ses tristes yeux,
Passe et repasse encor le fantôme odieux.
Voici son dernier jour ! Devant lui quel abîme !
Mais la religion par sa voix le ranime ;
L’ange de l’Espérance est descendu vers lui ;
Le chagrin soucieux aussitôt s’est enfui ;
Le calme de son âme est peint sur son visage.
De l’aimable vertu, ce doux trésor du sage,
Il commence à goûter les suaves attraits ;
Il sent renaître enfin le bonheur et la paix ;
Dans ses yeux ranimés se tarissent les larmes.
Tout-à-coup il entend le cliquetis des armes !
L’illusion s’envole, et de nombreux soldats
L’entraînent sans pitié vers le lieu du trépas.
Frères ! entendez-vous le char sanglant qui roule ?
Un anathème affreux part du sein de la foule ;
Mais près du malheureux le saint prêtre est resté ;
Il lui parle du Christ et de l’éternité.
Docile à des discours qu’inspire la sagesse,
Dans ses bras fraternels le condamné le presse…

Mais voici l’échafaud ! quel moment plein d’horreur !
Il sent, à cet aspect, faillir son triste cœur ;
Il saisit de Jésus l’image consolante,
La porte avec ferveur à sa lèvre brûlante,
Et contemplant le front de ce divin ami,
Il songe que bientôt il mourra comme lui.
De loin brille dans l’air le tranchant de la hache.
Ce fatal couperet tout-à-coup se détache ;
Une tête bondit, roule sur l’échafaud,
Et le prêtre, à genoux, implore le Très-Haut.
En ce suprême instant d’angoisse et de misère,
Détracteur du Croyant, qu’as-tu fait pour ton frère ?
Toi qui parlais si bien de ton humanité,
Qui vantais la douceur de la fraternité,
Qu’as-tu fait, qu’as-tu fait pour calmer son martyre ?
Rien, pour le consoler tu n’avais rien à dire.


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