Le Cid/Édition Marty-Laveaux/Notice/Avertissement à Mairet

LE CID, Texte établi par Ch. Marty-LaveauxHachetteÉdition Marty-Laveaux (p. 67-76).
V. avertissement au besançonnois mairet[1].


Il n’étoit nullement besoin de vous donner la gêne deux mois durant à fagoter une malheureuse lettre, pour nous apprendre que vous êtes aussi savant en injures que votre ami Claveret et tous les crocheteurs de Paris, Cette belle poésie que vous nous aviez envoyée du Mans ne nous permettoit pas d’en douter ; et bien que vous y fissiez parler un auteur espagnol, dont vous ne saviez pas le nom, la foiblesse de votre style vous découvroit assez. Ainsi vous aviez beau vous cacher sous ce méchant masque, on ne laissoit pas de vous connoître, et le rondeau qui vous répondit parloit de vous sans se contredire. Que si l’épithète de Fou solennel vous y déplaît, vous pouvez la changer, et mettre en sa place Innocent le Bel, qui est le nom de guerre que vous ont donné les comiques. Défaites-vous cependant de la pensée que M. Corneille vous ait fait l’honneur d’écrire contre vos ouvrages : s’il daignoit les entreprendre, il y montreroit bien d’autres défauts que n’a fait celui qui s’en est raillé en passant ; et certes en ce cas il prendroit une peine bien superflue, puisque pour les trouver mauvais, il ne faut que se donner la patience de les lire. C’est un emploi trop indigne de lui pour s’y arrêter, et tous les vains efforts de vos calomnies ne le sauroient réduire à cette honteuse nécessité d’abaisser votre réputation pour soutenir la sienne. Un homme qui écrit doit être en bien mauvaise posture quand il est forcé d’en venir là. Nemo, dit Heinsius, dont l’observateur fait son évangéliste, de aliena reprehensione laudem quærit, nisi qui de propria desperat[2].

Mais vous ne vous contentez pas de lui attribuer les deux réponses au libelle que vous désavouez : vous tâchez de lui faire des ennemis dans sa province, en expliquant la première sur une personne de haute condition que vous n’osez nommer de peur de ses ressentiments contre une explication si impertinente. Ne recourez point à cette artificieuse imposture ; je puis assurer que j’ai vu depuis deux jours écrit de sa main, qu’il n’a fait aucune des deux, et que non-seulement il ne sait qui c’est que son ami dépeint dans la première, ni de qui vous parlez dans la vôtre, mais qu’il tient même pour certain que cette réponse n’attaque personne de la province.

Pour moi je ne puis soupçonner qu’elle s’adresse à un autre qu’à vous : le galant homme dont elle est partie témoigne être particulièrement instruit de vos qualités. Il vous taxe de jeunesse : c’est de quoi vous vous vantez dans votre épître du Duc d’Ossonne[3]. Il vous accuse de manque de jugement : il ne vous fait pas grand tort ; ce seroit vous flatter s’il vous traitoit d’autre façon. Vous ne refuserez pas la compagnie du seigneur Claveret qu’il vous donne : c’est un homme à chérir, il peut faire fortune, et son horoscope lui promet beaucoup, puisque vous aspirez déjà à être un jour de ses domestiques. Sous ombre de la soie dont la poésie vous a couvert, vous voulez passer pour honnête homme d’origine : il faut de la foi pour le croire, vu qu’on sait le contraire. Il vous donne avis de vous défaire de vos belles figures : vous eussiez bien fait d’en user ; on n’eût pas vu dans votre lettre ces insolentes comparaisons de M. Corneille avec des domestiques dont vous ne nommez point le maître, et avec votre ami Claveret, qui me forcent à en faire maintenant de plus véritables, et à vous dire que celui que vous offensez s’est assis sur les fleurs de lis[4] avant que Claveret portât de manteau, et que vous n’êtes pas de meilleure maison que son valet de chambre. Il vous avoit autrefois honoré de son amitié, dont vous vous êtes montré fort indigne. On n’entend rien de plus familier en vos discours, sinon que le Cid est un beau corps plein de plaies, un bel enchantement, la dupe des sots, une beauté fardée, etc. Vous pouvez juger à toutes ces marques si le galant homme vous connoissoit parfaitement.

Il n’y a qu’un point qui me pourroit laisser quelque difficulté : c’est qu’il vous fait plus riche que Claveret. Quoique vous soyez de loin, on sait fort bien que la fortune ne vous a pas avantagé plus que lui, et que les présents qu’elle vous a faits à votre naissance, ne sont pas si grands qu’on ne les puisse cacher dans le creux d’un violon. Aussi vous n’êtes point en peine de faire des caravanes de Besançon à Paris : vos affaires ne vous rappellent point à votre pays, et vous gouvernez aisément par procureur le bien que vous y avez laissé.

Pour confirmer ces vérités, je n’aurois qu’à nommer le maître que vous voulûtes servir, lorsque après avoir importuné quatre jours les comédiens pour votre Chriséide, ils vous jetèrent un écu d’or afin de se défaire de vous ; mais je m’en veux taire pour l’honneur des vers. Passons à votre lettre.

Vous êtes toujours sur les comparaisons, et après avoir proposé ce ridicule parallèle de la Silvie et du Cid, vous ajoutez que quelque éclat qu’elle ait eu quatre ans durant, vous ne l’avez point appelée votre chef-d’œuvre ni votre ouvrage immortel : vous avez bien fait pis. Son succès vous enfla tellement, que vous eûtes l’effronterie de prendre la chaire et de mettre un art poétique au devant de votre Silvanire[5]. Jeune homme, il faut apprendre avant que d’enseigner, et à moins que d’être un Scaliger ou un Heinsius, cela n’est pas supportable. Il est vrai que vous en faites maintenant réparation au public en avouant que toute cette belle doctrine n’est qu’ignorance, puisque vous reconnoissez des défauts aux poëmes que vous avez produits après ; vous promettez toutefois de les justifier : accordez-vous avec vous-même, beau poëte, et soutenez-les sans tache, ou n’en entreprenez pas la justification. Mais donnons un coup d’œil à ce bel art poétique.

Dès le commencement vous vous échappez et faites une définition du poëte à votre mode. « Le poète, dites-vous, est proprement celui qui doué d’une fureur divine, explique en beaux vers des pensées qui semblent ne pouvoir être produites du seul esprit humain[6]. » l’excellent philosophe, qui découvre bien la nature des choses ! Je ne m’étonne plus s’il ne fait point conscience de manquer de jugement en toutes ses pièces : il croit la fureur de l’essence du poëte ; voilà un parfait raisonnement. Si je voulois bien l’empêcher, je lui demanderois ce que c’est qu’une fureur divine ; mais je me contenterai de le prier, puisqu’il prétend avoir droit à l’héritage du Parnasse, qu’il nous cite quelques-unes de ses pensées aussi hautes comme il définit devoir être celles du véritable poëte. Quant à moi, j’en remarque beaucoup dans ses livres qui ne peuvent être produites de l’esprit humain, tant elles sont extravagantes, mais je n’y en ai point encore découvert qui passent la portée d’un esprit médiocre, foible et rampant comme le sien.

Cependant il nous étale pour poëmes dramatiques parfaitement beaux : le Pastor fido, la Filis de Scire, et cette malheureuse Silvanire que le coup d’essai de M. Corneille terrassa dès sa première représentation[7]. Il excuse encore fort adroitement la longueur du cinquième acte de cette admirable pièce, sur ce qu’elle étoit faite pour l’hôtel de Montmorency plutôt que pour celui de Bourgogne, comme si les mauvaises choses y étoient mieux reçues[8]. Sans doute il s’est imaginé qu’elle seroit immortelle, parce qu’il n’y pouvoit trouver de fin ; et c’est sur cette croyance que pour conserver la mémoire d’un homme illustre, il a fait planter sur le frontispice de ce grand ouvrage un marmouset qui lui ressemble, et graver autour de cette vénérable médaille : Jean Mairet de Besançon. C’est ce qu’il a fait de plus à propos en sa vie, que de nous avertir par là qu’il n’est pas né François[9], afin qu’on lui pardonne les fautes qu’il fait à tous moments contre la langue.

Revenons à votre lettre, Monsieur Mairet. N’est-ce pas une belle chose que l’histoire que vous nous contez d’un libraire de Rouen qui mourut, à votre très-grand regret, pour avoir imprimé votre Chriséide[10] ? Nous espérions qu’ensuite vous nous en donneriez l’épitaphe, pour témoignage de cette violente affliction : vous avez frustré le lecteur de ce contentement ; mais pour suppléer à votre défaut, en voici un dont les vers ne valent guère mieux que les vôtres :


Ci-dessous gît Jacques Besogne,
Qui s’étant mis trop en besogne
Pour le beau poëte Jean Mairet,

Mourut à son très-grand regret.

Après cette belle histoire vous perdez tellement le respect et le sens commun, que vous avez l’insolence de préférer votre

Silvie aux œuvres de MM. de Racan et Théophile, au dernier desquels vous êtes si étroitement obligé, que sans lui vous suivriez encore la déplorable condition des vôtres. Ce n’est pas faire en homme généreux que de payer d’ingratitude tant de bienfaits reçus. On sait que le dialogue qui a tant plu à la cour et qui avoit couru plus de deux ans avant qu’on sût qu’il y eût une Silvie au monde, étoit de la façon de Théophile ; ainsi vous vous pariez d’un habillement emprunté, et ce bel enchantement que vous nommez le Pastor fido des Allemands, doit à ce grand homme si peu qu’il eut de grâce.

C’est à ces mêmes Allemands que vous pensez parler, quand vous nous assurez si magnifiquement que le Cid a perdu à la lecture une bonne partie de l’estime qu’il avoit acquise à la représentation. Quelle impudence ! Les extravagances de Virginie, les impudicités du duc d’Ossonne et les coquetteries de Sophonisbe ont mérité l’impression, si l’on vous en croit, et celle du Cid devoit être différée pour cent et un an ! Ne donnez point à M. Corneille les mauvais conseils de vos tailles-douces, qui n’ont servi dans votre Silvanire qu’à incommoder votre libraire[11], et ne faites plus sonner si haut ces grands coups d’épée que M. de Scudéry a donnés au Cid tout au travers du corps. Après en avoir reçu deux mille de pareils, on se porte encore fort bien, et ceux que ses raisons de paille ont convertis (si toutefois elles ont converti quelques-uns) avoient grande envie de l’être.

Au reste, nous voyons maintenant ce qui vous pique : vous vous fâchez de ce qu’on a découvert vos brigues et les artifices que vous mettez en usage pour mendier un peu de réputation. Vous vous plaignez de ce que dit M. Corneille :

Que son ambition pour faire plus de bruit
Ne quête point les voix de réduit en réduit[12].


On sait le petit commerce que vous pratiquez, et que vous n’avez point d’applaudissements que vous ne gagniez à force de sonnets et de révérences. Si vous envoyiez vos pièces de Besançon, comme M. Corneille envoie les siennes de Rouen, sans intéresser personne en leur succès, vous tomberiez bien bas, et je m’assure que quelque adresse que vous apportiez à faire valoir votre traduction du Soliman italien, qui a déjà couru les ruelles dix-huit mois et qu’on réserve pour cet hiver, le bruit de cette importante pièce de batterie ne fera point faire retraite au Cid[13].

Criez tant qu’il vous plaira, et donnez aux acteurs ce qui n’est dû qu’au poëte ; servez-vous du témoignage de M. de Balzac, il ne vous sera point avantageux. Ne traite-t-il pas Massinisse et Brutus de même que Jason, qu’il nomme le premier, pour montrer qu’il estime plus son auteur que vous[14] ? Et véritablement vous avez été toujours tellement au-dessous de lui, dès qu’il a pris la plume, qu’il n’avoit pas besoin de faire un Cid pour passer devant vous : tant de beaux poëmes dont il a enrichi le théâtre vous laissoient déjà loin derrière. Parlez en homme désintéressé, et on vous écoutera. Si le malheur a voulu que la Mariane et le Cid aient étouffé le débit de toutes vos rimes, il faut prendre patience, et ne murmurer point contre les nouvelles grâces qu’on a trouvées au Cid depuis qu’il a été imprimé.

Vous vous plaignez de ce que M. Corneille ne s’est pas soumis au jugement de l’Académie. Pour le mettre en tort, il faudroit que vous et l’observateur y soumissiez vos ouvrages ; ce n’est pas la raison qu’il soit censuré tout seul, jamais il ne refusera de prendre ces Messieurs pour juges entre Médée et Sophonisbe, et même entre Clitandre et Virginie, mais non pas entre le Cid et un libelle.

Je finirois si vous ne m’aviez obligé à lire votre épître du Duc d’Ossonne : vous nous y renvoyez pour y voir votre modestie qui est si grande, que dès le titre vous traitez le procureur général de votre parlement comme vous feriez un procureur fiscal de quelqu’une de vos hautes justices[15]. Cette arrogante familiarité avec un des principaux magistrats de votre pays débutoit assez bien, et vous eût fait passer pour homme de marque, si dans votre épître la bassesse de votre inclination n’eût découvert celle de votre naissance. Ce souhait famélique d’être reçu au Louvre avec des hécatombes de Poissy[16], tient fort de votre pauvreté originelle ; et puisque vous êtes si affamé, vous serez aisé à accorder sur ce point avec M. Corneille, qui se contentera toujours de ces honorables fumées du cabinet dont vous êtes si dégoûté, cependant qu’on vous envoyera dans les offices vous soûler de cette viande délicate pour qui vous avez tant d’appétit.

Le reste de cette épître n’est que vanité : vous vous perdez dans la réflexion de vos grandes productions, et vous vantez d’avoir été l’idée universelle des grands génies que vous nommez, comme s’il étoit à croire qu’ils vous eussent considéré[17]. Mais n’avez-vous pas bonne grâce un peu après de traiter d’inférieurs, et quasi de petits garçons, les auteurs de Cléopatre[18] et de Mithridate[19], pour qui vous faites une classe à part ? Vous ne sauriez nier que cette Cléopatre a enseveli la vôtre, que le Mithridate a paru sur le théâtre autant qu’aucune de vos pièces, et que l’une et l’autre à la lecture remportent bien haut sur tout ce que vous avez fait. Votre style n’est qu’une jolie prose rimée, foible et basse presque partout, et bien éloignée de la vigueur des vers de ces Messieurs, sur qui M. Corneille seroit bien marri de prétendre aucune prééminence.

Cet acte de la pastorale héroïque qui vous fut donné à faire il y a quelque temps[20], est la preuve indubitable de la foiblesse de style que je vous reproche : votre or (pour user de vos termes) y fut trouvé de si bas aloi et votre poésie si chétive, que même on ne vous jugea pas capable de la corriger. La commission en fut donnée à trois Messieurs de l’Académie, qui n’y laissèrent que vingt-cinq de vos vers. C’est un préjugé fort désavantageux pour vous, et qui vous doit empêcher, si vous êtes sage, d’exposer vos fureurs divines au jugement de cette illustre compagnie.

Je ne parlerai point de l’irrévérence avec laquelle vous déclamez dans cette épître contre les grands du siècle, qui ne reconnoissent pas assez votre mérite, ni du repentir que vous témoignez de leur avoir dédié vos chefs-d’œuvre ; le mal que je vous veux ne va pas jusqu’à vous faire criminel. Je vous donnerai seulement un mot d’avis avant que d’achever, qui est de ne mêler plus d’impiétés dans les prostitutions de vos héroïnes ; les signes de croix de votre Flavie et les anges de lumière de votre Duc[21] sont des profanations qui font horreur à tout le monde.

Adieu, beau lyrique, et souvenez-vous que M. Corneille montrera toujours par véritables effets sur le théâtre, qu’il en sait mieux les règles et la bienséance que ceux qui lui en veulent faire leçon ; que malgré vos impostures le Cid sera toujours le Cid, et que tant qu’on fera des pièces de cette force, vous ne serez prophète que parmi vos Allemands[22].



  1. Attribué à Corneille par les frères Parfait, qui considèrent à tort cet Avertissement comme une réponse à l’Apologie pour M. Mairet (Histoire du Théâtre françois, tome V, p. 270). Voyez ci-dessus, p. 41.
  2. « Personne ne cherche à tirer sa gloire de la critique d’autrui, si ce n’est celui qui désespère de sa gloire propre. »
  3. « J’ai commencé de si bonne heure à faire parler de moi, qu’à ma vingt-sixième année je me trouve aujourd’hui le plus ancien de tous nos poëtes dramatiques. » Voyez encore ci-dessus, p. 60, note i.
  4. Voyez la Notice biographique, et ci-dessus, p. 10, note 3.
  5. La Silvanire est précédée d’une Preface en forme de discours poetique, à Monsieur le comte de Carmail.
  6. La première division de cette préface, intitulée : Du poete et de ses parties, commence ainsi : « Poëte proprement est celui-là qui doué d’une excellence d’esprit et poussé d’une fureur divine, explique en beaux vers des pensées qui semblent ne pouvoir pas être produites du seul esprit humain. »
  7. « Disons donc que les anciens nous ont laissé des poëmes beaucoup moins remplis à la vérité que ne sont les nôtres, tant pour la raison que je viens d’apporter, que pour quelque autre à nous inconnue, et qu’on n’infère pas de là que la rigueur de notre règle en ait été la principale cause, comme veulent quelques-uns de ces Messieurs, qui n’ont point envie de la recevoir. D’autant que nous ne pouvons croire cela sans faire tort à ces grands esprits de l’antiquité, qui sembleroient avoir eu moins d’invention en la composition de leurs sujets, que nos modernes dramatiques, qui, nonobstant la difficulté de cette loi, n’ont pas laissé d’en imaginer de parfaitement beaux et parfaitement agréables, tels que sont par exemple le Pastor fido, la Filis de Scire et, sans aller plus loin, la Silvanire ou la Morte vive. »
  8. « Pour son étendue, il est vrai qu’elle passe un peu au delà de l’ordinaire, et que l’ayant plutôt faite pour l’hôtel de Montmorency que pour l’hôtel de Bourgogne, je ne me suis pas beaucoup soucié de la longueur, qui paroît principalement au dernier acte, à cause de la foule des effets qu’il y faut nécessairement démêler : si c’est un défaut, c’est pour les impatients et non pour les habiles. » La Silvanire est dédiée à Madame la duchesse de Montmorency.
  9. Voyez p. 76, note 2.
  10. « Pour la Chriséide, il me suffira de lui dire qu’elle n’a jamais vu le jour de mon consentement ; qu’étant pleine des propres fautes de mon enfance et de celles que le peu de soin de l’imprimeur y laissa glisser, je fis ce que je pus pour en empêcher la distribution, jusque-là même qu’un de vos compatriotes, nommé Jacques Besongne, qui l’avoit mise sous la presse, fut obligé par les poursuites de François Targa, votre libraire, à qui j’en avois laissé procuration, de faire un voyage en cette ville, où le pauvre homme mourut subitement, à mon très-grand regret ; ce sont des circonstances assez remarquables pour vérifier ce que je dis. » (Épître familière du Sr Mairet, p. 9.)
  11. La Silvanire est ornée d’un frontispice gravé, avec portrait de J. Mairet de Besançon, et de cinq planches de Michel Lasne.
  12. Excuse à Ariste, vers 39 et 40. Le texte exact est :

    Et mon ambition, pour faire plus de bruit,
    Ne les va point quêter (les voix) de réduit en réduit.

  13. En 1639 a paru : Le grand et dernier Solyman ou la Mort de Mustapha, tragédie par M. Mairet. Représenté par la troupe Royalle. Paris, A. Courbé, in-4o. On lit dans l’Avertissement au lecteur : « Je t’avertis que le Solyman qu’on mit en lumière il y a deux ans n’est pas de moi. » En effet, le Soliman publié en 1637 est de d’Alibray. Les deux ouvrages sont imités de la pièce italienne du comte Bonarelli de la Rovère.
  14. Voyez la Notice sur Médée, tome II, p. 330 et 331, et ci-dessus, p. 8 et 9, et note i de cette dernière page.
  15. Cette dédicace est intitulée : « A tres-docte et très-ingenieux Anthoine Brun, procureur general au Parlement de Dole, epitre dedicatoire, comique et familiere, » et elle commence par ces mots : « Monsieur mon tres-cher ami. »
  16. « Il est vrai qu’on nous fait au Louvre des sacrifices de louanges et de fumées, comme si nous étions les dieux de l’antiquité les plus délicats, où nous aurions besoin qu’on nous traitât plus grossièrement, et qu’on nous offrît plutôt de bonnes hécatombes de Poissy, avec une large effusion de vin d’Arbois, de Beaune et de Coindrieux. »
  17. « Il est très-vrai que si mes premiers ouvrages ne furent guère bons, au moins ne peut-on nier qu’ils n’ayent été l’heureuse semence de beaucoup d’autres meilleurs, produits par les fécondes plumes de MM. de Rotrou, de Scudéry, Corneille et du Ryer, que je nomme ici suivant l’ordre du temps qu’ils ont commencé d’écrire après moi, et de quelques autres, dont la réputation ira quelque jour jusques à vous ; particulièrement de deux jeunes auteurs des tragédies de Cléopatre et de Mithridate, de qui l’apprentissage est un demi-chef-d’œuvre qui donne de merveilleuses espérances des belles choses qu’ils pourront faire à l’avenir. »
  18. Cléopatre, tragédie de Benserade, représentée en 1635.
  19. La Mort de Mithridate, tragédie de la Calprenède, représentée en 1635.
  20. Nous ne savons de quel ouvrage il s’agit ici. Serait-ce de la Grande Pastorale qui, suivant Pellisson, renfermait cinq cents vers de la façon du Cardinal, et à l’impression de laquelle il renonça après avoir pris connaissance des observations de Chapelain, que lui communiqua Boisrobert (voyez la Relation contenant l’histoire de l’Académie françoise, p. 179 et suivantes) ? C’est probable ; remarquons toutefois que Pellisson ne dit mot de la collaboration de Mairet.
  21. Voici le passage des Galanteries du duc d’Ossonne auquel il est fait allusion ici :
    Flavie.

    AbusÔ ma sœur ! sous quelle étrange forme
    Abusez-vous mes yeux et mes sens à la fois ?

    Le Duc.

    Madame, réservez tous ces signes de croix
    Pour l’apparition de ces mauvais fantômes.
    Qui meuvent, ce dit-on, des corps d’air et d’atomes.

    Flavie.

    Dieu ! c’est bien un démon véritable et trompeur,
    Puisqu’il m’ôte la voix.

    Le Duc.

    Puisqu’il m’ôte la voix. Non, n’ayez point de peur.
    Si j’étois un esprit de l’infernale suite.
    Tant de signes de croix m’eussent donné la fuite,
    Et puis étant vous-même un ange de clarté.
    Votre divin aspect m’eût-il pas écarté ?

    (Acte III, scène ii.)
  22. On sait que Besançon, patrie de Mairet, et la Franche-Comté tout entière n’étaient pas encore françaises : elles avaient appartenu à l’empire d’Allemagne et faisaient alors partie des possessions de la ligne espagnole de la maison d’Autriche.