Le Chemin des ombres heureuses/Mérion

Édition du Mercure de France (p. 13-14).

MÉRION


Mérion ne s’est pas soucié
des sacrifices, des fêtes, des offrandes ;
il n’a jamais gravi l’escalier d’un temple
et sur les grands secrets n’a jamais disputé.
Pourtant il n’était point impie.
Il portait sur son front haut levé
l’amour éclatant de la vie ;
il aimait tout ce qui respire
parce que tout servait à former son plaisir.
Il n’était point non plus stupide ou débauché
parce qu’il festoyait avec des courtisanes
et s’animait aux jeux du stade.

— Comment louerait-on mieux les Dieux,
répétait-il, qu’en se montrant fort et joyeux !
Je les honore dans leurs œuvres ;
le plus beau temple est une femme,
la meilleure offrande un baiser.
Je place mon culte en mes actes
et je ne lève pas un doigt sans adorer.