Le Cas du docteur Plemen (Pont-Jest)/II/X

E. Dentu (p. 324-339).

X

AVANT L’AUDIENCE


Le lendemain, 26 décembre, anniversaire, jour pour jour, par une étrange rencontre, de cette représentation de Froufrou qui avait attiré à la Malle toute la haute société de Vermel, les portes de la cour d’assises devant laquelle allait comparaître Mme  Deblain étaient ouvertes au public à dix heures du matin.

La foule, qui attendait impatiente, depuis l’aube, malgré la température glaciale, foule composée en majeure partie, selon les expressions énergiques de M. de Cormenin, de piliers de cabarets, de souteneurs de filles, de voleurs émérites ou apprentis, se précipita dans l’enceinte réservée, à l’extrémité de la salle, aux spectateurs debout des drames de la justice.

Les banquettes occupant le milieu de l’immense parallélogramme aux grandes boiseries de chêne, où se tenaient les audiences criminelles, étaient envahies depuis déjà près d’une heure par les privilégiés munis de cartes. Il n’en restait que deux de libres, celles où les témoins devaient prendre place après avoir déposé.

Quant aux sièges disposés en avant de ces banquettes, dans le prétoire, jusqu’à la barre, à toucher la tribune des jurés et le banc des avocats, et même sur l’estrade de la cour, laissant à peine aux magistrats un espace suffisant, ils attendaient ces invités de première catégorie qui n’avaient pas besoin d’arriver d’avance, puisqu’ils étaient titulaires, comme à une première représentation, de places gardées.

On était tout surpris que M. de la Marnière eût ainsi réglé les choses, car on l’avait souvent entendu s’élever avec indignation contre la transformation en théâtre de l’enceinte de la justice, et dans les affaires qu’il avait précédemment présidées, il n’avait accordé d’entrées de faveur à l’audience qu’aux personnes qu’un intérêt avouable y appelait.

Pourquoi ce changement dans la façon de faire de l’éminent conseiller ? Ne pouvant s’en rendre compte, bon nombre de gens de son milieu l’en blâmaient.

N’offrent-ils pas, en effet, le plus écœurant des spectacles, ces curieux qui viennent à la cour d’assises comme ils vont chez les dompteurs, espérant la révolte des fauves, ou dans les cirques, guettant la chute des acrobates ?

Pour ces blasés, avides d’émotions violentes, il n’y a, dans les débats des causes criminelles, ni exemple ni haute leçon de moralité, mais seulement, entre l’accusé qui se défend et l’accusateur qui accable, une lutte dont l’honneur et la tête sont le prix. Ils se soucient aussi peu de l’éloquence du ministère public que de celle des avocats. Ce qui seulement les intéresse et les émeut, ce sont les côtés dramatiques ou scandaleux de l’affaire.

Et ces femmes du monde qui sont là, pêle-mêle avec des filles — car si tel magistrat a donné une place à Mme  la comtesse de X… tel autre a fait entrer sa maîtresse — cette promiscuité ne les froisse pas, cette atmosphère lourde et viciée ne les étouffe point.

Élégantes, quelques-unes en noir, comme si, par avance, elles portaient le deuil de l’accusé — il y a des toilettes d’audience, comme il y a des toilettes de bal, de dîner et d’académie — grignotant des friandises et respirant des sels, jouant de l’éventail, les larmes aux yeux ou les lèvres souriantes, selon les phases des débats ; névrosées, hypnotisées par leur curiosité malsaine, les plus délicates, les plus honnêtes supportent tout sans rougir les voisinages honteux, les détails grossiers, parfois obscènes des rapports médico-légaux, les réponses ordurières ou cyniques des accusés, la vue des pièces de conviction : armes teintes de sang, linges maculés, flacons empoisonnés, débris humains renfermés dans des bocaux après avoir servi aux analyses chimiques.

Le teint, un peu pâle et le lorgnon aux yeux, elles examinent ces horribles choses du plus près possible. Pour peu, elles les toucheraient de leurs mains finement gantées.

Et tout cela, ces mères de famille que des prostituées coudoient, avec lesquelles elles échangent des sensations, tout cela en face du Christ, que la laïcisation n’a pas encore chassé des salles d’audience et dont le soir, dévotement, pleines de foi en sa miséricorde, elles feront baiser les pieds à leurs enfants, avant de les étendre doucement dans le berceau !

Ce n’est pas seulement à la dignité de la justice que porte atteinte la présence de ce public choisi, c’est encore parfois à son équité, à sa liberté d’appréciation.

Parmi ces spectatrices — quel autre nom leur donner ? — les magistrats et les jurés ont toujours des parentes leur tenant de fort près : femmes, filles ou sœurs. Est-ce qu’il serait humain d’admettre que leurs impressions, leurs raisonnements, leurs observations, leurs sentiments divers, soit de pitié, soit d’horreur, sont sans effet sur ceux qui les suivent des yeux pendant les débats et les retrouvent durant les suspensions d’audience ou le soir, dans l’intimité de la famille ?

Et lorsque les juges reprennent possession de leurs sièges, en même temps que les membres du jury rentrent à leur banc, ils voient les choses tout autrement qu’ils ne les avaient appréciées d’abord. Des criminels ont dû la vie à cette influence de l’auditoire. Peut-être d’autres, ce qui est plus atroce à penser, lui ont dû la mort.

Un exemple entre tous.

C’était à l’affaire Moyaux, cet horrible assassin de sa petite fille ; Me  Demange l’avait défendu avec cette éloquence entraînante, cette habileté d’analyse et de déduction qui font de lui l’un des meilleurs avocats d’assises de notre temps ; mais la condamnation capitale du misérable n’en paraissait pas moins certaine.

Quelles circonstances atténuantes pouvait-on accorder à un semblable forfait ? À moins d’assimiler Moyaux à Médée et d’avoir la hardiesse de dire : « De même que l’épouse de Jason a poignardé ses fils pour ne pas les laisser dans les bras de Creuse, sa rivale, de même Moyaux, dans un accès de folie, a tué sa fille, plutôt que de la rendre à sa femme. »

Cette femme était venue à l’audience ; sa déposition accablante avait moins exprimé sa douleur de mère que sa haine d’épouse ; l’auditoire l’avait bien compris, et des murmures de réprobation l’avaient, accompagnée lorsqu’elle était allée s’asseoir, au banc des témoins, auprès de celui dont on la disait la maîtresse.

Qu’arriva-t-il ? C’est qu’au moment où les jurés, en se retirant dans leur salle des délibérations, entraient dans le couloir grillé qui longe l’estrade de la cour, un des publicistes, un des moralistes et des auteurs dramatiques les plus célèbres de notre époque, qui était adossé contre cette séparation, se retourna et, voyant passer ces honnêtes gens, ces pères de famille qui allaient décider de la vie ou de la mort de l’accusé, il dit à haute voix :

— Si on fait tomber la tête de cet homme, sa veuve épousera son amant ; ce sera tout simplement monstrueux !

Et Moyaux obtint le triste bénéfice des circonstances atténuantes. Il ne fallait pas que sa femme put se remarier !

Qui sait si, dans d’autres cas, les impressions de la foule n’ont pas envoyé à l’échafaud quelque misérable que le jury, laissé aux seules appréciations de sa conscience, aurait pris en pitié ?

Voilà ce qui résulte, plus souvent qu’on ne le suppose, du contact trop immédiat de ces privilégiés, de ces spectateurs des premières, avec ceux qui tiennent entre leurs mains l’honneur et la vie des accusés.

C’était devant un auditoire ainsi composé, trié sur le volet, que la pauvre Mme  Deblain allait comparaître !

Non seulement elle aurait à se défendre de l’odieuse accusation relevée contre elle, mais il lui faudrait le faire en présence de ces gens de son monde, qui avaient été ses hôtes, ses amis, les courtisans de sa fortune et de sa beauté ; en face de ces femmes dont elle n’ignorait pas la haine, dont les basses jalousies l’avaient toujours surveillée, dont les regards ironiques allaient lui dire toute leur joie hideuse de son abaissement.

Comment M. de La Marnière n’avait-il pas hésité adonner ainsi la malheureuse en spectacle ?

Certains disaient que le président des assises n’avait osé faire autrement mais d’autres insinuaient que, s’il avait agi de la sorte, c’est que les débats devaient peut-être tourner à la confusion de ceux qui les avaient provoqués, et qu’il espérait la réhabilitation de Mme  Deblain aussi éclatante que l’accusation était imméritée.

Il est alors aisé de comprendre si la curiosité de tous avait atteint son paroxysme, et avec quel souci de ne pas arriver après le lever du rideau, les personnes que leurs sièges réservés attendaient vinrent en prendre possession dès dix heures du matin, bien que l’audience ne dût être ouverte qu’une heure plus tard.

Mmes  Lachaussée et Babou, arrogantes et plus vulgaires encore dans leurs toilettes de mauvais goût, furent des premières.

L’huissier de la cour, par ordre bien certainement, leur avait donné les meilleures places, au premier rang, contre le banc des avocats, le plus près possible des accusés. N’étaient-elles pas avides de ne rien perdre des angoisses de cette étrangère qui, pendant deux ans, les avait humiliées de sa jeunesse, de sa beauté, de son élégance et de sa générosité pour les pauvres ?

Leurs amies, animées des mêmes sentiments mauvais, parurent ensuite les unes après les autres, échangeant, des sourires, des saluts de la main, comme si elles se rencontraient dans un salon, hochant la tête, levant les yeux au ciel, comme pour dire : « Hein ! quelle aventure ! Cela devait finir ainsi ! »

D’autres femmes les suivaient, plus discrètes, moins expansives, bien évidemment dans des dispositions d’esprit tout autres.

C’étaient, celles-là, des personnes appartenant au vrai et meilleur monde, restées fidèles à Mme  Deblain, n’admettant pas sa culpabilité et convaincues que leur présence et leurs regards sympathiques lui rendraient du courage.

On reconnaissait, au milieu d’elles, la jolie Mme  Mortier, qui avait joué, à la Malle, le rôle de Louise dans Froufrou, et la charmante Mme  Langerol, la femme du courageux et dévoué défenseur de la fille d’Élias Panton.

Puis, çà et là, les amis de Félix Barthey : le prince de Linar, le peintre Robert Blaise, les romanciers Duprat et Bernès, les sculpteurs David et Thirion, braves cœurs, honnêtes gens et célébrités parisiennes, qui ne dissimulaient ni leur indignation, ni leur mépris pour ceux dont la sottise, la passion politique ou le zèle aveugle avaient si lestement transformé en empoisonneur le loyal garçon qu’ils savaient incapable même d’une mauvaise pensée.

Enfin, sur l’estrade, occupant déjà les sièges qui leur étaient réservés en arrière de la cour, les autorités du département : le préfet, un de ces fonctionnaires républicains sceptiques, intelligents et de bonne société, comme on en rencontre encore quelques-uns, qui s’était sagement abstenu de jouer aucun rôle dans l’affaire, se souvenant que sa femme et lui avaient été fréquemment les hôtes des Deblain, et ne croyant peut-être qu’officiellement à la culpabilité de la jolie veuve ; le maire de Vermel, ridicule et prétentieux personnage, qui venait de faire enlever de l’une des places de la ville la statue de saint Louis, dans l’espoir que cet acte de vandalisme historique et artistique lui vaudrait la décoration après laquelle il courait avec un tel acharnement, qu’on appelait les actes de son omnipotence : « les stations de la croix de monsieur le maire » ; le receveur général, informé par le riche banquier, M. Meursan, que l’un des compatriotes de Mme  Deblain, venu tout exprès à Vermel pour la défendre, lui avait été recommandé d’une façon toute particulière par l’une des sommités financières les plus honorables de Paris ; le général de division Sauvière, vaillant soldat qui, ayant eu Félix Barthey sous ses ordres pendant la guerre, ne doutait pas de son innocence ; et enfin, sur le devant de la scène, ou plutôt sur le devant de l’estrade, à droite, à proximité du siège du ministère public, MM. Duret et Babou : le premier, raide et froid comme toujours ; le second, rasé de frais, au teint verdâtre, endimanché dans sa redingote noire frippée comme un vêtement sortant du mont-de-piété, et s’efforçant en vain de faire entrer ses grosses mains dans des gants à un seul bouton, bruns, aux coutures blanchâtres et trop courts.

C’était leur œuvre, à ces deux personnages, qui allait se jouer sur ce terrible théâtre, et ils n’avaient garde de manquer à la représentation !

Pendant ce temps-là, Mme  Deblain et Félix Barthey attendaient, entourés de leurs parents et de leurs défenseurs, non pas dans la petite geôle sombre, aux bancs de bois, où d’ordinaire étaient gardés les accusés jusqu’à l’ouverture des débats et pendant les suspensions d’audience, mais, par ordre de M. de la Marniére, dans une pièce éclairée, chauffée et meublée de sièges convenables, qui faisait suite à la chambre du conseil.

Les deux gendarmes chargés de la surveillance des prisonniers se tenaient discrètement à l’écart.

Rhéa était douloureusement changée. Malgré tous les appels qu’elle avait faits à son énergie, malgré les sympathies dont elle se sentait entourée, la présence de ceux qu’elle aimait, le calme de sa conscience et la confiance qu’elle avait aussi bien dans la bonté de sa cause que dans le talent de son avocat, ces trois mois de détention préventive l’avaient brisée.

Son teint n’était plus chaud comme autrefois, ses lèvres se crispaient dans un rictus nerveux. Entourés d’un cercle bleuâtre, ses yeux, aux regards si doux jadis, lançaient des éclairs fiévreux et paraissaient démesurément agrandis. Sa beauté rayonnante avait disparu ; mais la malheureuse était peut-être plus belle encore qu’autrefois, avec sa pâleur de victime et sa résignation de martyre.

Ah ! c’est que, pour elle, nous l’avons dit, les jours avaient été longs et les nuits horribles dans l’isolement de sa cellule ; et à cette heure dernière, à toucher le dénouement de cet épouvantable drame dont elle était l’héroïne, certaines pensées qui l’avaient obsédée dans ses insomnies lui revenaient encore.

Elle ne pouvait surtout s’expliquer la conduite du docteur Plemen. Comment, cet homme qui lui avait avoué son amour, c’était à lui qu’elle devait d’être accusée d’empoisonnement ! Et il n’était venu la voir que deux fois il ne lui avait écrit que quelques lignes de consolations banales, depuis le jour où il lui avait fait parvenir cette lettre terrible pour lui apprendre la mort violente de son mari. La croyait-il donc coupable ?

Ah ! comme elle se reprochait ses coquetteries avec lui. Dans son orgueil féminin, ce souvenir lui causait de vifs remords et une profonde humiliation.

Cependant elle n’avait autour d’elle, à ce moment suprême, que des amis : son père, sa sœur, son avocat si dévoué, Me  Langerol, dont la confiance communicative aurait dû la rassurer un peu, et son oncle Jonathan, dont l’affection, si ridicule parfois dans ses manifestations, n’en était pas moins sincère.

Elle savait de plus que la haute société de la ville lui portait le plus réel intérêt, et, néanmoins, elle tremblait.

Quant à Félix Barthey, depuis sa riposte si rigoureuse à M. Babou, lors de sa première comparution devant lui, il n’avait pas eu un seul instant de colère ni de défaillance.

Si parfois, çà et là, il s’était senti le cœur serré par une douloureuse angoisse, c’est à la pensée que la malheureuse Mme  Deblain subissait, comme lui, l’atroce supplice de la prison préventive et de l’isolement.

Il est aisé de comprendre que, de sa propre innocence, le peintre en avait conclu à l’innocence de celle dont l’accusation le prétendait l’amant, et le complice.

Le jour où il avait pu le lui faire savoir, par l’intermédiaire de ceux qui les visitaient tous deux, il s’était empressé de l’assurer de son respect, de son affection, de son entier dévouement.

Il ignorait alors sur quoi reposaient les charges relevées contre elle, et, lorsque Rhéa lui avait fait jurer de ne jamais tenter de la défendre auprès du juge d’instruction, de ne pas répondre aux questions qu’on pourrait lui adresser relativement à ses excursions à la Malle, au moment de la mort de son mari, il avait sans doute compris pourquoi l’infortunée exigeait ce silence, car il l’avait religieusement gardé.

M. Babou avait eu beau faire, il s’était toujours refusé à parler. Au moment de comparaître devant le jury, il était aussi calme que son défenseur, Me  Georges Leblanc, dont l’esprit effrayait si justement par avance le procureur général.

En retrouvant Mme  Deblain dans cette petite pièce que le président des assises avait assignée à ses accusés, Félix Barthey s’était empressé de courir à elle pour lui baiser la main, et cet hommage spontané avait réconforté la pauvre femme.

Le peintre avait ensuite échangé un sourire avec Mme  Gould-Parker, puis il était revenu auprès de son frère et de son défenseur, lorsque, tout à coup, la porte s’ouvrit pour livrer passage à William Witson, ou plutôt au docteur Maxwell, puisque notre personnage avait dû renoncer à son incognito.

La physionomie d’ordinaire si grave, si impénétrable de l’Américain exprimait une satisfaction intime ; ses yeux rayonnaient d’un étrange orgueil.

Tout, dans sa démarche, dans sa voix, trahissait une assurance absolue, une joie profonde. Chacun s’en aperçut.

— Voici le grand moment arrivé, ma chère compatriote, dit-il en s’approchant de Mme  Deblain, qui lui tendit son front. Je ne vous demande que du calme ; le reste regarde votre défenseur et moi. Dans quelques heures, j’en ai la conviction, ici les rôles seront intervertis. N’oubliez aucune de nos recommandations.

— Oui, du courage, ma fille, du courage supplia le gros Elias, embrassant son enfant plus tendrement qu’il ne l’avait jamais fait ; prouve à tous ces gens-là que les femmes de notre pays sont vigoureusement trempées ; ne donne à personne la satisfaction de te voir trembler.

— Vous avez raison, père, répondit Rhéa en se levant brusquement avec une expression de révolte et d’énergie sur ses traits fatigués. J’ai honte de ne pas mieux suivre l’exemple que me donne M. Barthey. Ah ! pardonnez-moi tous !

Elle allait des uns aux autres, leur serrant les mains, les embrassant, leur souriant et répétant d’une voix ardente :

— Ah ! je suis une empoisonneuse ! Eh bien ! nous allons leur prouver, n’est-ce pas ? qu’ils en ont menti, qu’ils sont tout à la fois des calomniateurs et des sots !

— Dieu soit loué ! psalmodia mystiquement l’oncle Jonathan ; la nuit dernière, les yeux de mon homme intérieur se sont ouverts, j’ai assisté au combat victorieux de la vérité contre l’erreur, et…

Mais le révérend fut subitement interrompu par une voix nasillarde qui glapissait du seuil de la pièce :

— Monsieur le président donne l’ordre de faire entrer les accusés !

Mme  Deblain embrassa une dernière fois son père et sa sœur ; puis, d’un pas ferme, escortée du gendarme commis à sa garde et suivie de Félix Barthey, elle se dirigea vers la porte qui mettait en communication le couloir avec cette loge, sorte de pilori, où prennent place, innocents ou coupables, les malheureux qui’comparaissent devant la justice.

M. le conseiller La Marnière venait, en effet, de prononcer les mots sacramentels :

— L’audience est ouverte ; faites entrer les accusés !