Le Carillon bachique

LE CARILLON BACHIQUE.

Air : Et zig, et zig et zog, et fric, et fric et froc.
(Tous les convives doivent trinquer en mesure à chaque refrain.)

Et tic, et tic et tic, et toc, et tic, et tic et toc ;
De ce bachique tintin
Vive le son argentin !
De ce bachique tintin
Vive le son argentin !

De la harpe enchanteresse,
Du clavier qu'une main presse

Le charme entraîne et séduit ;
Mais, chers convives, je nie
Qu'il existe une harmonie
Plus touchante que ce bruit :

Et tic, et tic et tic, etc.

Le premier buveur d'eau claire
Qui tira des sons d'un verre,
Contre Bacchus forniqua ;
Et pour moi, qui ne m'éveille
Qu'aux glouglous de la bouteille ,
Voici mon harmonica :

Et tic, et tic et tic, etc.

C'est à tort que de sa lyre
Orphée exerça l'empire
Pour séduire Lucifer ;
Ce seul bruit, rempli de charmes,
Eût attendri jusqu'aux larmes
Tous les diables de l'enfer.

Et tic, et tic et tic, etc.

D'une sirène à la mode
Qu'on admire la méthode
L'art et le goût infinis :
De deux verres en cadence
L'admirable discordance,
Vaut trente Catalanis :

Et tic, et tic et tic, etc.

Du Très-Haut les saints ministres,
Avec leurs cloches sinistres,
Effarouchent les mortels ;
Mais si l'heure des prières
S'annonçait au bruit des verres,
Quelle affluence aux autels !

Et tic, et tic et tic, etc.

Combien je t'aime, ô fougère!
Lorsque, discrète et légère,
Tu sers de trône aux plaisirs,

Ou quand, fragile et sonore,
Par le jus qui te colore
Tu ranimes nos désirs !

Et tic, et tic et tic, etc.

Au choc redoublé du verre,
Le vieillard au front sévère
Se déride, reverdit,
Et la belle qu'on adore
Paraît plus piquante encore
Quand avec elle on a dit :

Et tic, et tic et tic, etc.

La peste soit du bélitre :
Qui le premier de la vitre
Fonda le maudit abus !
Il nous vole par fenêtre,
Trente verres que peut être
Aujourd'hui nous aurions bus.

Et tic, et tic et tic, etc.

Vingt juifs, que le diable emporte !
Sont consignés à ma porte,
Peut-être à la vôtre aussi ;
Mais, morbleu ! je me résigne,
Et lèverai la consigne
Dès qu'ils sonneront ainsi :

Et tic, et tic et tic, etc.

O vous poissons, volatiles,
Quadrupèdes et reptiles,
Combien vous devez pester!
Quand le hasard vous rassemble,
Vous avez beau boire ensemble,
Vous ne pouvez pas chanter :

Et tic, et tic et tic, etc.

Gloire au soldat intrépide
Qu'à l'honneur le tambour guide !
Mais je n'en suis point jaloux :
Rlantanplan répand l'alarme ;

Tic, tic, toc, a plus de charme :
Or, mes amis, chantons tous :

Et tic, et tic et tic, et toc et tic, et tic et toc ;
De ce bachique tintin
Vive le son argentin !