La besace de haine/L’enlèvement

Éditions Édouard Garand (p. 12-16).

— III —

L’ENLÈVEMENT


Il y avait deux mois que Jean Vaucourt avait fait ses adieux à sa femme et qu’il avait embrassé, avec des larmes aux yeux, son jeune enfant âgé d’à peine dix mois, êtres chers qu’il avait confiés aux soins dévoués du père Croquelin, l’ancien mendiant.

Depuis au delà d’un an Jean Vaucourt habitait avec sa petite famille, rue Saint-Louis, cette maison même qui avait appartenu à Cadet, en cette même maison où Héloïse était demeurée quelques semaines en compagnie de Marguerite de Loisel. Michel Cadet avait vendu cette maison à M. de la Bourlamaque qui, un peu plus tard, l’avait cédée au capitaine des gardes. Nous savons que le Capitaine des gardes possédait des appartements au Château Saint-Louis et qu’il y pouvait domicilier avec sa famille durant le terme de ses fonctions, mais Jean Vaucourt et sa jeune femme avaient préféré un petit nid d’amour tout à eux seuls. Ils n’avaient pu souffrir plus longtemps le contact journalier des huissiers, maîtres d’hôtel, valets de chambre, enfin toute cette domesticité nombreuse et obséquieuse qui composait la maison du gouverneur de la colonie. Ils avaient quitté leurs appartements du Château en emmenant comme unique serviteur le brave père Croquelin.

Durant plus d’une année Jean Vaucourt et sa femme avaient vécu tout à fait heureux, enfouis dans les douceurs de leur amour ardent et profond. En l’automne de 1757 était venu un enfant, un tout petit être de chair rose, un petit ange qui avait été le fruit tant désiré de cet amour, et qu’on avait baptisé sous les prénoms de Jean-Laurent-Adélard, prénoms que portaient respectivement le capitaine, Flambard et M. de Maubertin.

Que de beaux jours et que de soirées exquises on avait vécus dans ce petit salon où Héloïse et Jean Vaucourt avaient été jadis les acteurs d’un drame terrible, alors que Marguerite de Loisel avait frappé d’un poignard le vicomte de Loys qui l’avait voulu outrager en présence du munitionnaire Cadet. Mais la vertu d’Héloïse et l’ange qu’elle avait mis au monde avaient, pour ainsi dire, purifié cette maison en laquelle le crime et l’orgie avaient vécu.

Jamais peintre n’aurait trouvé plus belle et plus poétique composition que le groupe formé, dans ce petit salon, par Jean Vaucourt, sa jeune et belle femme et le petit ange qui babillait ! Et, plus loin, plongé dans un grand fauteuil, les pieds sur les chenets, le père Croquelin, soit de la viole ou du rebec, exécutait de douces mélodies qui s’harmonisaient si bien avec les mélodies amoureuses qui chantaient dans les cœurs du jeune ménage.

Tout l’intérieur de la maison avait été aménagé et décoré à neuf, et il ne gardait plus rien de ressemblant avec cet intérieur qui avait encadré Marguerite de Loisel.

Au-dessus de la cheminée de marbre blanc on pouvait remarquer, l’une à côté de l’autre, la besace de celui qui s’était appelé « le père Achard » et celle du père Croquelin. Elles demeuraient là accrochées à deux clous d’or comme un pieux souvenir. Plus bas et touchant presque au manteau de la cheminée, on découvrait deux poignards aux lames croisées. C’étaient ces deux poignards marqués aux lettres F. L. dont l’un avait été trouvé par Flambard et Jean Vaucourt dans la besace du père Achard près de l’habitation incendiée de Mme de Ferrière. L’autre avait été tiré par Flambard de la poitrine du père Vaucourt qu’il avait trouvé assassiné en son logis. C’est avec ce poignard que notre ami Flambard avait réussi à darder Lardinet sur le sommet du promontoire avant de le précipiter sur les rochers en bas. Avant de partir avec M. de Maubertin pour Pondichéry il avait remis le poignard à Jean Vaucourt.

Longtemps ces deux armes avaient intrigué l’imagination de nos amis. Elles étaient remarquables non seulement par la similitude de fabrication et l’entrelacement des deux lettres F. L., mais aussi, comme l’avait observé Flambard, parce qu’elle ne gardaient aucune trace du sang dans lequel elles avaient trempé : elles sortaient des chairs qu’elles avaient trouvées aussi nettes, aussi claires qu’au moment d’y pénétrer.

À la fin, on s’était accordé à penser que ces deux poignards avaient été la propriété de François Lardinet : les deux lettres F. L. semblaient confirmer cette identité.

Mais ces lettres F. L. ne pouvaient-elles pas être les initiales d’un autre nom que celui de Lardinet ? Mais ces poignards avaient-ils bien été la propriété de l’ancien baron de Loisel ? En se basant sur cette hypothèse, comme Jean Vaucourt le pensa plus tard, on était porté à croire que le père Vaucourt avait été assassiné par le pseudo-baron de Loisel, et non par Bigot que le capitaine des gardes avait d’abord suspecté. Mais Lardinet avait-il réellement assassiné le père Vaucourt ? Non… puisque Lardinet avait trouvé le père Vaucourt mort dans son logis, alors qu’il avait trouvé ce logis occupé par un garde pendu avec une corde au cou à l’une des poutres du plafond. Mais qui donc, alors, avait poignardé le père du capitaine des gardes ? C’est ce que nous apprendra probablement la suite de ce récit.

Quant à Jean Vaucourt, il avait tenu à conserver comme souvenir également ces deux poignards marqués aux lettres F. L.

Tout allait donc pour le mieux, et Jean Vaucourt et sa jeune femme croyaient vivre dans un paradis, lorsque les opérations militaires, qui avaient été interrompues durant l’hiver de 1757, reprirent plus actives au printemps suivant. À la fin de l’hiver la nouvelle s’était répandue dans la Nouvelle-France que l’Angleterre, au cours de la saison prochaine, allait lancer contre elle des armées nombreuses et des flottes formidables. Aussi tous les bras jeunes et forts avaient-ils été requis, et Jean Vaucourt n’avait pas voulu demeurer en arrière.

Puis deux mois s’étaient écoulés sans qu’Héloïse reçût aucune nouvelle de son mari. Elle vivait dans une inquiétude perpétuelle et ne cessait de prier Dieu de protéger le père de son enfant. Il est vrai que son inquiétude était un peu tempérée par la présence du père Croquelin, qui faisait tous les efforts pour rassurer la jeune femme.

Par une nuit du mois de juillet, une nuit paisible et claire, le heurtoir de la porte d’entrée résonna pour la première fois depuis le départ de Jean Vaucourt.

Héloïse s’était retirée depuis longtemps dans sa chambre avec son enfant. Seul dans le salon, le père Croquelin sommeillait dans une profonde bergère : il s’était endormi là en jouant de la viole.

Il n’entendit pas le heurtoir de la porte, bien qu’il eût retenti deux fois. Ce fut la voix de la jeune femme qui le tira de son sommeil. Il s’éveilla en sursaut au moment où le heurtoir retentissait pour la troisième fois.

Il se leva en frottant ses paupières et en titubant, prit le bougeoir qui continuait de brûler sur un guéridon et se dirigea vers le vestibule.

— Qui va là ? demanda-t-il, ne voulant pas ouvrir sans savoir à qui il avait affaire.

— C’est un message pour Madame Vaucourt ! répondit une voix inconnue.

De suite le père Croquelin pensa que c’était une lettre venant du capitaine. Vivement il enleva les barres, tira les verrous et ouvrit la porte.

À la seconde même un souffle éteignait la flamme de son bougeoir, et avant qu’il eût eu le temps de pousser un cri, il était saisi, baillonné et garotté. Il n’avait entrevu que des ombres humaines enveloppées de manteaux noirs à capuchons. Quand il eut été mis hors d’état de nuire, il fut jeté sous un divan. Alors l’un des intrus alluma une lanterne. Il y avait là six hommes dont il était difficile de reconnaître les traits du visage. Pourtant, l’un d’eux, qui venait de relever le bougeoir de l’ancien mendiant et de l’allumer, pouvait, à la lueur de la bougie qui éclairait sa face, être reconnu facilement : et si Jean Vaucourt eût été là, ou si Marguerite de Loisel fût subitement entrée, elle n’aurait pas manqué de reconnaître le vicomte de Loys.

Lui, commanda à deux hommes de demeurer en faction dans le vestibule, et, accompagné de trois autres dont l’un portait la lanterne, il pénétra dans le salon.

Toute cette scène s’était passée sans bruit, ou du moins elle s’était faite avec si peu de bruit qu’Héloïse, de sa chambre, n’avait pu entendre.

Lorsque de Loys et ses hommes entrèrent dans le salon, ils entendirent la voix de la jeune femme qui demandait de sa chambre un peu retirée :

— Eh bien ! qu’est-ce, père Croquelin ?

Le vicomte se pencha vers ses trois compagnons et murmura :

— Vous avez entendu ?… Elle est là dans une chambre. Il faut vous en emparer, elle et son enfant, mais sans trop faire de bruit. Surtout empêchez-la de crier, il ne faut pas que les voisins se doutent le moindrement de ce qui se passe ici. Allez !

Les trois hommes s’éloignèrent vers cette partie de la maison d’où était venue la voix d’Héloïse.

Un peu inquiète de ne pas entendre la voix du père Croquelin lui répondre, et aussi du grand silence qui régnait dans la maison, la jeune femme s’était levée pour s’habiller à la hâte. Elle n’avait pas même pris le temps d’allumer son bougeoir, et elle allait sortir de sa chambre, lorsque sa porte fut ouverte. À la lueur blafarde d’une lanterne elle vit trois hommes entrer. Elle fut si surprise qu’elle ne songea pas à crier ou à jeter un appel au secours. Mais instinctivement elle se plaça devant le berceau de l’enfant endormi. La première crainte qui glaçait son cœur, c’était celle de voir ces inconnus toucher à son petit. La mère voulait défendre le berceau avant de songer à sa propre défense.

Les trois hommes s’étaient arrêtés un moment, comme gênés en présence de cette jeune mère dont ils pouvaient deviner l’émoi.

— Qui êtes-vous et que voulez-vous ? interrogea Héloïse d’une voix tremblante.

Sans répondre, deux des hommes se jetèrent sur elle, et si brusquement qu’elle ne put jeter le moindre cri. Elle fut bâillonnée et vivement enveloppée dans une couverture du lit ; puis l’un des inconnus la prit dans ses bras, tandis qu’un autre s’emparait de l’enfant.

Pendant ce temps, de Loys, avec son bougeoir à la main, examinait curieusement ce salon dans lequel il avait déjà pénétré maintes fois et qu’il ne reconnaissait pas. Il en examinait le mobilier et les décorations. Ayant élevé le bougeoir, son regard s’arrêta, surpris, sur la besace du père Achard.

Il tressaillit d’abord, puis il murmura, narquois :

— Par Notre-Dame ! la Besace d’Amour !… Oui, je la reconnais bien avec ses trous d’épée !

Il se mit à ricaner sourdement, sans détacher une seconde son regard étonné de la besace. Et ce regard était si captivé qu’il ne découvrait pas l’autre besace à côté, celle du père Croquelin. Il ne voyait même pas, au-dessous des deux besaces, les deux poignards avec leurs laines croisées l’une sur l’autre. Il est vrai que la faible clarté de la bougie n’éclairait presque uniquement que La Besace d’Amour.

Il approcha un siège près de la cheminée, monta dessus et de son épée il décrocha la besace.

Il se mit à ricaner encore.

— Allons ! dit-il, je ne suis pas un voleur, mais je pense que j’ai le droit de reprendre ma Besace d’Amour ! La Besace d’Amour !… Suis-je fou ! N’est-elle pas plus justement La Besace de Haine ?… Eh bien ! oui, je la baptise à présent La Besace de Haine !… Car je la hais cette Besace ! car je hais ce Maubertin ! car je hais ce Jean Vaucourt ! car je hais cette Héloïse de Maubertin qui a épousé, sotte fille, ce roturier qu’est Vaucourt !… Oui, je hais cette Héloïse… et pourtant, chose singulière, il me semble… oui, il me semble depuis un moment que je vais l’aimer !… Monsieur l’intendant m’avait dit de la prendre, et alors je l’aurais prise sans trop savoir pourquoi ! Et maintenant… oui, maintenant je vais la prendre, il me semble, pour l’aimer !… Mais alors cette besace serait encore la Besace d’Amour ?… Non, non, cela ne se peut pas ! En dépit de l’amour qui va naître, il y reste de la haine dans ce cœur qui bat en moi, il y en restera toujours ! Je hais, oui je hais quelqu’un, quelque chose… oui, je hais et je ne sais quoi !… Allons ! viens Besace de Haine, acheva-t-il en riant, je te mets à mon dos, je t’emporte, Besace, quoi que tu sois, quoi que tu renfermes ! Je t’emmène même si tu portes la haine dans tes flancs !

Et ricanant, un peu fou — fou de haine peut-être, et peut-être ivre de vengeance ! — de Loys avait jeté la besace sur son dos. Mais il n’avait pas vu l’autre besace, celle du père Croquelin ; il n’avait pas vu non plus les deux poignards plus bas. Comment aurait-il pu les voir ! La Besace d’Amour, ou plutôt La Besace de Haine l’avait fasciné !

À l’instant où il remettait le siège dont il s’était servi pour décrocher la Besace, ses trois complices revenaient avec Héloïse et l’enfant.

L’homme qui la portait la déposa sur un siège comme pour se reposer de l’effort accompli ; la couverture enveloppant la jeune femme s’était dérangée de sorte que son visage se montra au vicomte. Celui-ci, par habitude d’une société dite « policée », échappa ces paroles de courtoisie qui sonnaient étrangement devant cet acte de banditisme :

— Madame, dit-il en s’inclinant, vous me pardonnerez cette violence qu’on s’est permise à votre égard, mais elle a été jugée nécessaire et pour votre bien et pour votre honneur. Soyez assurée qu’il ne vous sera fait aucun mal et que là où vous serez conduite on aura pour vous tous les égards possibles.

Fortement bâillonnée qu’elle était Héloïse ne put répondre à ces paroles de fausse politesse : mais elle décocha au vicomte, qu’elle avait reconnu de suite, un regard si méprisant que le jeune gentilhomme en rougit.

Il se tourna immédiatement vers ses complices et commanda :

— Gagnez la voiture, mes braves, et conduisez madame où vous savez !

La jeune femme fut enveloppée de nouveau dans la couverture, reprise par celui qui en avait charge et emportée hors de la maison et sur la rue, à quelques verges plus loin, où stationnait une berline attelée de deux chevaux que maintenait un cocher également enveloppé d’un manteau à capuchon.

Les trois hommes montèrent dans la voiture avec la femme et l’enfant, de Loys referma la portière et fit un signe au cocher. L’instant d’après la berline roulait en cahotant sur le pavé inégal.

Lorsque la voiture eut disparu dans l’obscurité, le vicomte revint à la maison où étaient demeurés ses deux autres complices, ou, pour parler plus justement, ses deux autres séides.

On entendait, de sous le divan, le père Croquelin gémir.

Le vicomte ordonna à ses hommes de retirer le vieux de là et de lui rendre sa liberté. Mais avant que le père Croquelin eût pu reconnaître le vicomte, celui-ci avait soufflé le bougeoir. Puis il dit sur un ton sévère :

— Vieux, quand nous serons partis, verrouille ta porte tout aussi prudemment qu’elle l’était quand nous sommes venus, et ne sors pas de ces murs. Et, si tu sors, veille bien sur ta langue ; car si j’entendais que cette chose a été ébruitée, je comprendrais que tu as parlé et je te tiendrais responsable de cette indiscrétion. Alors, et je te prie de m’en croire, ta peau ne vaudrait pas même la peau d’un chien. Bonne nuit !

Le vicomte et ses hommes s’en allèrent.

Pendant ce temps la voiture emportant Héloïse et son enfant avait gagné la Porte du Palais et elle avait pris à travers le faubourg Saint-Roch, qu’elle avait dépassé, et elle était allée s’arrêter après une demi-heure de marche devant la grille d’une belle maison d’été, à quelques pas de la Rivière Saint-Charles. Il y avait là cinq ou six belles demeures, entourées de jardins et de parcs, et bâties sur une large et courte avenue débouchant sur les rives de la rivière d’un côté et de l’autre sur le chemin qui conduisait à l’Hôpital Général. L’une d’elles, la plus belle et la plus somptueuse, véritable château de grand seigneur, était située près de la rivière, et elle était la propriété de l’Intendant Bigot qui y venait de temps à autre donner quelque grande fête. Les autres appartenaient à des bourgeois de la ville qui y venaient passer quelques semaines de la belle saison, et parmi ces bourgeois, M. Pierrelieu.

Or la berline portant Héloïse s’était arrêtée devant la demeure de M. Pierrelieu qui, accompagné de sa fille, s’approcha de la portière.

— Ah ! madame, s’écria Mlle Pierrelieu avec une hypocrite pitié, j’éprouve beaucoup de chagrin à vous recevoir en de telles circonstances, et j’espère bien que vous ne nous en tiendrez pas compte. Plus tard, vous comprendrez que c’était nécessaire pour protéger la vie même du capitaine Vaucourt. Soyez la bienvenue !

M. Pierrelieu s’était simplement incliné devant la jeune femme.

Héloïse, qu’on avait rendue libre de ses mouvements quelques minutes avant d’arriver à la maison du négociant, voulut répondre aux paroles de Mlle Pierrelieu ; mais de suite une grande angoisse la saisit à la gorge en entendant le roulement rapide de la berline qui reprenait la route de la cité.

— Mon enfant… mon enfant… qu’en fait-on ?…

Un terrible pressentiment la frappa au cœur. Mlle Pierrelieu allait essayer de la rassurer par quelque mensonge, quand la femme perdit tout à coup l’équilibre… Elle s’évanouit dans les bras de M. Pierrelieu qui s’était porté à son appui.

La berline roulait vers la cité où elle emportait l’enfant d’Héloïse et de Jean Vaucourt. Lorsqu’elle eut traversé de nouveau le faubourg Saint-Roch, elle passa tout droit devant la Porte du Palais, tourna le cap et s’engagea dans les ruelles sombres et malpropres qui s’entremêlaient au pied de la falaise. Puis elle passa au travers de bicoques et de masures pour s’arrêter devant l’un de ces taudis, qui semblait s’aplatir et ramper sous le Fort Saint-Louis qui le dominait.

L’un des hommes ou séides du vicomte de Loys descendit de la berline avec l’enfant toujours endormi et frappa rudement dans la porte basse et étroite.

— Qui est là ? demanda une voix quelque peu éraillée de l’intérieur de la masure.

— C’est l’enfant dont vous avez accepté la charge, répondit l’homme.

— Bien, bien, j’ouvre.

L’instant d’après la porte grinçait et s’ouvrait pour encadrer une ombre humaine, tout à fait indécise dans l’obscurité, qui reçut l’enfant. Puis la porte de la masure fut refermée et la berline, cette fois, regagna la haute-ville.

En quelles mains était tombé l’enfant de Jean Vaucourt et d’Héloïse de Maubertin ?… C’est ce que nous saurons exactement plus tard. Pour le moment, nous ne pouvons que reprendre la suite de notre récit, en revenant à ce soir d’octobre 1758 et en la taverne de la mère Rodioux.