La Révolution française de juillet 1830/02

RÉVOLUTION FRANÇAISE DE JUILLET 1830.


(Suite.)

Nous avons dans la livraison précédente, terminé au 31 juillet la série des documens officiels publiés par le gouvernement ou pouvoir provisoire, depuis le compte rendu qui amena la révolution. Nous allons continuer cette série, du 1er août jusqu’à l’avénement de Louis-Philippe Ier, considérant comme pièces officielles les discours adressés par le chef de l’état aux deux chambres ou à une commission déléguée par elles.

Le 1er août et jours suivans furent publiées les ordonnances ci-dessous :


lieutenance générale du royaume

Art. 1er. La nation française reprend ses couleurs. Il ne sera plus porté d’autre cocarde que la cocarde tricolore.

2. Les commissaires chargés provisoirement des divers départemens du ministère veilleront, chacun en ce qui le concerne, à l’exécution de la présente ordonnance.

Paris, le 1er août 1830.

Louis Philippe d’Orléans.


Le commissaire chargé provisoirement du ministère de la guerre,
Comte Gérard.



lieutenance générale du royaume.

La chambre des pairs et la chambre des députés se réuniront le 3 août prochain dans le local accoutumé.

Paris, le 1er août 1830.

Louis Philippe d’Orléans.


Le commissaire chargé provisoirement du ministère de l’intérieur,
Guizot

Par ordonnance du même jour sont nommés : M. Dupont de l’Eure, commissaire provisoire au département de la justice ; M. le comte Gérard, commissaire provisoire au département de la guerre ; M. Guizot, commissaire provisoire au département de l’intérieur ; M. le baron Louis, commissaire provisoire au département des finances ; M. Girod de l’Ain, préfet provisoire de police.

Lieutenance générale du royaume

Art. 1er. Les condamnations prononcées pour délits politiques de la presse restent sans effet.

2. Les personnes détenues à raison de ces délits seront sur le champ mises en liberté.

Il est fait également remise des amendes et autres frais, sous la seule réserve des droits des tiers.

Les poursuites commencées jusqu’à ce jour cesseront immédiatement.

Paris, ce 2 août 1830.

Louis Philippe d’Orléans.
Le commissaire provisoire au département de la justice,
Dupont de l’Eure.

Le 3 août, les deux chambres s’étant réunies dans la salle de la chambre des députés, le lieutenant-général du royaume y a prononcé le discours suivant :

« Messieurs les pairs et Messieurs les députés,

« Paris troublé dans son repos par une déplorable violation de la Charte et des lois, les défendait avec un courage héroïque.

» Au milieu de cette lutte sanglante, aucune des garanties de l’ordre social ne subsistait plus : les personnes, les propriétés, les droits, tout ce qui est précieux et cher à des hommes et à des citoyens, couraient les plus graves dangers.

» Dans cette absence de tout pouvoir public, le vœu de mes concitoyens s’est tourné vers moi ; ils m’ont jugé digne de concourir avec eux au salut de la patrie ; ils m’ont invité à exercer les fonctions de lieutenant-général du royaume.

» Leur cause m’a paru juste, le péril immense, la nécessité impérieuse, mon devoir sacré. Je suis accouru au milieu de ce vaillant peuple, suivi de ma famille, et portant ces couleurs qui, pour la seconde fois, ont marqué parmi nous le triomphe de la liberté.

» Je suis accouru, fermement résolu à me dévouer à tout ce que les circonstances exigeraient de moi, dans la situation où elles m’ont placé, pour rétablir l’empire des lois, sauver la liberté menacée, et rendre impossible le retour de si grands maux, en assurant à jamais le pouvoir de cette Charte dont le nom invoqué pendant le combat l’était encore après la victoire.

» Dans l’accomplissement de cette noble tâche, c’est aux chambres qu’il appartient de me guider.

» Tous les droits doivent être solidement garantis ; toutes les institutions nécessaires à leur plein et libre exercice doivent recevoir les développemens dont elles ont besoin.

» Attaché de cœur et de conviction aux principes d’un gouvernement libre, j’en accepte d’avance toutes les conséquences. Je crois devoir appeler dès aujourd’hui votre attention sur l’organisation des gardes nationales, l’application du jury aux délits de la presse, la formation des administrations départementales et municipales, et, avant tout, sur cet art. 14 de la Charte, qu’on a si odieusement interprété.

» C’est dans ces sentimens, Messieurs, que je viens ouvrir cette session.

» Le passé m’est douloureux : je déplore des infortunes que j’aurais voulu prévenir ; mais, au milieu de ce magnanime élan de la capitale et de toutes les cités françaises, à l’aspect de l’ordre renaissant avec une merveilleuse promptitude, après une résistance pure de tout excès, un juste orgueil national émeut mon cœur et j’entrevois avec confiance l’avenir de la patrie.

» Oui, Messieurs, elle sera heureuse et libre cette France qui m’est si chère : elle montrera à l’Europe, qu’uniquement occupée de sa prospérité intérieure, elle chérit la paix aussi bien que les libertés, et ne veut que le bonheur et le repos de ses voisins.

» Le respect de tous les droits, le soin de tous les intérêts, la bonne fois dans le gouvernement, sont les meilleurs moyens de désarmer les partis et de ramener dans les esprits cette confiance dans les institutions, cette stabilité, seuls gages assurés du bonheur des peuples et de la force des états.

» MM. les pairs et MM. les députés, aussitôt que les chambres seront constituées, je ferai porter à leur connaissance l’acte d’abdication de S.M. le roi Charles x : par ce même acte, S.A.R. Louis-Antoine de France, dauphin, renonce également à ses droits : cet acte a été remis entre mes mains hier, 2 août, à onze heures du soir. J’en ordonne ce matin le dépôt dans les archives de la chambre des pairs, et je le fais insérer dans la partie officielle du Moniteur.

Voici l’acte d’abdication mentionné dans le discours du lieutenant-général du royaume.


Rambouillet, ce 2 août 1830.

Mon cousin, je suis trop profondément peiné des maux qui affligent ou qui pourraient menacer mes peuples pour n’avoir pas cherché un moyen de les prévenir. J’ai donc pris la résolution d’abdiquer la couronne en faveur de mon petit-fils, le duc de Bordeaux.

Le dauphin, qui partage mes sentimens, renonce aussi à ses droits en faveur de son neveu.

Vous aurez donc, en votre qualité de lieutenant-général du royaume, à faire proclamer l’avénement de Henri v à la couronne. Vous prendrez d’ailleurs toutes les mesures qui vous concernent pour régler les formes du gouvernement pendant la minorité du nouveau roi. Ici je me borne à faire connaître ces dispositions ; c’est un moyen d’éviter encore bien des maux.

Vous communiquerez mes intentions au corps diplomatique, et vous me ferez connaître le plus tôt possible la proclammation par laquelle mon petit-fils sera reconnu roi sous le nom d’Henri v.

Je charge le lieutenant général, vicomte de Foissac-Latour, de vous remettre cette lettre. Il a ordre de s’entendre avec vous pour les arrangemens à prendre en faveur des personnes qui m’ont accompagné, ainsi que pour les arrangemens convenables pour ce qui me concerne et le reste de ma famille.

Nous réglerons ensuite les autres mesures qui seront la conséquence du changement de règne.

Je vous renouvelle, mon cousin, l’assurance des sentimens avec lesquels je suis votre affectionné cousin.

Charles
Louis-Antoine

Dans sa séance du 7, la chambre des représentans ayant arrêté d’une voix presque unanime, sur la proposition de M. Bérard, député de Seine-et-Oise, la déclaration par laquelle elle offrait la couronne au duc d’Orléans, ainsi que les modifications qu’elle croyait nécessaire d’apporter à l’ancienne Charte, se rendit en corps au Palais-Royal pour faire connaître au lieutenant-général sa décision. Après que M. Lafitte, président, eut achevé la lecture de l’acte de constitution, le prince répondit :

« Je reçois avec une profonde émotion la déclaration que vous me présentez ; je la regarde comme l’expression de la volonté nationale, et elle me paraît conforme aux principes politiques que j’ai professés toute ma vie.

» Rempli de souvenirs qui m’avaient toujours fait désirer de n’être jamais destiné à monter sur le trône, exempt d’ambition et habitué à la vie paisible que je menais dans ma famille, je ne puis vous cacher tous les sentimens qui agitent mon cœur dans cette grande conjoncture ; mais il en est un qui les domine tous, c’est l’amour de mon pays : je sens ce qu’il me prescrit, et je le ferai. »


La chambre des députés, dans sa séance du 7, la chambre des pairs, dans celle du 8, procédant aux modifications à apporter à la Charte, ont fait précéder cette révision des préambules suivans, que nous croyons devoir rapporter en entier, et à la suite desquels nous donnons le texte intégral du nouvel acte constitutif.

déclaration de la chambre des députés.

La chambre des députés, prenant en considération l’impérieuse nécessité qui résulte des événemens des 27, 28, 29 juillet dernier et jours suivans, et de la situation générale où la France s’est trouvé placée à la suite de la violation de la Charte constitutionnelle ;

Considérant en outre que, par suite de cette violation et la résistance héroïque des citoyens de Paris, S. M. Charles x, S. A. R. Louis-Antoine dauphin, et tous les membres de la branche aînée de la maison royale, sortent en ce moment du territoire français ;

Déclare que le trône est vacant en fait et en droit, et qu’il est indispensable d’y pourvoir.

La chambre des députés déclare secondement que, selon le vœu et dans l’intérêt du peuple français, le préambule de la Charte constitutionnelle est supprimé comme blessant la dignité nationale, en paraissant octroyer aux Français des droits qui leur appartiennent essentiellement, et que les articles suivans de la même Charte doivent être supprimés ou modifiés de la manière qui va être indiquée.


déclaration de la chambre des pairs.

La chambre des pairs, prenant en considération l’impérieuse nécessité qui résulte des événemens des 27, 28, 29 juillet dernier et jours suivans, et de la situation générale où la France s’est trouvée placée à la suite de la violation de la Charte constitutionnelle ;

Considérant en outre que, par suite de cette violation et de la résistance héroïque des citoyens de Paris, S. M. Charles x, S. A. R. Louis-Antoine, dauphin, et tous les membres de la branche aînée de la maison royale sortent en ce moment du territoire français ;

Déclare que le trône est vacant en fait et en droit, et qu’il est indispensable d’y pourvoir.

La chambre des pairs déclare secondement que, selon le vœu et dans l’intérêt du peuple français, le préambule de la Charte constitutionnelle est supprimé comme blessant la dignité nationale, en paraissant octroyer aux Français des droits qui leur appartiennent essentiellement, et que les articles suivans de la même Charte doivent être supprimés ou modifiés de la manière qui va être indiquée.

charte constitutionnelle de 1830.


Droit public des Français.

Art. 1er. Les Français sont égaux devant la loi, quels que soient d’ailleurs leurs titres et leur rang.

2. Ils contribuent indistinctement, dans la proportion de leur fortune, aux charges de l’état.

3. Ils sont tous également admissibles aux emplois civils et militaires.

4. Leur liberté individuelle est également garantie, personne ne pouvant être poursuivi ni arrêté que dans les cas prévus par la loi, et dans la forme qu’elle prescrit.

5. Chacun professe sa religion avec une égale liberté, et obtient pour son culte la même protection.

6. Les ministres de la religion catholique, apostolique et romaine, professée par la majorité des Français, et ceux des autres cultes chrétiens, reçoivent des traitemens du trésor public.

7. Les Français ont le droit de publier et de faire imprimer leurs opinions, en se conformant aux lois. La censure ne pourra jamais être rétablie.

8. Toutes les propriétés sont inviolables, sans aucune exception de celles qu’on appelle nationales, la loi ne mettant aucune différence entre elles.

9. L’état peu exiger le sacrifice d’une propriété, pour cause d’intérêt public légalement constatée, mais avec une indemnité préalable.

10. Toutes recherches des opinions et votes émis jusqu’à la restauration sont interdites. Le même oubli est commandé aux tribunaux et aux citoyens.

11. La conscription est abolie. Le mode de recrutement de l’armée de terre et de mer est déterminé par une loi.


Formes du gouvernement du roi.

12. La personne du roi est inviolable et sacrée. Ses ministres sont responsable. Au roi seul appartient la puissance exécutive.

13. Le roi est le chef suprême de l’état, commande les forces de terre et de mer, déclare la guerre, fait les traités de paix, d’alliance et de commerce, nomme à tous les emplois d’administration publique, et fait les réglemens et ordonnances nécessaires pour l’exécution des lois, sans pouvoir jamais ni suspendre les lois elles-mêmes, ni dispenser de leur exécution. Toutefois, aucune troupe étrangère ne pourra être admise au service de l’état qu’en vertu d’une loi.

14. La puissance législative s’exerce collectivement par le roi, la chambre des pairs et la chambre des députés.

15. La proposition des lois appartient au roi, à la chambre des pairs et à la chambre des députés ; néanmoins, toute loi d’impôt doit d’abord être votée par la chambre des députés.

16. Toute loi doit être discutée et votée librement par la majorité de chacune des deux chambres.

17. Si une proposition de loi a été rejetée par l’un des trois pouvoirs, elle ne pourra être représentée dans la même session.

18. Le roi seul sanctionne et promulgue les lois.

19. La liste civile est fixée, pour toute la durée du règne, par la première législature assemblée depuis l’avénement du roi.


De la chambre des pairs.

20. La chambre des pairs est une portion essentielle de la puissance législative.

21. Elle est convoquée par le roi, en même temps que la chambre des députés des départemens. La session de l’une commence et finit en même temps que celle de l’autre.

22. Toute assemblée de la chambre des pairs qui serait tenue hors du temps de la session de la chambre des députés est illicite et nulle de plein droit ; sauf le cas où elle est réunie comme cour de justice, et alors elle ne peut exercer que des fonctions judiciaires.

23. La nomination des pairs de France appartient au roi ; leur nombre est illimité ; il peut en varier les dignités, les nommer à vie, ou les rendre héréditaires selon sa volonté.

24. Les pairs ont entrée dans la chambre à vingt-cinq ans, et voix délibérative à trente ans seulement.

25. La chambre des pairs est présidée par le chancelier de France, et, en son absence, par un pair nommé par le roi.

26. Les princes du sang sont pairs par le droit de leur naissance. Ils siégent immédiatement après le président.

27. Les séances de la chambre des pairs sont publiques comme celles de la chambre des députés.

28. La chambre des pairs connaît des crimes de haute trahison et des attentats à la sûreté de l’état, qui seront définis par une loi.

29. Aucun pair ne peut être arrêté que de l’autorité de la chambre, et jugé que par elle en matière criminelle.


De la chambre des députés des départemens.

30. La chambre des députés sera composée des députés élus par les colléges électoraux, dont l’organisation sera déterminée par des lois.

31. Les députés seront élus pour cinq ans.

32. Aucun député ne peut être admis dans la chambre s’il n’est âgé de trente ans, et s’il ne réunit les autres conditions déterminées par la loi.

33. Si néanmoins il ne se trouvait pas dans le département cinquante personnes de l’âge indiqué, payant le cens d’éligibilité déterminé par la loi, leur nombre sera complété par les plus imposés au dessous de ce cens, et ceux-ci pourront être élus concurremment avec les premiers.

34. Nul n’est électeur s’il a moins de vingt-cinq ans, et s’il ne réunit les autres conditions déterminées par la loi.

35. Les présidens des colléges électoraux sont nommés par les électeurs.

36. La moitié au moins des députés sera choisie parmi les éligibles qui ont leur domicile politique dans le département.

37. Le président de la chambre des députés est élu par elle au commencement de chaque session.

38. Les séances de la chambre sont publiques ; mais la demande de cinq membres suffit pour qu’elle se forme en comité secret.

39. La chambre se partage en bureaux pour discuter les projets qui ont été présentés de la part du roi.

40. Aucun impôt ne peut être établi ni perçu, s’il n’a été consenti par les deux chambres et sanctionné par le roi.

41. L’impôt foncier n’est consenti que pour un an. Les impositions indirectes peuvent l’être pour plusieurs années.

42. Le roi convoque, chaque année, les deux chambres : il les proroge, et peut dissoudre celle des députés des départemens : mais, dans ce cas, il doit en convoquer une nouvelle dans le délai de trois mois.

43. Aucune contrainte par corps ne peut être exercée contre un membre de la chambre, durant la session, et dans les six semaines qui l’auront précédée ou suivie.

44. Aucun membre de la chambre ne peut, pendant la durée de la session, être poursuivi ni arrêté en matière criminelle, sauf le cas de flagrant délit, qu’après que la chambre a permis sa poursuite.

45. Toute pétition à l’une ou à l’autre des chambres ne peut être faite et présentée que par écrit. La loi interdit d’en apporter en personne et à la barre.


Des ministres.

46. Les ministres peuvent être membres de la chambre des pairs ou de la chambre des députés. Ils ont en outre leur entrée dans l’une et l’autre chambre, et doivent être entendus quand ils le demandent.

47. La chambre des députés a le droit d’accuser les ministres et de les traduire devant la chambre des pairs, qui, seule, a celui de les juger.


De l’ordre judiciaire.

48. Toute justice émane du roi ; elle s’administre en son nom par des juges qu’il nomme et qu’il institue.

49. Les juges nommés par le roi sont inamovibles.

50. Les cours et tribunaux ordinaires actuellement existans sont maintenus. Il n’y sera rien changé qu’en vertu d’une loi.

51. L’institution actuelle des juges de commerce est conservée.

52. La justice de paix est également conservée. Les juges de paix, quoique nommés par le roi, ne sont point inamovibles.

53. Nul ne pourra être distrait de ses juges naturels.

54. Il ne pourra en conséquence être créé de commissions et tribunaux extraordinaires, à quelque titre et sous quelque dénomination que ce puisse être.

55. Les débats seront publics en matière criminelle, à moins que cette publication ne soit dangereuse pour l’ordre et les mœurs ; et, dans ce cas, le tribunal le déclare par un jugement.

56. L’institution des jurés est conservée. Les changemens qu’une plus longue expérience ferait juger nécessaires ne peuvent être effectués que par une loi.

57. La peine de confiscation des biens est abolie et ne pourra être rétablie.

58. Le roi a le droit de faire grâce, et celui de commuer les peines.

59. Le code civil et les lois actuellement existantes qui ne sont pas contraires à la présente Charte restent en vigueur jusqu’à ce qu’il y soit légalement dérogé.


Droits particuliers garantis par l’état.

60. Les militaires en activité de service, les officiers et soldats en retraite, les veuves, les officiers et soldats pensionnés, conserveront leurs grades, honneurs et pensions.

61. La dette publique est garantie. Toute espèce d’engagement pris par l’état avec ses créanciers est inviolable.

62. La noblesse ancienne reprend ses titres ; la nouvelle conserve les siens. Le roi fait des nobles à volonté ; mais il ne leur accorde que des rangs et des honneurs, sans aucune exemption des charges et des devoirs de la société.

63. La Légion-d’Honneur est maintenue. Le roi déterminera les réglemens ultérieurs et la décoration.

64. Les colonies sont régies par des lois particulières.

65. Le roi et ses successeurs jureront, à leur avénement, en présence des chambres réunies, d’observer fidèlement la présente Charte constitutionnelle.

66. La présente Charte, et tous les droits qu’elle consacre, demeurent confiés au pratriotisme et au courage des gardes nationales et de tous les citoyens français.

67. La France reprend ses couleurs. À l’avenir, il ne sera plus porté d’autre cocarde que la cocarde tricolore.


dispositions particulières

Toutes les nominations et créations nouvelles de pairs faites sous le règne du roi Charles x sont déclarées nulles et non avenues.

L’art. 23 de la Charte sera soumis à un nouvel examen dans la session de 1831.

La chambre des députés déclare troisièmement qu’il est nécessaire de pourvoir successivement par des lois séparées, et dans le plus court délai possible, aux objets qui suivent :

1o L’application du jury aux délits de la presse et aux délits politiques ;

2o La responsabilité des ministres et des autres agens de pouvoir ;

3o La réélection des députés promus à des fonctions publiques salariées ;

4o Le vote annuel du contingent de l’armée ;

5o L’organisation de la garde nationale, avec intervention des gardes nationaux dans le choix de leurs officiers ;

6o Des dispositions qui assurent d’une manière légale l’état des officiers de terre et de mer ;

7o Des institutions départementales et municipales fondées sur un système électif ;

8o L’instruction publique et la liberté de l’enseignement ;

9o L’abolition du double vote et la fixation des conditions électorales et d’éligibilité ;

10o Déclarer que toutes les lois et ordonnances, en ce qu’elles ont de contraire aux dispositions adoptées pour la réforme de la Charte, sont dès à présent et demeurent annulées et abrogées.

Moyennant l’acceptation de ces dispositions et propositions, la chambre des députés déclare enfin que l’intérêt universel et pressant du peuple français appelle au trône S. A. R. Louis-Philippe d’Orléans, duc d’Orléans, lieutenant-général du royaume, et ses descendans à perpétuité, de mâle en mâle, par ordre de primogéniture, et à l’exclusion perpétuelle des femmes et de leur descendance.

En conséquence, S. A. R. Louis-Philippe d’Orléans, duc d’Orléans, lieutenant-général du royaume, sera invité à accepter et à juger les clauses et engagemens ci-dessus énoncés, l’observation de la Charte constitutionnelle et des modifications indiquées, et, après l’avoir fait devant les chambres assemblées, à prendre le titre de roi des Français.

Délibéré au palais de la chambre des députés, le 9 août 1830.

Les président et secrétaires,
Lafitte, vice-président.
Jacqueminot, Pavée de Vendeuvre, Cunin Gridaine, Jars.

Collationné à l’original par nous, président et secrétaires,

Lafitte, Jars, Jacqueminot, Pavée de Vendeuvre, député de l’Aube ; Cunin Gridaine, député des Ardennes.


SERMENT PRONONCÉ, LE 9 AOÛT 1830, PAR S. M. LOUIS-PHILIPPE Ier, ROI DES FRANÇAIS

« En présence de Dieu, je jure d’observer fidèlement la Charte constitutionnelle, avec les changemens et modifications exprimés dans la déclaration de la chambre des députés, de ne gouverner que par les lois et selon les lois, de faire rendre bonne et entière justice à chacun selon son droit, et d’agir en toutes choses dans les seules vues de l’intérêt, du bonheur et de la gloire du peuple français. »