La Justice au village

La Justice au village ([non publié, version manuscrite soumise à la censure])
(p. 1-39).

La justice au village

Comédie vaudeville en un acte
Par Made Eugie Niboyet


Théâtre des jeunes Elèves
de
Monsieur Comte.


N°. 1274

Enregistré le 9 9bre 1837

PERSONNAGES

Galuchon, Bailli.

Calumel, messier.

Butignot, avocat, dentiste, barbier et mercier.

Jacques savoyard

Made Butignot

Catherine servante de Galuchon

Jeanne savoyarde

Paysans Paysannes

Monsieur Le marquis des Martigues


La scène se passe aux Martigues dept des bouches du rhône en l'an 1775


Le théâtre represente le cabinet du Bailli. Table a droite du spectateur, paperasses, plumes encre &a


Scène première

Galuchon, Calumet
Couplet
Galuchon (écrivant)

Attention, Mons Calumet cette affaire parait majeure. Point de lenteur, parlez tout net


Calumet

J’en ai tout au plus pour une heure.


Galuchon

Pour une heure ? mais sans façon vous traitez avec la justice, et pour votre âge mon garçon c’est faire un métier de novice.


Calumet

Vous parlez toujours de mon âge, comme s’il dépendait de moi d’être plus jeune ? c’est mal à vous, Monsieur Galuchon.


Galuchon

Il n’y a point de Galuchon ici quand je suis en fonction, il n’y a qu’un bailli.


Calumet

D’accord, Monsieur le bailli.


Galuchon

Et vous dites que les délinquans sont savoyards ?


Calumet

Oui, Monsieur le bailli.


Galuchon (écrivant ton nazillard.)

Mais êtes-vous bien sur qu’ils soient de la Savoie, c’est-à-dire nés hors de France ?


Calumet

Pour ce qui est de ça, Monsieur le bailli, je ne sais trop que sans répondre.

Galuchon

Diable !… me voilà bien embarrassé. (écrivant) passons à autre chose. (il relit) le 10 mai 1775, dans la commune des Martigues, bouches-du-Rhône, et sur les trois heures de l’après midi, a comparu devant moi, Galuchon, maître d’école et bailli des Martigues, le sieur Jean Ignace Pancréas Crhrisostome Calumet, qui a déclaré, par son procès-verbal en bonnes et dues formes, a déclaré (relevant la tête) qu’avez-vous déclaré ?

Calumet

Ne savoir pas écrire.

Galuchon (écrivant)

Après ?

Calumet

Qu’ayant entendu (pendt que Calumet parle, Galuchon écrit) un lièvre partir et ayant vu un coup de fusil courir.

Galuchon (relevant ses lunettes)

Faites donc attention, fonctionnaire, vous mettez la charrue devant les bœufs… c’est très important, mon jugement serait cassé à la correctionnelle pour défaut de formes.

Calumet

Juste Monsieur Galuchon

Galuchon (élevant la voix)

Appelez moi Bailli, je suis en fonctions.

Calumet

Pardon, excuse, Monsieur Ga… Monsieur le Bailli.

Galuchon

À la bonne heure, j’aime à vous voir respecter la magistrature. Continuez.

Calumet (tandis que le bailli écrit)

Qu’ayant vu un lièvre partir et ayant entendu un coup de fusil il s’était mis, lui Calumet, à courir pour apprehender au corps le délinquant.

Galuchon

Quant.

Calumet

Quand il courait.

Galuchon

Imbécile je répète ce que vous me dictez.

Calumet

C’est différent, m’y voilà. Que n’ayant aperçu dans le bois appartenant à Monseigneur des Martigues, autre chose que deux petits savoyards, il leur avait crié de loin : arrêtez de par le roi, au nom de la loi, que les deux susdits savoyards, fille et garçon, au lieu de s’arrêter s’étaient mis à courir à toutes jambes sans donner au dit Calumet le temps de souffler.

Galuchon (répétant)

Souffler.

Calumet (cherchant)

Que, heureusement le sieur Butignat, epicier, mercier, dentiste et barbier de la commune des Martigues avait prêté main-forte à l’autorité et contribué à l’arrestation des deux petits vagabonds.

Galuchon, répétant

Bonds.

Calumet

Certainement que c’est bon, vu qu’on a trouvé sur eux.

Galuchon

Le lièvre tué ?

Calumet

Bien mieux, monsieur Galuchon, bien mieux.

Galuchon

Calumet, appelez-moi Bailli.

Calumet

Monsieur le Bailli, appelez-moi fonctionnaires.

Galuchon

Poursuivez votre narration.

Calumet (étonné)

Que je poursuive, Monsieur le Bailli ?

Galuchon

Votre récit, stupide homme.

Calumet

Si vous parlez latin comment voulez-vous que je comprenne ? Les Martigues n’en savent pas si long.

Galuchon

Vous me feriez sortir de mon caractère, ignorant. Voyons qu’est-ce que ces enfans portaient de mieux qu’un lièvre ?

Calumet

Un singe et une vieille habillé de rouge

Galuchon

La vieille ?

Calumet

Non, le singe.


Scène II

Les mêmes, Butignot
Butignot (chantant)

Au clair de la lune, mon ami Pierrot.

Galuchon

Maître Butignot, on ne chante pas dans le sanctuaire des lois.

Butignot (gasconnant)

Céci lé sanctuaire des lois ?

Galuchon

Vous raillez je crois.

Butignot

Moi ? non jé m’amuse.

Galuchon

Mauvais plaisant.

Calumet

A ça, Monsieur Butignot, il s’agit…

Butignot (d’un air dégagé)

D’une barbe, d’une saignée, d’un pain dé sucre ? parlez mé voilà, jé suis là. Coup dé peigne, coup dé rasoir ou dé lancette, zai la main faite à tout et jé passe avec la même facilité dé la mercerie à l’épicerie, dé la bouche au menton ; restaurer la barbe ou la machoire tout céla m’est indifférent.

Air :


Jé suis preste

Jé suis leste

Mon état

Mé rend exact.

Soit qu’il gèle

Vente ou grèle

Pour qui mé veut jé suis là

Qu’on m’appelle, mé voilà.

J’ai mis sur mon enseigne

Au nouveau figaro


et commé lui jé saigne
plaide ou cède à propos.
dé ma triste scène.
Chacun est satisfait
jé vends dé l'éloquence
ou jé vends un toupé.
Jé suis preste
jé suis leste
mon état mé rend exact
soit qu'il gèle
vente ou grèle
pour qui mé veut jé suis là

qu'on m'appelle mé voilà


Jé frise, je poudre jé rédige en un clin d'oeil, ça va, ça va : pa, pa, pan, on n'a pas lé temps dé sé rétourner qué j'ai fini.

Galuchon

Il ne s'agit pas de votre talent, nous le connaissons, mais de deux petits savoyards que vous avez vu arrêter.

Butignot

Ces deux pétits innocens accusés de vol ?

Calumet

Précisément.

Butignot

Diable, la chose est sérieuse, vingt quatre livres.

Galuchon

Vous déclarez qu'ils ont volé vingt quatre livres ?

Butignot

C'est-à-dire qu'on les leur a prises, mais il n'est pas certain qu'ils les ayent volées.

Galuchon

Toutes les preuves sont contre eux, ils seront condamnés.

Butignot

Pauvres petits vénérés, jé les plains.

Calumet

Moi aussi, vu qu'ils sont au secret.

Butignot

Au sécret, mais ou ?

Galuchon

Dans ma cave

Butignot

C'est là votre pénitencier ? Gare aux bouchons.

Calumet

Il n'y a que des tonneaux vides.

Butignot, (en s'en allant)

Adiu, moussu Galusson, jé m'oublie ici vous permettez ?

Galuchon

Impossible, j'attends votre déposition.

Butignot

Ma déposition ? Jé n'ai rien dé plus a dire, d'ailleurs les fers sont au feu chez Moussu lé marquis et jé cours lé friser (il va pour sortir).

Galuchon

Calumet arrêter cet homme.

Butignot

Né vous y risquez pas, mon cher, jé brise tout ce que jé touche.

Galuchon

Arretez-le toujours.

Calumet

Ma foi non, je ne suis pas de la marée-chaussée.

Butignot, (à Galuchon)

Mé faire arêter, moi votre ami, papa ? Vous né l'oseriez pas. (il lui frappe sur le ventre)

Galuchon, (en colère)

Cet homme est d'une familiarité.

Butignot, (en sortant)

Adiu séri, adiu. (Il sort en chantant)



Scène IIIe

Calumet, Galuchon, Babet
Galuchon, (en colère)

Décidément cet homme est à mettre aux petites maisons. Impossible d'obtenir de lui une parole raisonnable.

Babet, (de la porte)

Monsieur je peux t'y entrer ?

Calumet, (allant à elle)

Toujours Mamzell' Babet, n'est ce pas Monsieur le bailli ?

Galuchon, (à Babet)

Que venez-vous faire ici.

Babet

Demander la grace de ces deux pauvres petiots que vous avez fait enfermer.

Galuchon, (gravement)

Babet, ces choses là ne sont pas de votre compettence, mêlez vous de faire la cuisine et n'empiétez poins sur les droits d'un magistrat.

Babet

Je ne sais pas ce que c'est qu'un magistrat, mais je me plains du juge.

Galuchon, (à part)

Que c'est ignorant une fille quand ça ne sait rien.

Babet

Tout ce que vous voudrez, il ne faut pas beaucoup de service pour voir une injustice.

Calumet, (avec inquiétude)

Mamzell Babet, Mamzell' Babet...

Babet

N'allez-vous pas avoir peur ? Poltron, et ne faut-il pas que je prenne des mitaines pour dire la vérité.

Galuchon, (à part)

Cette fille est d'une insolence !

Calumet, (bas à Babet)

Ne l'exasperez pas.

Babet

Parlez tout haut, je n'aimons pas les poltrons, les hypocrites, avec moi un loup est un loup.

Galuchon

Babet, vous avez le verbe trop haut.

Babet

Je connais pas ça non plus le verbe.

Calumet

Moi je l'ai appris quand j'étais jeune et l'ai oublié !

Babet

Dame, il y a longtemps que vous étiez jeune.

Galuchon, (à Babet)

Est-il vrai que malgré mes ordonnances vous ayez fait sortir les petits savoyards de leur trou.

Calumet

De leur cave.

Galuchon, (à Calumet)

Paix (à Babet) Songez que je vous rends responsable de tout ce que ...

Babet

Tant pire, je ne ferai pas mon service ; je me suis louée pour cuisinière et non pour guichetière.

Galuchon

Impertinente ; je vous chasse.

Calumet

Mamzell' Babet, Mamzell' Babet.

Babet

Vous m'ennuyez, il faut que je parle. (à Galuchon) N'avez-vous pas honte, Monsieur, de faire un pareil métier, de vous en prendre à des innocens ?

Calumet, (à Babet)

Pour ça, vous avez tort, Mamzell' Babet, vu qu'ils sont coupables.

Babet

Vous ne savez ce que vous dites et je veux bien perdre mon nom si je vous épouse.

Calumet

Vous le perdrez, c'est sur pour devenir ma femme.

Galuchon, (à part)
La patience m'échappe. (à Calumet) J'ai besoin de vaquer à mes affaires, songez à me remplacer ici, j'ai assez entendu de sottises comme cela. (il sort)

Scène IVe

Calumet, Babet
Calumet

Est-il dur aujourd'hui ce père Butignot.

Babet

Faudra bien qu'il se radoucisse, sans ça je ne me mèle plus de son école. Et adieu les écoliers.

Calumet

Je le voudrais, nous nous marierions.

Babet

Pas si vite, vous êtes trop laid.

Calumet

Je vous aime tant !

Babet

Je ne vous aime pas, vous avez arrêté les moutards de la savoie.

Calumet

Je suis faché de l'avoir fait Mamzell'.

Babet

C'est bien temps à présent et que diriez-vous s'ils étaient condamnés ?

Calumet

Que c'est ma faute, ma très grande faute.

Babet

Dieu ! que vous êtes bête, mon ami.

Calumet

Eh bien ! dites-moi ça je l'aime mieux. Quand vous me parlez sans façon je suis plus à mon aise, il me semble que je touche vot' coeur et alors je suis heureux. Si vous saviez combien je vous aime !

Babet

Encore !

Calumet

Dame, toujours.

Air


Pour prix de cette vive flamme


qu'en secret je ressens pour vous.

Oh ! laissez-moi toucher votre âme.

Pour être heureux soyons époux.

Depuis trois ans, femme trop insensible,

Pour vos attraits je brûl' nuit et jour

Et si vot'coeur n'était incombustible

Il aurait pris au feu de mon amour

Babet

Quand vous m'aurez prouver vot' tendresse par vot soumission, nous verrons.

Calumet

Oh ! Cuisinière estimable, ordonnez, commandez, l'amant et le fonctionnaire public sont à vot' service.

Babet

Tenez-vous toujours dans ces sentimens là.

Calumet

Comptez sur moi.

Babet

Eh bien ! Pour le moment... allez-vous-en.

Calumet


Rompre déjà cet entretien

Vraiment c'est une tyrannie

Et ma foi, je ne comprends rien

À votre capricieuse envie,

Si vous me renvoyez toujours

Comment faire pour nous entendre

Babet


Je ferme la porte aux amours

Pour n'avoir pas à m'en défendre

Calumet

Cruelle !

Babet

Vous répétez toujours la même chose !

Calumet

Je vous aime, c'est bien naturel

Babet

Partez donc, vous parlerez de tendresse un aut' jour.

Calumet

J'obéis, méchante. (Il sort)



Scène Ve

Babet, (seule)

Pauvre homme ! Je le traite mal tout de même.

Couplet


IL m'aime à m'en désespérer

Mais j'le trouvons un peu trop bête

Et si j'l'laissais espérer

Il perdrait surement la tête.

On m'a dit souvent que l'amour

Embellit tout dans la nature

Calumet aura donc son tour

Et j'attends ici chaque jour

Qu'amour le change de figure


Mais il ne s'agit pas de ça et puis qu'ils sont tous partis faisons venir nos petit favoris (elle frappe trois coups dans la main) voila le signal convenu, ils ne se feront pas attendre.


Scène VIe

Babet, Jacques, Jeanne
Jacques, (de la porte)

C'est t-il pour nous mamzell' Babet ?

Babet

Oui, oui, venez. (ils entrent)

Jacques

Oh ! qu'ont êtes bonne, vous Mamzell' et que je vous aimons !

Babet

Voulez-vous que je laisse souffrir des innocens.

Jeanne

Ils ne disent pas ça eux, ces Monsieurs de la justice qui nous ont tout pris.

Jacques

Not' pauvre argent.

Jeanne

Et carabi, not' bon carabi

Babet

Oui, vot' singe.

Jacques

Si docile et qui grimpait que àa faisait plaisir à voir, le v'là mort a c'tt heure, ben mort, mon Dieu.

Jeanne

T'afflige pas, frère.

Jacques

Oui t'as raison, faut être fort quand on est innocent, mais quand je pense à not' père, au pays, à tout ce que j'avions, c'est pus fort que moi, vois-tu faut que je pleure (il pleure)

Babet
Pauvres petiots, que Dieu me donne les moyens de vous sauver comme il m'en donne l'envie, mais puisque nous voilà seuls contez-moi donc vot' histoire
Jeanne

All' est ben triste allez Mamzell'.

Babet

D'abord comment vous trouvez-vous avoir vingt-quatre livres ?

Jeanne, (vivement)

C'est nos épargnes

Jacques

Pour sur et je vas vous conter ça, moi qui suis l'ainé

Babet

J'écoute.

Jacques

Nous aut', Savoyards, je somm' pas riches, voyez-vous, mais j'avons pas d'ambition, j'connaissons tous petiots l'économie.

Babet

C'est vrai.

Jacques

J'avions au pays tous les deux, le père et la mère roulaient par le monde et revenaient avec le printemps. La dernière fois, oh ! que ça fut long ! La grand était restée avec nous, tous les amis reveniont, le père et la mère ne reveinont pas. (il s'arrête)

Babet

V'là que je me sens attendrit.

Jeanne

T'a peu de courage frère (elle pleure)

Jacques

C'est pus fort que moi. (continuant) Il se passa bien des nuits, ben des jours et personne... dès le matin j'allions sur la montagne regarder s'ils veniont. Le soir j'appelions de toutes nos forces, je pleuriais, j'prions, rien ne venait... (il s'arrête encore)

Jeanne

J'vas continuer : un jour, c'était sur les midi, comme j'étions à regarder j'(?) venir de loin un homme qui ressemblait au père ; le coeur nous battit ben fort, j'priâmes d'avantage... bientôt cet homme fut près de nous, j'courûmes, c'était lui, c'était ben lui, mais seul, malade, en deuil :

Couplet


Vous comprenez notre douleur ainsi

et les regrets de nos coeurs attendris

il revenait seul et sans notre mère

Babet


Oui je comprends vos maux, pauvres petits

Jeanne


Ah ! quand Dieu prend qui nous donna la vie

On sent dans l'âme un chagrin éternel

Sa mère hélas ! jamais on ne l'oublie,

Perdue ici on la demande au ciel

Babet

Pauvres enfans ! Une maladie avait enlevé vot' mère ?

Jacques

Un accident, Mamzelle, un horrible accident, vous savez, dans la savoie les avalanche...

Banet

Est-il possible ?

Jeanne

La mère y périt et le père en revint estropié ; des voyageurs le trouvèrent mourant, on le fit emporter à la maison la plus proche et v'là not' histoire.

Babet

Comment vot' père ne vous fit-il pas donner de ses nouvelles ?

Jacques

La crainte de nous affliger et puis, quand on ne sait pas écrire...

Jeanne

Il revint drès qu'il fut guéri, mais sa jambe...

Jacques

All' le fait bien souffrir.

Babet

Je le crois.

Jeanne

A' se fait vieux, a' ne peut pus rouler, c'est à not' tour.

Babet

Vous petits coeurs'.

Jacques

Il y a trois mois que j'avons quitté le pays avec les aut' et j'avons ben économisé.

Jeanne

Quand on travaille pour son père ça donne courage...

Babet

Et ces vingt quatre francs ?

Jacques
Il a fallu chanter ben des chansons, jouer ben des airs de vielle, ramoner ben des cheminees pour les mettre de côté.
Jeanne

Sans compter que je nous privions de tout.

Jacques

Et se les voir prendre !

Babet

C'est ben dur en effet.

Jacques

Encore l'argent, ça n'est rien, on recommence à not' âge, mais passer pour voleurs c'est ce qui me chagrine.

Babet

Vot' innocence finira par être reconnue ; [mot barré]

Jeanne

En attendant j'somm's arrêtés et, sans vous mamzell', j'serions encore dans cette cave ben noire ben humide.

Jacques

Ousqu' not' pauvre Carabin a mouru.

Babet

Vous en aurez un aut' j'ai une idée, monsieur le marquis est juste il saura... (écoutant) J'entends monter, vite rentrez il ne faut pas qu'on vous trouve ici.


Scène VIIe

Babet et les deux savoyard sortent par la gauche. Galuchon et Made Butignot entre par le fond.)
Galuchon, (ayant l'air de continuer une conversation)

Impossible de lui faire rien déclarer.

Made Butignot

Ça été toujours ainsi, une tête, une tête... que voulez-vous les artistes, les hommes de génie, il faut leur passer quelque chose.

Galuchon

Viendra-t-il à l'audience


Made Butignot

Pour ça vous pouvez y compter

Galuchon

Qu'il ne se mêle pas d'y prendre la parole

Made Butignot

Dame, Monsieur Galuchon, les libertés sont libres, mon mari est bien le maître de défendre un innocent qu'il ne croit pas coupable.

Galuchon

Qu'il fasse des barbes

Made Butignot

C'est une belle profession que celle d'avocat et qui s'allie fort bien avec les arts, il y a eu de grands orateurs qui ont fait, comme mon mari, des barbes et des plaidoiries. Parce qu'on n'est pas noble ce n'est pas une raison, chacun se sent ; Il vaut mieux faire envie que pitié. On se lance, l'un par ci, l'autre par là, le monde est si grand ! Qui cherche trouve et comme dit cet autre, l'ancien : il n'y a pas de petit rat qui fasse son trou. C'est consolant, on dort sur l'espérance, on rève chat, arraignée, lièvre, on a une idée, on saisit l'occasion, qui sait le bonheur ; aujourd'hui, demain. Un pied glisse, un autre le remplace, c'est comme ça ... faut pas s'en étonner... moi qui vous parle je l'ai vu vous ne croyez pas ? Tant pis, mon cher, c'est la vérité, Monsieur Butignot me l'a toujours dit.

Galuchon

Quel diable de galimathias me débitez-vous là ? Si j'y comprend' un mot je veux être pendu.

Made Butignot

Vous ne comprenez pas ? C'est facile cependant.

Couplet


Dans ce siècle tout positif

On arrive par de l'audace

Le plus adroit, le plus actif,

Toujours sait y prendre sa place

Ce savoir faire vient à bout,

De nous tenir lieu de génie

Et c'est le seul passe partout

Qui fasse bien passer la vie.

Galuchon

Je ne comprends pas le calembourg.

Made Butignot

Il n'y a pas de calembourg la dedans et vous être une cuistre si vous ne comprenez pas

Galuchon

Insulter un magistrat (s'assayant) verbalisons.

Made Butignot

Je me moque bien de vos grimoires, est-ce que je n'ai pas un mari pour me défendre ?

Galuchon

J'écris toujours (il écrit) Dame Louise, Bénédicte Butignot ayant insulté, humilié vilipandé le magis...

Made Butignot, (lui enlevant sa perruque)

-ter de la commune.

Galuchon, (écrivant)

Sévices, injures graves ? Hola, hé ! Calumet, Babet, la garde, la marée-chaussée.

Made Butignot, (lui prenant les mains)

Que la colère vous va bien ! Foi de Bénédicte vous êtes gentil comme ça.

Galuchon

Voulez-vous me lacher.

Made Butignot, (riant)

L'aimable bailli ah ! ah ! ah !

Galuchon

Redoutez ma colère.

Made Butignot, (riant)

Je ne vous crains pas, maitre d'école. (elle sort)

Galuchon, (lui courant après)

Satanée femelle tu me payeras tout cela. (il lui court après)


Scène VIIIe

Paysans, paysannes
1er Paysan

À qui donc qu'il en a notre magister.

2e [paysan]

Dieu me pardonne je crois que c'est à la Butignot.

1er Paysan

Elle lui aura joué un tour de sa façon.

2e [paysan]

Bien fait, pourquoi qu'il est si chose cet original ?

1er Paysan

Un homme d'esprit c'est exigeant, voyez-vous.

2e [paysan]

Lui de l'esprit ? Par exemple

Une paysan

Dire qu'il s'est creusé la tête pendant 15 jours pour faire une épitaphe à ce pauvre Jean le marguillier.

2e paysanne

Que même tous les notables du pays y ont travaillé.

1er paysanne

C'est donc pour ça qu'elle est si bête ?

2e paysan

Ci-git Jean.

(on rit) ah ! ah !

1er paysan

Quinze têtes qui travaillent 15 jours pour ce chef d’œuvre.

2e paysan

Oui, c'est fameux.

1ere paysanne

Pauvres martiguais, faut dire qu'ils ne sont pas de ces pas malins.

2e paysanne

Jean le marguillier, c'est celui qui grimpa à la corde du clocher pour la couper ?

1er paysan

Et qui se cassa la jambe en tombant avec.

2e paysan

Qui voulut couver les œufs d'une poule et fit l'omelette à son pantalon ?

1ere paysanne

Qui pour être plutôt dans les bras de Monsieur le curé s'élança du haut du clocher.

1er paysan

Et se cassa le cou, le grand niais qu'il était.

(on rit) ah ! ah ! ah !

2e paysan

Mais dites donc, vous autres, le bailli se fait bien attendre aujourd'hui, est-ce que l'audience ne va pas bientôt commencer ?

1ere paysanne

Ça m'étonne, il aime tant à juger.

2e paysanne

Il dit que les procès instruisent

1er paysan

Vieux satan qu'il est, on devrait bien l'abdiquer.

2e paysan

C'est mon avis.

1ere paysanne

Et le mien.

Tous

Et le mien, et le mien.


Scène IXe

Les mêmes Galuchon, Calumet, puis Madame Butignot et les Savoyards
Calumet, (en entrant, voix de fausset)

Silence.

Galuchon, (après s'être assis)

Garde, introduisez les prisonniers (Calumet sort, Galuchon aux paysans) Tous les témoins se sont rendus ici ?

Plusieurs voix

Oui, oui.

Galuchon

C'est très bien (aux Savoyards qui entrent) Approchez (Les paysans parlent entre eux)

Calumet

Silence !

Galuchon, (à Jacques)

Comment vous appelez-vous ?

Jacques

Jacques Martin, Monsieur, pour vous servir.

Galuchon

Votre pays ?

Jacques

La Savoie.

Galuchon

Votre âge

Jacques

Quatorze ans

Galuchon

Votre profession ?

Jacques

Ramoneur.

Galuchon, (à Jeanne)

Et vous, votre nom

Jeanne

Jeanne Martin, Monsieur ; pour vous servir

Galuchon

Votre pays ?

Jeanne

La Savoie.

Galuchon

Votre âge ?

Jeanne

Douze ans

Galuchon

Votre profession ?

Jeanne

Joueuse de violle.

Galuchon, (avec importance)

Jacques et Jeanne Martin, vous êtes accusés d'avoir tué un lièvre et volé 24 libres dans le bois de Monseigneur des Martigues, qu'avez-vous à répondre ?

Jacques

J'avons rien tué du tout, Monsieur le juge et pour ce qui est de voler j'en sommes incapable.

Galuchon

Les preuves sont contre vous et nous allons entendre les témoins (ici Made Butignot se présente) cette femme ici...

Made Butignot

Apparamment. Puisque je suis témoin il faut bien que je m'y trouve.

Galuchon

Le tribunal récuse votre témoignage.

Made Butignot

On récuse tout le monde quand on veut condamner.

Galuchon

Retirez-vous.

Made Butignot

Allez vot' train, Dieu est juste, la punition vous arrivera un jour.

Calumet

Silence !

Galuchon

Calumet approchez ; n'avez-vous pas arrêté ces deux enfans dans le bois.

Calumet

Oui, Monsieur le bailli.


Scène Xe

Les mêmes, Babet (elle s'arrête devant Calumet)
Calumet, (interdit)

C'est-à-dire, c'est moi et ce n'est pas moi.

Made Butignot

Voilà qui est bien clair.

Calumet

Silence.

Galuchon

N'avez-vous pas trouvé 24 francs sur ces enfans ?

Calumet

Parfaitement.

Galuchon

Un lièvre mort ?

Calumet

Je crois que je ne me le rappelle pas. (on rit)

Galuchon

N'ont-ils pas fui quand vous leur avez crié de s'arrêter ?

Calumet

Ils ont (regardant Babet) je crois crois qu'ils ont fui.

Made Butignot, (de sa place)

C'est faux.

Calumet

Silence.

Made Butignot

Je parlerai.

Babet

Et moi aussi.


Scène XIe

Les mêmes, Butignot
Butignot, (s'avançant)

Jé parlérai plus haut qué vous tous et jé mé constitue lé défensur d'office dé ces deux enfans.

Messius !

Vous avez devant vous deux enfans, un garçon et une fille, une fille et un garçon accusés d'avoir, sans poudre ni fusil, tué un lièvre dans lé bois de Monseigneur des Martigues : Dominus Martigus. Quare, pourquoi c'est cé qué jé né pourrais dire, moi qui ai eu lé malhur dé contribuer à lur infortune mais jé lé demande, Messiurs, est-il présumable qué ces deux enfans ayant, simultanément et du même coup, tué un lièvre et escroqué dé l'argent. À qui ? c'est cé qu'on né dit point. Dérober, escroquer à cet âge, avec dé pareilles figures, c'est impossible, céla né sé put.

Galuchon

C'est un fait prouvé.

Butignot

Négo je nie. Vous êtes un esprit d'accusation, un homme qui se plait à accuser. Accusatorius. animus. A mon avis, sententia mea, on doit être lent à condamner.

Calumet

Pourtant le procès-verbal.

Babet, (à Calumet)

Vous ne savez pas écrire.

Calumet

Je l'avais oublié (on rit)

Made Butignot

Il oublie ce qu'il veut.

Calumet

Silence.

Butignot

Il né sait pas écrire il né sait pas signer et il accuse. Voilà l'homme. Ecce hommo, et on l'écoute. Bravo tout va comme nous le désirons. Nostro it dies. Accuser, c'est nous donner le droit de défenser. Plus la cause presente dé difficultés plus elle a d'attraits. Nous ne plaignons point notre peine, nous y mettrons le temps.

On s'est étonné qué ces enfans eussent 24 livres en lur possession, mais messiurs, un travail assidu vient à bout de tout. Labor omnia vincit. Et l'on connait l'économie des savoyards.

Galuchon

Vous récusez toutes les preuves, maître Butignot mais qui osera lutte ouvertement contre moi ?

Butignot

Ego, moi. Et, si tu veux être ou valoir quelque chose, si vis esse aliquis, juge, né parle pas autrement qu'il ne faut. Contrà atque.

Galuchon

Butignot, si vous continuez à me tutoyer je vous interdis la parole.

Made Butignot, (de sa place)

Laissez-le parler.

Babet

Oui, oui, mais qu'il parle français.

Butignot

Vous l'entendez ? Vox populi vox dei...

Galuchon

Si vous recommencez je suspends la séance.

Butignot

Àh ! Vous né voulez pas du latin, classe ignorante, jé vais parler français : deux enfans sont accusés jé demande qu'on les interroge.

Jacques

Ils ont fait mourir not' singe, les méchans.

Babet

Oui, leur singe est mort de douleurs.

Butignot
Dé doulur ?
Babet

Rhumatismales.

Butignot

À la bonne heure, vous m'aviez effrayé.

Galuchon

Jacques, répondez.

Jacques

Je ne demande pas mieux, monsieur le juge, mais faute être juste, voyez-vous.

Plusieurs voix

Oui, oui.

Calumet

Silence.

Galuchon, (se levant)

Si le public prend encore la parole, le tribunal se retire.

Calumet

Oui, le tribunal se retire.

Galuchon

Y a t-il des témoins à charge (à Calumet) dites ce que vous savez.

Calumet

J'entendis un coup de fusil, je vis courir ces enfans devant le lièvre et je me dis : bon voilà les coupables.

Butignot

Mais s'ils couraient devant le lièvre, ils ne l'avaient donc pas tué ?

Calumet

Ils auraient pu l'avoir tué.

Galuchon

Continuez.

Calumet

Je criai à ces enfans de s'arrêter, je ne vis plus l'animal, ils étaient seuls dans le bois et je me dis : ça ne peut être qu'eux, c'est sûr, ils ont fait le coup. Dire comment ils l'ont pu, je ne le sais, mais c'est égal.

Butignot

Leur avez-vous trouvé une arme, de la poudre ?

Calumet

Non, j'ai seulement entendu le coup.

Butignot

Belle preuve, en vérité.

Calumet

Certainement que c'en est une.

Babet, (faisant signe à Calumet)

Calumet... !

Calumet, (se reprenant)

C'est-à-dire que peut-être, ils n'avaient point d'arme, peut-être qu'ils sont innocens et même je les crois innocens (à Babet) êtes-vous contente Mamzell' Babet ?

Babet

Il vaut mieux tard que jamais, je vous pardonne

Galuchon

Je vous destitue. (à Babet) et vous je vous chasse.

Calumet, (suppliant)

Monsieur le bailli.

Galuchon

Ignorant !

Babet

Je demande la parole.

Butignot

Et moi aussi.

Galuchon, (à Calumet)

Faites faire silence.

Calumet

Silence !

Babet, (vis-à-vis du juge)

Je déclare que ces enfans ont d'excellens papiers. Je déclare que si on les condamne ce sera une indignité.

Made Butignot, (de sa place)

Je dépose dans les mêmes termes.

Butignot

S'ils sont condamnés je proteste et j'en rappelle

Tous

Nous protestons.

Galuchon, (aux savoyards)

Accusés qu'avez-vous à dire pour votre défense ?

Jeanne

Hélas ! Monsieur, je sommes innocens, aussi vrai que le jour nous éclaire et si vous nous retenez ici, si not' père sait que j'sommes en prison il en mourra, voyez vous et il n'y aura pus de bonheur sur la terre pour les pauvres petits savoyards. Oh ! laissez-nous retourner au pays. Gardez not' or, mais rendez-nous la liberté.

Jacques

Monsieur le juge, n'écoutez pas ce qu'ell' dit (à Jeanne) Garder not' or ? est-ce que je voudrais de leu grace ? non, non faut qu'ils nous jugent, vois-tu. Marqué, leu grace, quand il nous faut justice tu parles de ça comme un enfant, Jeanne, mais moi je comprends qu'il faut garder pur le nom de not père et j'veux êtr' jugé.

Jeanne

Et que te restera-t-il, s'ils te condamnent ?

Air de la petite mendiante


Il me restera ma conscience

C'est un trésor qui vaut pour moi

Mieux que le luxe et l'opulence

Que donne le titre de roi.

Si j'suis condamné sur la terre

Dieu m'absoudra t-il pas au ciel

Ici la peine est passagère

La haut le bonheur est éternel

Jeanne, (à part)

Il a raison.

Butignot

Je demande la parole.

Galuchon

La cause est suffisamment entendue, le tribunal va délibérer. (il se lève et appelle Calumet) Calumet.

Calumet, (allant à lui)

Voilà (ils ont l'air de délibérer, les paysans murmurent. Calumet crie de temps en temps :) Silence.

Galuchon, (reprenant sa place)

Oui ! ... les plaintes de messier Calument.

Calumet

Je n'ai rien dit.

Galuchon

Oui... Les dépositions des témoins à décharge. Oui... les deux accusés Jacques et Jeanne Martin. Oui, la plaidoirie de l'avocat des parties, le tribunal, après avoir statué sur le droit et le fait :

Considérant qu'il y a eu un coup de fusil tiré dans le bois de Monseigneur des Martigues ;

Considérant que les deux savoyards, Jacques et Jeanne Martin ont été trouvés seuls dans le dit bois, qu'en outre ils avaient sur eux une pièce d'or.

Par ces motifs, le tribunal les condamne, à la majorité des voix, à deux mois de prison et aux dépens. La séance est levée.

(Les paysans murmurent)



Scène XIIe et dernière

Les mêmes, le marquis
Le marquis, (il a entendu les dernières paroles de Galuchon)

Tous les témoins n'ont pas été entendus et j'espère que le bailli ne me récusera pas.

Galuchon, (à part)

Monseigneur, je suis perdu !

Le marquis

Vous avez cru, Monsieur, que l'intrigue pouvait suppléer au droit et, parce que vous avez supposé un délit, pour vous donner de l'importance, il vous a fallu des coupables. Graces au ciel je suis arrivé à temps pour tout arrêter et justice sera rendue.

Galuchon

Un coup de fusil a été tiré ?

Le marquis

Par moi.

Galuchon

Monsieur le marquis, si j'avais su...

Le marquis

Je vous crois sans peine (aux paysans) écoutez-tous mon arrêt : en ma qualité de seigneur des Martigues je destitue maître Galuchon de ses doubles fonctions de bailli et de magister et je donne cette place à Butignot. Quant à vous, Calumet, il vous est enjoint d'apprendre à écrire avant de dire que vous verbalisez.

Calumet, (saluant)

Oui, Monseigneur

Galuchon, (à part)
Je suis joué. (il menace Babet)
Babet

Oh ! je ne vous crains pas, je trouverai ben un aut' maître.

Le marquis

Je vous prends à mon service.

Babet

Merci, Monsieur le marquis.

Calumet, (bas à Babet)

Vous m'épouserez ?

Babet

Nous verrons.

Galuchon, (en sortant)

Adieu, Martiguais, je pars... (il sort furieux, les paysans chantent bon voyage Mr Dumolet)

Le marquis, (aux savoyards)

Quant à vous, mes amis, voici de quoi remplacer Carabi. (il leur donne sa bourse)

Jacques et Jeanne

Que Dieu vous bénisse, mon bon seigneur.

Le Marquis

Regagnez vos foyers et ne quittez plus votre père, à votre âge il est trop difficile de marcher seul dans la vie.

Jacques

A présent que j' sommes riches j' ferons ce que vous me conseillez. Ce cher père, sera t-il heureux ! (à sa soeur) Vois Jeanne, vois, une fortune.

Jeanne, (tristement)
Ça me rend triste moi.
Le marquis

Pourquoi, mon enfant

Galuchon

Puisqu'on nous a arrêté pour vingt quatre francs j' courons ben pus de danger avec ce trésor.

Jacques

C'est vrai, t'as raison. (au marquis) tenez, Monsieur, j'aimons mieux êtr' pauvres, mais qu'on nous croie honnêtes.

Le marquis, (à part)

Aimables enfans ! (haut) ne craignez rien, je trouverai le moyen de vous mettre à l'abri du soupçon (aux paysans) allons, mes amis, que cette journée soit consacrée au plaisir, venez danser au château, votre joie me prouvera que j'ai bien fait de rendre justice.

Jeanne

Et nous pourrons partir, mon bon Seigneur ?

Le marquis

Oui, quand vous serez calmes et reposés.

Jacques

J' me sentons pus de fatigue !

Butignot

Petite Jeanne votre vielle nous fera danser.

Babet
C'est ça.
Jacques

Et moi j' chanterai les chansons du pays.

Babet

Allons danser.

Calumet, (à Babet)

Je vous retiens pour la première contredanse.

Babet

Allons, je veux bien, touchez là.

Calumet

Quel bonheur !

Le marquis

J'espère que tout le monde est content.

Tous

Oui, oui, vive Monsieur le marquis.

Babet

Le plus juste des marquis.

Made Butignot

Le plus magnanime des marquis.

Butignot

Le plus noble des marquis.

Calumet

Le plus aimé des marquis.

Butignot

Air : de l'angélus


Messieurs, comme notre seigneur

Ayvez ce soir de l'indulgence

Et ne condamnez pas l'auteur

Qui met en vous son espérance

Du sifflet, toujours si fatal,

Montrez vous sobres, je vous prie

Donnez des bravos le signal

Frappez, sans vous faire de mal

Et par vous cette œuvre aura vie