La Grande Morale/Livre I/Chapitre 26

CHAPITRE XXVI.

§ 1. La tenue et le respect de soi est le milieu entre l’arrogance, qui n’est contente que d’elle-même, et la complaisance, qui s’empresse indifféremment pour tout le monde. La tenue s’applique aux relations de société. L’arrogant est d’humeur à ne fréquenter personne, et à ne daigner parler à qui que ce soit. Le nom même qu’on lui donne, en grec Authadès, paraît venir de sa manière d’être. L’arrogant est en quelque sorte autoadès, c’est-à-dire content de soi ; et on l’appelle ainsi, parce qu’il se plaît beaucoup à lui-même.

§ 2. Le complaisant est celui qui peut s’accommoder de la société de tout le monde, pour toute relation et en toute circonstance. Ni l’un ni l’autre de ces caractères n’est louable. Mais l’homme qui a de la dignité et de la tenue, est estimé, parce qu’il garde le milieu entre ces extrêmes. Il ne va pas avec tout le monde ; il ne va qu’avec ceux qui sont dignes de sa société. Mais il ne fuit pas tout le monde non plus ; il ne fuit que ceux qui méritent aussi qu’on les évite.