La Gare (Verhaeren)
LA GARE
Les trois usines de la ville,
La gare,
Avec ses coups de trompe et de sifflet,
Avec ses signaux verts dans le soir violet,
Où monte son pignon, montait l’ancien rempart.
Les dimanches, à l’heure où l’on sonne les messes,
Elle écoute de loin le lourd bourdon baller,
Et les cloches, une fois l’an, se quereller,
Et ceux qui vont à Deynze, et de Deynze à Courtrai,
Tous, ils rentrent, le soir, avant la nuit, chez eux,
Sans que jamais aucun ne laisse errer ses yeux
Circule, autour de vieux hangars, là-bas ;
Un camion s’éloigne, un camion arrive ;
On hèle, au cabaret, quelques débardeurs soûls,
Et les wagons chargés sont poussés bout à bout,
Ceux-ci d’Alost, ceux-là de Deynze et de Courtrai,
La gare,
Une dernière fois, tremble et s’effare,
Et se remplit de bruit ;
Puis, doucement s’enfonce et se clôt dans sa nuit ;
Et l’on n’entend plus rien dans la salle d’attente,
Où seul un bec de gaz reste allumé,
Que le grincement dur d’une plume irritante,