La Fleur d’Or/Préface

La Fleur d’OrAlphonse Lemerre, éditeurvol. 3 (p. 3-5).

PRÉFACE


Ce voyage poétique, d’un bourg de Bretagne aux villes d’Italie, semble demander, si rapide qu’il soit, quelques mots d’introduction.

C’est qu’aux fantaisies de la route, au libre plaisir d’aller et de voir, venait se joindre la recherche d’un but plus élevé : de là, comme un double voyage, idéal et réel. Si le précédent volume de Marie s’adressait avant tout au sentiment, celui-ci, même en face des splendeurs de la nature et de l’art, à travers les épisodes, délassements du chemin, devra donc s’adresser souvent à la réflexion.

Heureux peut-être qui s’en tient aux seules émotions de l’âme, aux habitudes du foyer, aux simples joies du pays natal ! Cette idée, symbolisée dans le chant de La Fleur d’Or[1], a même donné le titre de ce recueil ; cependant, après les fraîches années de jeunesse et d’inspiration, combien pourraient, dans la vie et dans l’art, négliger la science et impunément se passer d’elle ?

C’est la nécessité de cette recherche pénible, mais fructueuse, qui, conciliant à ce livre les hommes de pensée, décide l’auteur à le placer comme un lien et un anneau entre ses autres œuvres.

Au surplus, à ceux qui gardent une riante image de quelques hameaux d’Armorique d’après l’idylle qui les chanta, l’auteur doit annoncer qu’il reste toujours fidèle à son genre de poésie et à ses premiers instincts. Il sent trop le bonheur de pouvoir se dire : J’ai un pays ! Si donc il s’en éloigne, c’est pour y revenir bientôt et mieux enseigné : encore, dans cette excursion vers le Midi, emmène-t-il tous ses souvenirs, et aux fleurs de l’oranger se plaît-il à mêler les fleurs jaunes de la lande. Mais, besoin de l’âme et des yeux, il faut voir de plus près le soleil.

Rentré dans son village natal, et prêt à se replonger à la source de ses inspirations, puisse aujourd’hui le voyageur ne pas croire ses pas entièrement perdus ! Puissent même, dans les lieux qu’il a parcourus ou dans le monde des idées, ceux qui le suivraient, trouver avec plaisir quelques-unes de leurs impressions prévues dans ses notes poétiques et utilement résumées ! C’est que, prise dans son essence, la vie d’un seul est la vie de tous.


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  1. D’après de nombreux avis, on a cru devoir, dans cette édition, remplacer par ce titre de La Fleur d’Or le nom trop obscur des Ternaires : une disposition plus claire et plus courante des pièces et un très grand nombre de vers inédits feront, d’ailleurs, de ce livre lyrique un ouvrage presque nouveau.