La Cité de Dieu (Augustin)/Livre V/Chapitre XI

La Cité de Dieu
Texte établi par RaulxL. Guérin & Cie (Œuvres complètes de Saint Augustin, tome XIIIp. 102-103).
CHAPITRE XI.
LA PROVIDENCE DE DIEU EST UNIVERSELLE ET EMBRASSE TOUT SOUS SES LOIS.

Considérez maintenant ce Dieu souverain et véritable qui, avec son Verbe et son Esprit saint, ne forme qu’un seul Dieu en trois personnes, ce Dieu unique et tout-puissant, auteur et créateur de toutes les âmes et de tous les corps, source de la félicité pour quiconque met son bonheur, non dans les choses vaines, mais dans les vrais biens, qui a fait de l’homme un animal raisonnable, composé de corps et d’âme, et après son péché, ne l’a laissé ni sans châtiment, ni sans miséricorde ; qui a donné aux bons et aux méchants l’être comme aux pierres, la vie végétative comme aux plantes, la vie sensitive comme aux animaux, la vie intellectuelle comme aux anges ; ce Dieu, principe de toute règle, de toute beauté, de tout ordre ; qui donne à tout le nombre, le poids et la mesure ; de qui dérive toute production naturelle, quels qu’en soient le genre et le prix : les semences des formes, les formes des semences, le mouvement des semences et des formes ; ce Dieu qui a créé la chair avec sa beauté, sa vigueur, sa fécondité, la disposition de ses organes et la concorde salutaire de ses éléments ; qui a donné à l’âme animale la mémoire, les sens et l’appétit, et à l’âme raisonnable la pensée, l’intelligence et la volonté ; ce Dieu qui n’a laissé aucune de ses œuvres, je ne dis pas le ciel et la terre, je ne dis pas les anges et les hommes, mais les organes du plus petit et du plus vil des animaux, la plume d’un oiseau, la moindre fleur des champs, une feuille d’arbre, sans y établir la convenance des parties, l’harmonie et la paix ; je demande s’il est croyable que ce Dieu ait souffert que les empires de la terre, leurs dominations et leurs servitudes, restassent étrangers aux lois de sa providence ?