La Cité de Dieu (Augustin)/Livre IV/Chapitre XII

La Cité de Dieu
Texte établi par RaulxL. Guérin & Cie (Œuvres complètes de Saint Augustin, tome XIIIp. 79).
CHAPITRE XII.
DU SYSTÈME QUI FAIT DE DIEU L’ÂME DU MONDE ET DU MONDE LE CORPS DE DIEU.

Que dirai-je maintenant de cette doctrine d’un Dieu partout répandu ? ne doit-elle pas soulever tout homme intelligent ou plutôt tout homme quel qu’il soit ? Certes il n’est pas besoin d’une grande sagacité, à quiconque sait se dégager de l’esprit de contention, pour reconnaître que si Dieu est l’âme du monde et le monde le corps de cette âme, si ce Dieu réside en quelque façon au sein de la nature, contenant toutes choses en soi, de telle sorte que l’âme universelle qui vivifie la masse tout entière soit la substance commune d’où naissent chacune à son tour les âmes de tous les vivants, il suit de là qu’il n’y a aucun être qui ne soit une partie de Dieu. Or, qui ne voit que les conséquences de ce système sont impies et irréligieuses au suprême degré, puisqu’il s’ensuit qu’en marchant sur un corps, je marche sur une partie de Dieu, et qu’en tuant un animal, c’est une partie de Dieu que je tue ? Mais je ne veux pas dire tout ce que peut ici suggérer la pensée, sans que le langage puisse décemment l’exprimer.