La Bonne aventure (Sue)/2/III

Michel Lévy Frères, libraires-éditeurs (p. 57-84).
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III

L’on se souvient que l’inconnu avait, par une réserve de bon goût, laissé entr’ouverte la porte de la loge où il se trouvait avec madame de Beaupertuis.

Soudain, le bruit d’une assez vive altercation, élevée dans le couloir, fit que la jeune femme et le jeune homme retournèrent machinalement la tête du côté où le bruit s’était élevé.

Au milieu d’un groupe considérable, deux masques assez vulgaires échangeaient des paroles fort vives. Madame de Beaupertuis aperçut alors, parmi les spectateurs de cette dispute, son père et madame de Robersac, reconnaissables aux rubans rouges et blancs attachés à la pèlerine de leurs dominos ; tout à coup la jeune femme vit le prince de Morsenne quitter prestement le bras de la baronne comme pour prendre part à la discussion, quoique madame de Robersac s’efforçât en vain de le retenir en lui disant à voix basse :

— De grâce, ne vous mêlez pas de cela.

Madame de Beaupertuis, connaissant l’excessive réserve de son père, se demandait quelle cause pouvait le faire ainsi déroger à ses habitudes et aux convenances que lui imposaient son âge et sa position, lorsqu’elle le vit revenir presque aussitôt et reprendre le bras de madame de Robersac, qui ne l’avait perdu de vue que pendant quelques secondes à peine, et disparaître avec lui parmi les groupes qui se dissipaient, car l’altercation s’était bientôt apaisée.

Soit illusion, soit conséquence de sa vue un peu basse, madame de Beaupertuis crut avoir remarqué qu’en revenant donner le bras à madame de Robersac, le prince semblait d’une taille un peu moins élevée ; mais ne s’arrêtant pas longtemps à cette pensée, elle se retourna du côté de l’inconnu. Celui-ci lui dit en souriant :

— Quelque scène de jalousie sans doute ? car on dirait vraiment que le masque surexcite toutes les passions qu’il abrite.

— C’est du moins, monsieur, une surexcitation que doit ignorer toujours ce modèle des ménages bourgeois dont vous parliez tout à l’heure, — reprit madame de Beaupertuis avec ironie ; — voilà de braves gens qui ne risqueront jamais leur bonheur au bal de l’Opéra.

— Pourtant, madame, il s’en est fallu de bien peu.

— Comment cela ?

— En les quittant, je leur ai dit en plaisantant : — « Je vais au bal de l’Opéra ; venez-y donc avec moi. » — Mon ami, croyant procurer un grand plaisir à sa femme, voulait absolument la conduire ici, mais elle a courageusement refusé.

— Voilà un héroïsme digne d’une matrone romaine. Et elle est gentille, cette marchande ? car elle tient boutique, m’avez-vous dit.

— Oui, madame, ce qui ne l’empêche pourtant pas d’être ravissante ! C’est tout ce qu’on peut imaginer au monde de plus joli, de plus coquet, de plus piquant.

— Et… c’est sage ?

— Comme une femme amoureuse de son amant.

— Et sotte ?

— Remplie d’esprit naturel ; aucune éducation, mais le plus amusant petit babil que j’aie jamais entendu, madame.

— Et ça a du cœur ?

— Elle a veillé son enfant pendant deux mois avec un dévouement admirable.

— Mais, mon pauvre monsieur, savez-vous que c’est un phénix que cette petite marchande ? Le mari est votre ami ? Ce serait pour vous une maîtresse charmante, et vous seriez parfaitement appareillés.

Une insolente dureté vint aux lèvres de l’inconnu ; mais il se contint et reprit en souriant :

— Une petite bourgeoise… c’est, voyez-vous, madame la duchesse, encore trop bonne compagnie pour moi.

— Comment ! cette bourgeoise ?

— J’ai des goûts très-vulgaires, très-grossiers, encore au-dessous de ma condition ; jugez un peu. Mais n’en parlons pas. Si j’étais masqué, je vous ferais peut-être ces confidences, madame ; mais sans masque, vraiment… Je n’oserais.

— Je ne m’étonne plus, monsieur, du cynisme de certains de vos jugements, dès que vous préférez par goût ce qui est bas et grossier.

— Par goût et par raison.

— Par raison ?

— Je ne sais, madame, si M. le duc, votre mari, est un fumeur.

— Quelle question !

— C’est que si M. le duc aimait à fumer, vous auriez peut-être quelques notions sur la passion du tabac, et vous comprendriez mieux ma comparaison.

— Il n’importe… Dites !

— Eh bien ! madame, à Londres, j’ai souvent vu un certain lord Salsbury, le plus grand amateur de tabac qu’il y ait, je crois, en Europe. Il dépensait pour cette manie des sommes considérables. Un jour, je le trouve fumant du tabac de caporal (pardon de l’expression, madame la duchesse) dans une pipe de deux sous ; je reste stupéfait. Voici la réponse pleine de sens et de philosophie que me fit lord Salsbury : « J’ai fumé ce qu’il y a de plus exquis à la Havane et en Turquie, des cigares couleur d’ambre ; à l’épiderme fin comme du satin, à la saveur de noisette, à la cendre blanche comme de l’albâtre ; j’ai fumé dans des pipes magnifiques du tabac turc, jaune comme de l’or, au parfum plus délicieux que celui des aromates les plus enivrants. Mais, hélas ! que de peines, que de soins, que de frais, et surtout souvent que d’horribles déceptions !!!… Combien de fois, après avoir savouré une caisse de cigares de la Havane ou une boîte de latakié, dignes des dieux, je tombais, ainsi que cela arrive toujours, sur des tabacs frelatés, fardés, desséchés, insipides, aigres ou amers, en un mot, exécrables ! Pourtant, ils avaient absolument la même apparence que les premiers, et m’avaient coûté aussi cher et autant de soins. Ma foi ! las d’être dupe de ces dehors trompeurs, de ces alternatives de choses exquises et de choses détestables, qu’il faut acheter au même prix, je me suis bravement rabattu sur le tabac vulgaire. C’est rude, c’est énergique, c’est violent, mais sain, naturel, et d’une qualité toujours égale ; l’on en trouve enfin, et toujours, sans peine et sans souci, à la première boutique venue. Aussi, depuis que j’en ai goûté, je trouve cela si commode et surtout si agréable, que tout autre tabac me semblerait maintenant sans montant et sans verdeur. »

— Que prouve, Monsieur, cette dépravation de goût, sinon que votre lord était blasé…

— Blasé ? lui ! Madame ?… Allons donc ! Il fumait intrépidement tout le jour.

— Quoique impertinente, cette comparaison, Monsieur, est assez claire ; vous osez prétendre qu’il faut chercher d’ignobles et faciles plaisirs dans la dégradation d’autrui et de soi-même !

— Je prétends, madame, qu’il n’y a pas de milieu entre le vice et la vertu ; je prétends que ceux-là qui ont le courage de la constance et des bonnes mœurs sont dignes d’admiration et de respect, mais je prétends aussi que pour ceux qui cherchent le plaisir dans le vice, tout ce qu’autorise la loi est permis. La seule morale est le mystère.

— Le mystère ! Vraiment, monsieur, vous faites cette belle concession… aux préjugés probablement ?

— Non… au plaisir.

— Comment cela ?

— D’abord avec du secret, dans les amours d’un certain monde, si l’on est quitté, personne ne sait votre liaison ; ainsi point de blessure d’amour-propre ; puis avec du secret l’on se donne d’inépuisables sujets de rire de ce monde toujours si pénétrant, et dont on met ainsi la pénétration en défaut ; puis enfin une femme sauvegarde ainsi les apparences, et sa réputation, toujours si importante à ménager, dans l’intérêt du plaisir même, car avec de l’adresse, du mystère, de l’audace et de la présence d’esprit, caprices, fantaisies, tout est permis à une femme.

— À une femme qui ne se respecte pas, monsieur, car s’il en est qui fassent peut-être bon marché des principes, du moins la dignité de soi, sachez-le bien, les préservera toujours de dégradantes faiblesses.

L’inconnu se mit à rire d’un air sardonique.

— La dignité de soi ? lorsqu’il s’agit après tout d’un amour adultère ! d’un échange de dépravation ! Allons ! madame la duchesse, c’est une plaisanterie ! Qu’une femme d’une sagesse austère ou, qui mieux est encore, d’une sagesse pleine de modestie et de charme, ait la dignité de soi, je serai le premier à y rendre hommage, mais qu’une femme qui a des amants exige d’eux des quartiers de noblesse, comme s’il s’agissait de monter dans les carrosses du roi, ainsi qu’on disait autrefois, c’est aussi ridicule que maladroit, c’est limiter ses choix dans un cercle d’une monotonie désolante ; c’est en exclure la variété, l’imprévu, le nouveau, car franchement, Madame, les hommes d’un même monde sont tous taillés sur le même patron ; et puis, tenez, une fois lancés dans la voie du plaisir, votre tort, à vous autres, est de ne pas savoir vous servir dans vos amours de votre titre comme d’un contraste piquant ! Quoi de plus fastidieux que d’être duchesse avec des ducs, marquise avec des marquis ! Ah ! vos grand’mères de la Régence savaient bien mieux que vous jouir de leur jeunesse et de leur beauté. Aujourd’hui grandes dames à Versailles ou dans leur petite maison ouverte à quelque Richelieu ; demain grisettes ou petites bourgeoises, et aimées (ce n’est pas peu dire) comme sont aimées les grisettes et les bourgeoises ! Alors pour elles que de bons tours, que de folles aventures, quel trésor de gais souvenirs pour leur vieillesse ! Aussi, quelles aimables femmes c’étaient que ces vieilles marquises de la Régence ou de Louis XV ! Quel vif esprit, quelle inaltérable bonne humeur, quelle malice, combien d’anecdotes, que de joyeux souvenirs relevés par le sel du vieil esprit gaulois de Brantôme, de Rabelais ou de La Fontaine ! Mais aussi ces grandes dames-là entendaient et surtout pratiquaient mieux la fusion et l’égalité des classes que les philosophes bourrus de ce siècle couleur de rose et argent ; vos grand’mères, madame, laissaient leur dignité avec leur couronne ducale, leurs paniers et leur corset, et après avoir été frétiller en jupon court à quelque rendez-vous, elles reprenaient leur dignité avec leur tabouret au jeu de la reine. Et franchement elles avaient raison : pourquoi s’arrêter à telle ou telle limite ? pourquoi, s’ils vous plaisent, exclure celui-ci et celui-là ? Existe-t-il donc aussi un code religieux et moral pour l’amour ? Telle liaison est-elle donc permise, telle autre défendue ? Est-ce que pour ces grandes éclectiques du plaisir (pardon du mot) Madame, un beau garde-française était plus déshonorant qu’un petit marquis ? un frais et joli jouvenceau était plus méséant que quelque prélat insolent et dissolu ?

— Eh ! monsieur, même au milieu de ce dévergondage passager, nos grand’mères conservaient toujours une préférence digne d’elles.

— Certes, madame, quelque amant qui restait ami, ou quelque ami… qui restait amant ; oh ! pour celui-là, ordinairement d’une discrétion éprouvée, pour celui-là jamais de secrets. Aussi, lorsqu’un ressouvenir de plaisir rapprochait de temps à autre Clitandre et Cydalise dans un gai souper, que de bons contes ! que de piquantes confidences à la lueur des bougies roses de la petite maison ! Deux jeunes compagnons de plaisir ne sont pas plus sincèrement indiscrets, plus rieurs et plus causeurs, en se versant le vin d’Aï glacé ; puis après une folle journée, Clitandre et Cydalise se disaient gaîment au revoir, et couraient à de nouvelles aventures qu’ils devaient se raconter quelque autre soir.

— Mon pauvre monsieur, savez-vous une chose ?

— Quoi donc, madame ?

— Depuis longtemps Molière a dit et prouvé que M. Josse était orfèvre.

— Ainsi, vous pensez, madame, que vous croyant une grande dame, moi, pauvre diable de petit bourgeois, je vous parle ainsi dans le machiavélique dessein de vous engager à vous encanailler ? Rassurez-vous, madame la duchesse. D’abord j’ai trop de foi dans votre bon goût ; et puis, ainsi que j’ai eu l’honneur de vous le dire, je fais comme lord Salsbury, je ne fume plus que du tabac de caporal.

— Soit, monsieur ; vous exposez ces théories étranges avec le plus parfait désintéressement, et seulement pour…

— Pour l’amour de l’art, ou, si vous le préférez, madame, pour l’amour du vice.

— Chacun a son idéal ; le vôtre ne serait pas le mien ; il me dégoûte et me révolte.

— Et votre idéal, madame ?

— Deux amants d’un certain monde, toujours tendres, fidèles, passionnés, vivant solitaires dans quelque charmante retraite.

— À merveille, madame ! je vous comprends ; votre amant vous enlève dans une voiture de poste à quatre chevaux, avec un courrier en avant, pour plus de mystère, et vous allez vous confiner en Suisse ou en Italie, dans quelque villa ravissante, avec un excellent cuisinier, des gens et quelques chevaux, car, après tout, on se doit à soi-même de vivre d’une certaine sorte. C’en est donc fait, vous et votre amant, vous voilà libres ! Plus d’inquiétudes, plus de contrainte, plus d’obstacles, plus de témoins jaloux, gênants ou trop commodes ; vous êtes seuls, indépendants, vous allez tous deux, les bras enlacés, voir la lune se lever sur la montagne, ou le soleil se coucher derrière les grands bois ; d’autres fois, ce sont des promenades nocturnes sur le lac ; alors, silencieux et ravis, pressés l’un contre l’autre, pendant que le batelier dort sur ses rames, vous rêvez délicieusement à votre amour en regardant les étoiles. Oui, ah ! oui, ce sont là d’ineffables bonheurs, capables d’être même parfois goûtés par deux amants d’un certain monde, — ajouta l’inconnu d’une voix émue, attendrie, dont l’accent plein de charme frappa de nouveau madame de Beaupertuis. — Oui, ce sont là, je le sais, des jouissances célestes ! Mais combien durent ces jouissances ? mais où trouver deux âmes assez pures, assez fortes, assez religieusement aimantes pour se tenir durant des mois, des années, toute une vie, à une telle hauteur de poésie et d’extase ? Non ! non ! de telles âmes n’existent pas, madame, surtout quand elles ont été trempées, ou plutôt détrempées dans un certain monde ! Aussi voulez-vous que je vous dise ce qui arrive toujours ? — reprit l’inconnu en redevenant moqueur. — Ces amants, s’ils n’ont pas l’heureuse idée de prendre la poste chacun de son côté, lorsqu’ils ont vécu quinze jours, un mois au plus de cette vie extatique, afin d’en emporter du moins le souvenir dans tout son parfum ; ces amants solitaires bientôt s’ennuient à la mort, malgré la lune, le soleil, la montagne, le lac et les grands bois. Chacun, par sot amour-propre, craignant de faire à l’autre cet aveu décevant, les caractères s’aigrissent, s’irritent, récriminent, et le temps de la dispute paraît encore le moins long. L’amant, poussé à bout, courtise votre femme de chambre, si elle est jolie, ou quelque gentille paysanne. Enfin, un beau jour, l’on se sépare ennemis jurés, et la femme choisit alors des amours moins poétiques et moins solitaires. Voyons, madame, vous êtes du monde, vous le connaissez à merveille ; avouez que sur cent Une chaumière et son cœur, cela se passe ainsi.

— Soit, monsieur, mais il est heureusement des exceptions.

— Oui, qui confirment la règle.

— Eh ! monsieur, nous parlons d’idéal ! Faut-il chercher dans la règle commune ? Or, je vous dis, moi, qu’à ma connaissance il existe deux amants qui, depuis plus de vingt ans, vivent toujours heureux et solitaires dans leur retraite.

— Ainsi, madame, ils ont vieilli ensemble, les infortunés !

— Infortunés ! pourquoi ?

— Grand Dieu ! madame ! vieillir ensemble ! et dans la solitude encore ! voir se creuser la première ride ! voir poindre le premier cheveu blanc ! assister chaque jour, seuls à seuls, face à face, au lent envahissement de l’âge ! à la triste décomposition de ce qui a été jeune, frais et charmant ! se dire avec effroi, presque avec remords : Voilà pourtant ce que j’ai adoré ! Ah ! madame ! il faut presque se haïr pour s’exposer mutuellement à cette cruelle et incessante comparaison du présent au passé ! Non, non, chaque âge a ses plaisirs, chaque saison a sa fleur. L’amour, de quelque façon qu’on aime, est la fleur de la jeunesse ; en sa saison, elle brille d’un éclat enchanteur, elle donne les parfums les plus enivrants ; mais, sa saison passée, si vous voulez la conserver, vous la conserverez comme l’on conserve une fleur dans les herbiers : vous verrez bientôt son coloris s’effacer, sa senteur s’évaporer, et de cette fleur autrefois ravissante, il ne restera que des pétales si flétries, des feuilles si desséchées, qu’il faudrait recourir à l’étiquette pour reconnaître que cette chose jaunie, fanée, ratatinée, s’appelait jadis l’amour ! Non, non, vous tous qui n’avez pas la force des grands devoirs, la force de vivre dans l’austère pratique de la vertu, soyez magnifiques et prodigues, dépensez et semez partout et pour tous, sur votre route, ces trésors de jeunesse ; l’âge vient sitôt ! Chaque jour, chaque heure perdue, sont irréparables ! Allez, madame, croyez-moi ; que votre vie stérile pour le bien ne soit pas du moins stérile pour le plaisir ; imitez vos grand’mères de la Régence, déposez souvent votre manteau de cour, et, moins dignement vêtue, suivez l’inconstance à l’aile légère, le caprice au vol fantasque, alors vous serez ravie, charmée de ce que vous rencontrerez de nouveau, d’imprévu, de piquant, de varié, dans ces pays qu’une fausse dignité vous empêchait de parcourir !

— Mon Dieu, monsieur, j’admire combien les gens d’esprit (car après tout, je peux bien maintenant convenir que vous en avez quelque peu), j’admire, dis-je, combien les gens d’esprit se laissent souvent entraîner à se contredire eux-mêmes par la manie de soutenir des paradoxes !

— Quels paradoxes, quelle contradiction, madame ?

— Vous venez de me dire, n’est-ce pas, qu’à votre sens, rien n’est plus triste, plus cruel pour deux personnes qui se sont longtemps et fidèlement aimées (et c’est à peine si vous admettez qu’il puisse exister de ces personnes-là), de se voir vieillir ensemble ?

— Je les admets comme exception, et les trouve en effet très-malheureux de se voir mutuellement vieillir.

— Et tout à l’heure vous n’aviez pas assez de louanges, assez d’éloges hyperboliques pour me vanter le bonheur de votre ami d’enfance et de sa femme ! Et cependant ces époux tourtereaux sont, d’après toute probabilité, destinés à devenir (pardon du terme) de vieux tourtereaux ?

— Je vous ai parlé d’eux, madame, comme de personnes fidèles à leurs devoirs et à leur amour ; et nous parlons de gens cherchant le plaisir dans des liaisons coupables ; la comparaison n’est pas possible, car…

L’inconnu ne put achever, car soudain une voix joyeuse et sonore, retentissant à la porte entr’ouverte de la loge, fit entendre ces mots :

Ohé ! Anatole… ohé !