L’Encyclopédie/1re édition/TULLE

TULLUM  ►

TULLE, s. f. (Commerce.) espece de dentelle commune qui sert à faire des manchettes, mais plus communément ce qu’on appelle entoilage. Il y en a en soie & en fil ; celle en soie a le même emploi que celle en fil.

Tulle, (Géog. mod.) en latin du moyen âge Tutela, ville de France, capitale du bas Limousin, au confluent des rivieres de Correse & de Solan, à 15 lieues au sud-est de Limoges, & à 118 au midi de Paris, dans un pays rempli de montagnes & de précipices.

C’est aussi par cette raison, que d’anciens moines s’y établirent, pour y former dans le x. siecle un monastere qui procura la fondation de la ville de Tulle. Les princes qui ont posséde le Limousin, s’attribuerent le haut domaine de cette ville, & les rois de France leur ont succédé.

Tulle est aujourd’hui décorée d’un évêché, d’un présidial, & d’une élection : l’évêché fut érigé par le pape Jean XXII. en 1317 ; il n’a que huit lieues d’étendue, & le revenu est de douze à quatorze mille livres ; l’évêque est aussi seigneur de la ville, qui porte le titre de vicomté. Long. 19. 20. latit. 45. 15.

Cette ville a été fort illustrée par M. Baluze (Etienne) qui y naquit en 1630. C’est un des plus savans hommes du xvij. siecle, & un des auteurs qui a rendu le plus de services à l’Eglise & à la république des Lettres, par les soins qu’il prit de rechercher de tous côtés les anciens manuscrits, de les conférer avec les éditions, & de les donner ensuite au public avec des notes pleines d’érudition. On lui doit le recueil du capitulaire de nos rois, les œuvres de S. Cyprien, les conciles de la Gaule narbonnoise, la concorde du sacerdoce & de l’empire de M. de Marca, l’édition des épîtres d’Innocent III. en 2. vol. infol. qui parurent en 1682. Outre cela, il a mis au jour six volumes in-8°. de différentes pieces, intitulées Miscellanea. C’est encore lui qui a formé le recueil des manuscrits de la bibliotheque de Colbert. Il a travaillé jusqu’à l’âge de 88 ans, qu’il termina par sa mort à Paris, en 1718.

M. Baluze écrivoit bien en latin, & étoit très versé dans l’histoire ecclésiastique & prophane. Il donna en 1708, l’histoire généalogique de la maison d’Auvergne, & fut exilé pendant quelque tems, pour avoir soutenu dans cet ouvrage les prétentions du cardinal de Bouillon, qui se croyoit indépendant du roi, & qui fondoit son droit sur ce qu’il étoit né d’un prince souverain, dans le tems que Sedan appartenoit encore à ce prince.

Le jésuite Jarrige (Pierre) n’a pas fait beaucoup d’honneur à la ville de Tulle sa patrie. Il étoit un des fameux prédicateurs de son ordre, mais un mal-honnête homme, qui pour se venger de ne pas obtenir les emplois dont il se croyoit digne, vint en Hollande, abjura sa religion, & mit au jour un livre qu’il intitula, les jésuites mis sur l’échaffaud, livre dans lequel il les traita d’une maniere si outrageante, que jamais il n’étoit arrivé à leur société rien de si mortifiant, dit un auteur calviniste. Le pere Pontheller ramena cet esprit fougueux ; il rentra en 1650 dans la communion romaine, s’établit chez les jésuites d’Anvers, & publia sa rétractation.

M. Melon (N.) mort à Paris en 1738, étoit natif de Tulle ; la cour l’employa dans des affaires très importantes ; son principal ouvrage est un Essai politique sur le Commerce, dont la seconde édition est meilleure que la premiere. (D. J.)