L’Encyclopédie/1re édition/TREMBLEMENT

Tremblement, (Médecine.) un mouvement alternatif, involontaire, lâche, & désordonné dans un de nos organes particuliers, ou dans plusieurs ensemble s’appelle tremblement.

Cette maladie qui consiste dans une violente agitation des membres en directions contraires, est due au manque de ton, & aux efforts des parties attaquées pour reprendre ce ton.

Les Médecins distinguent deux especes de tremblemens, qu’ils nomment tremblement actif & tremblement passif. Le tremblement actif est celui qui arrive dans les violentes passions, telles que la terreur, la colere, la joie subite, &c. l’on doit rapporter cet état à des mouvemens demi-convulsifs. Le tremblement passif est dû à une cause particuliere, & approche des affections demi-paralytiques ; mais les tremblemens passifs considérés comme maladie, doivent être distingués de ceux qui sont produits par des causes accidentelles, telles qu’est le tremblement qui succede au bain dans une eau très-froide.

Causes. Les causes internes des tremblemens passifs considérés comme maladie, sont la flaccidité des nerfs, le relâchement du ton des parties, le manque ou le cours déréglé des esprits animaux ; les causes externes & accidentelles sont en grand nombre, comme l’omission des évacuations accoutumées, les trop grandes évacuations, les longues maladies qui ont précédé, l’abus des liqueurs spiritueuses, les humeurs cacochimiques & mélancoliques, les trop grandes veilles, la débauche du vin & des femmes, les exhalaisons minérales dans ceux qui travaillent aux mines, &c.

Prognostiques. Le tremblement de naissance ou de vieillesse est inguérissable ; en général, plus le tremblement est confirmé par le tems, & moins aisément peut-on y remédier. Le tremblement qui vient du travail des mines de mercure admet rarement des remedes, & fait craindre qu’il ne dégénere en paralysie. Le tremblement qui vient de lui-même dans les femmes grosses, annonce d’ordinaire l’avortement ou l’accouchement prochain ; celui qui succede à l’accouchement & qui est causé par la suppression des vuidanges est très-dangereux, & occasionne quelquefois l’épilepsie.

Méthode curative. L’abus des veilles, celui des plaisirs de l’amour, les trop grandes évacuations du sang & des humeurs, & la diete poussée trop loin, sont autant de choses qui épuisent les esprits & qui produisent en conséquence des tremblemens ; on les guérira en évitant toutes ces causes, en employant des alimens faciles à digérer & propres à réparer les forces, en procurant le repos & le sommeil, enfin en usant des remedes fortifians.

Le mouvement désordonné des esprits, qui précede d’un long abus des liqueurs spiritueuses, d’opiats, & d’usage d’antimoine, de mercure, de dissolutions de plomb, nous présente autant de sources de tremblemens presque sans remedes, même en évitant les causes d’où ils naissent ; mais le tremblement qui procede des boissons d’eaux chaudes, comme des infusions de thé, de caffé, &c. se guérit en en quittant l’usage, & en usant des remedes qui fortifient le ton des visceres. Le tremblement des mains demande en particulier des frictions du bras, des poignets, qu’on lavera fréquemment d’eau ferrée, chargée de décoctions de feuilles d’armoise, de sauge, de marjolaine ; les esprits tirés de ces herbes, & autres semblables nervins sont utiles.

Les passions de l’ame qui, par leur violence, ont causé un grand tremblement dans des personnes pléthoriques, demandent la saignée, s’il y a des signes d’inflammation ; autrement les tremblemens de cette nature cessent d’eux-mêmes par le secours des rafraîchissans.

Les tremblemens qu’éprouvent fréquemment les personnes mobiles & dont les nerfs sont délicats, veulent être traités par les nervins anti-spasmodiques. Les éléosacchara de l’esprit de lavande ou de fleur d’orange, conviennent aux tremblemens des tempéramens pituiteux & phlegmatiques.

On employera les frictions & onctions d’onguent martiatum, ou d’huiles nervines, au dos, aux lombes, & aux cuisses des personnes dont les jambes & les piés souffrent de légers tremblemens.

On rétablira par les remedes accoutumés tout tremblement né de la suppression de quelque humeur habituelle ; celle de la transpiration & de la sueur, par les diaphorétiques ; celle des hémorrhoïdes, par les sangsues ; celle des regles, par la saignée, les emménagogues ; la retention d’urine, par la sonde, les bains, les diurétiques, &c.

Les tremblemens qui doivent leur naissance à des humeurs atrabilaires portées au cerveau, demandent une prompte révulsion, & leur expulsion du corps par des purgatifs.

Les humeurs cacochimiques, scorbutiques, qui produisent le tremblement, doivent être évacuées, corrigées ; ensuite on rétablira le ton des visceres par des corroborans internes & externes, par les antiputrides, par les frictions d’huile de castor & d’esprits de plantes aromatiques.

Il résulte de ce détail que tout tremblement est causé par le déréglement de l’action des solides ou des fluides qu’il faut rétablir pour en opérer la guérison ; mais comme le tremblement fébrile est un épiphénomene de la fievre, nous lui devons un article à part.

Tremblement fébrile, (Médec.) le tremblement de la fievre est mieux connu qu’on ne peut le définir. Il suppose une alternative de tension & de relaxation dans les muscles ; il suppose aussi des causes qui se succédant les unes aux autres, tendent & relâchent les muscles promptement & involontairement ; la circulation du liquide artériel & du suc nerveux, tantôt continuée, & tantôt interrompue, & par conséquent le cours de ces deux fluides suspendu, tantôt au commencement, & tantôt sur la fin de la maladie ; enfin leur longue absence à la suite d’une grande déperdition.

Si le tremblement dure long-tems, il forme des obstacles à la circulation des humeurs, & produit les vices qui en sont des suites. De-là on peut tirer son diagnostic & son prognostic.

Les accès des fievres intermittentes & remittentes, & surtout de la fievre quarte, commencent par le tremblement qui cesse de lui-même, & est succedé par la chaleur ; celui qui subsiste encore après la guérison de la maladie, doit être regardé comme l’effet de la débilité du corps.

Les tremblemens offrent des prognostics différens dans les fievres continues, ardentes, aiguës, inflammatoires ; ainsi, par exemple 1°. les tremblemens qui paroissent au commencement de ces sortes de fievres n’annoncent aucun danger, dès qu’ils ne sont pas durables. 2°. Mais les tremblemens qui augmentent avec le mal, présagent ordinairement le délire, les convulsions, & autres maux de la tête, si on n’y remedie par la saignée, les purgatifs, l’écoulement du ventre. 3°. Ceux qui viennent dans un jour critique avec d’autres bons signes, annoncent une crise ; autrement ils désignent une triste métastase & la mort, si d’autres signes facheux les accompagnent. 4°. Dans le déclin du mal & la destruction des forces ils sont toujours mauvais, car alors ils proviennent de la corruption des humeurs, de quelqu’autre facheuse métamorphose, de l’engorgement spasmodique du cerveau, &c.

La méthode curative des tremblemens fébriles consiste à rétablir l’égalité de la circulation & de la pression du sang artériel & des esprits, de l’un contre les parois des arteres, & des autres sur les fibres motrices : c’est ce qu’on peut faire au commencement de la maladie par l’usage des remedes qui dissipent la lenteur, qui rétablissent les forces ; & à la fin par ceux qui peuvent réparer en peu de tems les liquides qu’on a perdus, & fortifier les fibres & les visceres. V. les beaux commentaires du docteur Van-Swieten. (D. J.)

Tremblement, en Musique, est le nom qu’on a donné quelquefois à cet agrément du chant que les Italiens appellent trillo, & que nous ne connoissons aujourd’hui que sous le nom de cadence. Il y en a de plusieurs sortes distinguées sous divers noms par les maîtres de goût du chant. Voyez Cadence, Goût du chant. (S)