L’Encyclopédie/1re édition/TOSCANE

TOSCANE, terre bolaire de, (Hist. nat.) terra sigillata florentina, ou terra alba magni ducis ; c’est une terre bolaire blanche, assez dense, compacte & pesante, douce & savonneuse au toucher. Boccone a cru qu’elle contenoit des parties métalliques à cause de sa pesanteur, & parce que l’on trouve du fer & du mercure dans les montagnes d’où on la tire. On la trouve près de Sienne, près de Florence, & en plusieurs autres endroits de la Toscane.

Toscane, (Géogr. anc.) la Toscane, ou plutôt l’Hétrurie, se partageoit anciennement en douze cités, dont chacune gouvernée séparément avoit un chef électif, nommé roi par les Romains, mais que presque tous les anciens supposent avoir eu le titre de Lucumon. Ces douze cites formoient néanmoins un corps, & leurs députés s’assembloient pour tenir un conseil commun sur les intérêts généraux de la nation. Quelquefois leurs troupes se réunissoient : plus souvent elles étoient désunies, & c’est cette mésintelligence qui livra la Toscane aux Romains. Les anciens ont parlé de ces douze cantons de l’Hétrurie : mais aucun n’en a fait l’énumération, & les modernes qui l’ont entreprise ne sont pas d’accord entr’eux.

Il faut bien distinguer les Toscans de l’Hétrurie d’avec ceux de la Campanie, & d’avec ceux qui habitoient au-delà du Pô ; c’étoient trois corps différens, & qui ne dépendoient point l’un de l’autre. Presque tous les Critiques les ont néanmoins confondus ensemble : ils font plus, ils confondent les Toscans de l’Hétrurie d’avec les Pélasges ; & cela, parce que plusieurs cités pélasgiques étoient enclavées dans l’Hétrurie, où, malgré leur mélange avec les Toscans, elles avoient conservé, sans beaucoup d’altération, les mœurs & la religion des anciens habitans de la Grece. Voyez Tyrrhènes, Rasenæ, Hetruria, &c. (D. J.)

Toscane, la, (Géog. mod.) état souverain d’Italie, avec titre de grand-duché : il est borné au nord par la Marche d’Ancône, la Romagne, le Bolognese, le Modenois & le Parmesan ; au sud, par la mer Méditerranée ; à l’orient, par le duché d’Urbin, le Pérugin, l’Orvietano, le patrimoine de S. Pierre & le duché de Castro ; à l’occident, par la mer & l’état de la république de Gènes.

On lui donne cent trente milles du nord au sud, & près de six-vingt milles de l’est à l’ouest ; elle comprend le Florentin, le Pisan & le Siennois ; mais pour que la Toscane moderne renfermât toute l’ancienne Hétrurie, elle devroit comprendre encore quelques autres domaines, qui sont entre les mains de divers princes particuliers.

On sait les diverses révolutions qu’elle a essuyées. La Toscane, ou plutôt l’Hétrurie, passa de la domination de ses Lucumons à celle des Gaulois-Sénonois qui furent soumis aux Romains. Après la décadence de l’empire romain, cette grande province devint la proie des barbares qui inonderent l’Italie ; ensuite elle fit partie des états des empereurs d’Occident ; après plusieurs changemens, elle tomba entre les mains des Médicis, & fut érigée en duché par l’empereur Charles-Quint en faveur d’Alexandre de Médicis ; le dernier duc de ce nom, Jean-Gaston de Médicis, étant mort sans enfans en 1737, la Toscane a passé au duc de Lorraine, aujourd’hui empereur.

Quand on commença en Italie vers le commencement du xiv. siecle à sortir de cette grossiereté, dont la rouille avoit couvert l’Europe depuis la chûte de l’empire romain, on fut redevable des beaux-arts aux toscans, qui firent tout renaître par leur seul génie. Brunelschi commença à faire revivre l’ancienne architecture. Le Giotto peignit, Bocau fixa la langue italienne. Gui d’Arezzo inventa la nouvelle méthode des notes de la musique. La Toscane étoit alors en Italie ce qu’Athènes avoit été dans la Grece. Voyez les monumenta Etrusca, tabulis æneis, edita & illustrata ab. Ant. Franc. Gori, Flor. 1737, trois volumes in-fol.

Enfin le commerce avoit rendu la Toscane si florissante & ses souverains si riches, que le grand duc Cosme II. fut en état d’envoyer vingt mille hommes au secours du duc de Mantoue contre le duc de Savoie en 1613, sans mettre aucun impôt sur ses sujets : exemple rare chez des nations plus puissantes.

Il faut ajouter que le terroir de la Toscane est admirable par son aspect & sa variété. Ici se présentent de hautes montagnes, où l’on trouve des mines de cuivre, d’alun, de fer & même d’argent, & des carrieres de très-beau marbre & de porphyre ; ailleurs s’offrent à l’aspect des collines délicieuses, où l’on recueille quantité de vin, d’oranges, de citrons, d’olives, & de toutes sortes de fruits. Dans d’autres endroits sont des plaines à perte-de-vue, fertiles en pâturages, en blé, en grains, & en tout ce qu’on peut souhaiter pour le soutien de la vie. Le printems y est perpétuel.

Adisson enchanté de cette contrée, en a fait un tableau charmant. La Toscane, dit-il, est ce beau pays d’Italie, qui mérite la préférence sur tout autre.

Where ev’n rough rocks with tender myrthe bloom,
And trodden weeds send out a rich parfume ;
Where western gales eternally reside,
And all the seasons lavish all their pride ;
Blossoms and fruits, and flow’rs, together rise,
And the whole year in gay confusion lies.


(Le chevalier de Jaucourt.)

Toscane, mer de, (Géog. mod.) on appelle mer de Toscane ou mer de Tyrrhene la partie de la mer Méditerranée renfermée entre la Toscane, l’état de l’Eglise, le royaume de Naples, & les îles de Sicile, de Sardaigne & de Corse. On lui donne aussi le nom de mer inférieure par opposition au golfe de Venise, qu’on appelle mer supérieure. (D. J.)