L’Encyclopédie/1re édition/TORYNE

TORYNE, (Géog. anc.) Toryna, lieu de l’Epire, sur la côte. Plutarque, in Antonio, dit que pendant qu’Antoine se tenoit à l’ancre près du cap Actium à la droite, où fut depuis bâtie la ville de Nicopolis, Octave se hata de traverser la mer d’Ionie, & s’empara le premier du poste appellé Toryne. Antoine fut consterné d’apprendre cette nouvelle, car son armée de terre n’étoit pas encore arrivée ; mais Cléopatre se moquant & jouant sur le mot : hé bien, dit-elle, qu’y a-t-il de si terrible qu’Octave soit assis à Toryne ? Il est impossible de conserver dans la langue françoise la grace de cette allusion, ce qu’Amiot a fort bien vu. Toryne qui est ici un nom de ville, signifie aussi une cuillere-à-pot ; & c’est sur cette derniere signification que porte la plaisanterie de ce bon mot, comme si Cléopatre avoit dit : hé bien, qu’y a-t-il de si terrible qu’Octave se tienne près du feu à écumer le pot ? La plaisanterie étoit d’autant plus jolie, qu’elle tomboit sur un homme qui dans les combats sur terre se mettoit avec les gens du bagage, & sur mer, alloit se cacher à fond de cale, ce qu’Antoine n’ignoroit pas. (D. J.)