L’Encyclopédie/1re édition/TORO

◄  TORNOVO
TOROELLA  ►

TORO, s. m. (terme de relation.) c’est le mets le plus délicieux des Issinois. Il se fait du fruit du palma prunifera, lequel fruit est gros comme une prune. Après l’avoir mis en monceau pour le laisser mûrir, ils le concassent dans un mortier de bois, l’arrosent d’eau chaude, le pressent, & en tirent une liqueur grasse dans laquelle ils font cuire leur poisson avec du sel & du piment. (D. J.)

Toro ou Tauro, (Géog. mod.) ville d’Espagne, au royaume de Léon, sur le Duero, entre Zamora au couchant, & Tordesillas au levant, au bout d’une belle plaine. Elle a vingt-deux paroisses dépeuplées, sept couvens d’hommes, cinq de filles, quatre hôpitaux & un château. La collégiale qui a été autrefois cathédrale, est composée d’un abbé & de seize chanoines. Les états s’y sont tenus quelquefois. Elle est célebre par la bataille de 1476, qui assura la couronne de Castille à Ferdinand, prince d’Aragon. Long. 12. 45. latit. 41. 38.

C’est ici que le comte-duc d’Olivarès, premier ministre d’Espagne, se retira dans sa disgrace. Le gouvernement du royaume remis par Philippe IV. entre ses mains pendant vingt-deux ans ne fut qu’un enchaînement de malheurs. Ce prince perdit le Roussillon par le manque de discipline de ses troupes, le Brésil par le délabrement de sa marine, & la Catalogne par l’abus de son pouvoir ; on vit par la révolution du Portugal combien une domination étrangere est odieuse, & en même tems combien peu le ministere espagnol avoit pris de mesures pour conserver tant d’états.

« On vit aussi (ajoute M. de Voltaire), comme on flatte les rois dans leurs malheurs, comme on leur déguise des vérités tristes. La maniere dont Olivarès apprit à Philippe IV. la perte du Portugal, est célebre : je viens vous annoncer, dit-il, une heureuse nouvelle ; Votre Majesté a gagné tous les biens du duc de Bragance ; il s’est avisé de se faire proclamer roi, & la confiscation de ses terres vous est acquise par son crime. La confiscation n’eut pas lieu. Le Portugal devint un royaume considérable, surtout lorsque les richesses du Brésil & les traités avec l’Angleterre rendirent son commerce florissant.

» Le comte-duc d’Olivarès, longtems le maître de la monarchie espagnole & l’émule du cardinal de Richelieu, fut disgracié pour avoit été malheureux. Ces deux ministres avoient été longtems également rois, l’un en France, l’autre en Espagne ; tous deux ayant pour ennemis la maison royale, les grands & le peuple, tous deux très-différens dans leurs caracteres, dans leurs vertus & dans leurs vices ; le comte-duc, aussi réservé, aussi tranquille & aussi doux que le cardinal étoit vif, hautain & sanguinaire. Ce qui conserva Richelieu dans le ministere, & ce qui lui donna presque toujours l’ascendant sur Olivarès, ce fut son activité. Le ministre espagnol perdit tout par sa négligence ; il mourut de la mort des ministres déplacés ; on dit que le chagrin les tue ; ce n’est pas seulement le chagrin de la solitude après le tumulte, mais celui de sentir qu’ils sont haïs, & qu’ils ne peuvent se venger. Le cardinal de Richelieu avoit abrégé ses jours d’une autre maniere, par les inquiétudes qui le dévorerent dans la plénitude de sa puissance ».

Au reste le roi d’Espagne alloit rappeller le duc d’Olivarès, si ce ministre n’eût pas précipité sa disgrace ; mais ayant voulu se justifier par un écrit public, il offensa plusieurs personnes puissantes, dont le ressentiment fut tel, que le roi ne songea plus qu’à le laisser à Toro où il mourut en 1640, de chagrin, comme il arrive ordinairement aux ministres qui ne savent pas jouir de ce repos heureux qu’on ne connoit point à la cour.

Philippe IV. en disgraciant le comte-duc d’Olivarès, n’y gagna que le beau jardin de ce favori dans le voisinage de Madrid ; encore ce jardin couta-t-il cher au roi ; car il y dépensa plusieurs millions. On l’appelle aujourd’hui Buen-Retiro. (D. J.)

Toro, (Géog. mod.) île de la mer Méditerranée, sur la côte méridionale de la Sardaigne, dont elle est à dix milles, à cinq de l’île Vacca, & environ à quatre de l’île Boaria. (D. J.)