L’Encyclopédie/1re édition/TEXTE de l’Ecriture

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TEXTE de l’Ecriture, (Théologie.) c’est ce qu’on lit dans l’Ecriture, ce que la suite des caracteres, soit manuscrits, soit imprimés, présente aux yeux dans les livres saints.

Ce mot se prend en différens sens ; 1°. pour le corps même de l’Ecriture, par opposition à la glose ou à l’explication, sans faire attention à la langue dans laquelle ce texte est écrit, si elle est originale, ou si c’est une simple version : par exemple, le texte porte que Dieu se fâcha, ou qu’il le repentit, & la glose avertit que cela doit s’entendre dans un sens figuré, comme s’il y avoit, Dieu agit comme s’il étoit en colere, &c.

2°. Le texte de l’Ecriture se met par opposition aux traductions qui en ont été faites. Aussi le texte hébreu de l’ancien Testament, & le texte grec du nouveau sont comme les sources d’où sont sorties toutes les traductions, & c’est à ces sources qu’il faut recourir pour bien connoître le sens de ces traductions.

Le texte original de tous les livres de l’ancien Testament qui sont reçus dans le canon des Juifs est l’hébreu ; mais l’Eglise chrétienne reçoit aussi comme canoniques certains autres livres de l’ancien Testament dont le grec passe pour l’original. Par exemple, la Sagesse, l’Ecclésiastique, Tobie, Judith, les Machabées, les chapitres xiij & xjv. de Daniel, les additions qui sont à la fin du livre d’Esther, & cette partie du chapitre iij. de Daniel, depuis le verset 24 jusqu’au 91. Tobie, Judith, l’Ecclésiastique, & apparemment le premier livre des Machabées ont été, à ce qu’on croit, originairement écrits en syriaque, ou en hébreu mêlé de chaldéen & de syriaque ; mais comme les originaux écrits en ces langues ne sont pas parvenus jusqu’à nous, le grec qui est la plus ancienne version est regardée comme l’original. On n’a aucune preuve certaine que la Sagesse & le second livre des Machabées ayent été primitivement écrits ni en syriaque ni en hébreu.

Le texte original des livres du nouveau Testament est le grec, quoiqu’il soit certain que S. Matthieu a écrit son Evangile en hébreu, que quelques-uns croyent que S. Marc a écrit le sien en latin, & que S. Paul a écrit son épître aux Romains en latin, & en hébreu celle qu’il a adressée aux Hébreux. Mais comme le texte hébreu original de S. Matthieu s’est perdu, & qu’on a de très-bonnes preuves que tous les autres livres du nouveau Testament ont été écrits en grec, le grec passe pour la langue originale de tout le nouveau Testament.

Pour le texte samaritain, voyez Samaritain & Pentateuque.

Quoiqu’on ne puisse soutenir que les textes originaux tant de l’ancien que du nouveau Testament soient entierement exempts de fautes, il faut toutefois convenir qu’ils sont parfaitement authentiques, & que les fautes que la longueur des siecles ou la négligence des copistes ont pu y faire glisser ne sont pas de telle conséquence qu’elles doivent les faire regarder comme des sources corrompues & des monumens sans autorité. Ces fautes ne sont pas en grand nombre, elles ne sont pas de grande importance, elles ne touchent pas au fond des choses. Ce sera, par exemple, quelque date, quelque nom propre, quelque nom de ville, ou chose pareille qui seront altérés ou changés ; défaut que l’on peut aisément corriger, ou par le moyen des anciens exemplaires manuscrits, ou par les anciennes versions faites avant que ces fautes fussent survenues dans le texte. Quelques anciens peres, comme S. Justin, Tertullien, Origenes, S. Chysostome ont accusé les Juifs d’avoir corrompu exprès plusieurs passages de l’ancien Testament qui étoient trop favorables à Jesus-Christ ; mais cette accusation a été mal soutenue. Les passages qu’on les accuse d’avoir ôtés du texte, n’ont apparemment jamais été dans l’hébreu. Enfin ce sentiment est aujourd’hui presqu’entierement abandonné de tous les critiques. Voyez S. Jérôme sur le chapitre vj. d’Isaie, Eusebe, hist. ecclésiast. liv. III. c. x. S. Augustin, de civit. Dei, liv. XV. c. xcij. Calmet, Dict. de la bible, tom. III. p. 652.

3o. Texte se dit encore en théologie dans les écoles de différens passages de l’Ecriture, dont on se sert pour établir & prouver un dogme, ou un sentiment pour répondre à une objection.

4o. Dans l’éloquence de la chaire on appelle texte, un passage de l’Ecriture que le prédicateur choisit, par où il commence son discours, & d’où il en tire la matiere ; en sorte que le discours n’est qu’une paraphrase ou une exposition méthodique du texte. Il doit donc y avoir un rapport, une liaison naturelle entre le discours & le texte ; mais il n’arrive que trop souvent qu’on choisit des textes singuliers qui n’ont nulle connexion avec la matiere qu’on traite, ou qu’on les y adapte par force en établissant des rapports arbitraires, ou des sens qui n’ont point de fondement.