L’Encyclopédie/1re édition/TENDRE, TENDREMENT, TENDRESSE

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TENDRE, TENDREMENT, TENDRESSE, (Lang. franç.) ces mots se disent élégamment en matiere de peinture, de gravure, de sculpture, &c. Il peignoit d’une maniere tendre ; cette gravure est touchée tendrement ; tous les plis sont faits avec une grande tendresse.

Tendresse n’est d’usage qu’au figuré ; & la délicatesse de ce siecle a renfermé ce mot dans l’amour & dans l’amitié. On ne dit point, cette viande est d’une grande tendresse ; on dit, cette viande est fort tendre. C’est un substantif qui manque au propre dans notre langue ; il faudroit y substituer ou tendreur ou tendreté ; mais l’usage ne l’a pas encore voulu.

Lorsque tendre se dit des personnes, & qu’il n’a point de régime, il s’entend ordinairement de la compassion, & particulierement de l’amour ; il est naturellement tendre pour les miseres d’autrui. Il y a des personnes qui affectent d’être tendres & sensibles à la perte de gens qu’elles connoissoient à peine, afin qu’on soit tendre pour elles, & qu’on prenne part à leurs déplaisirs. Cette dame a le cœur tendre ; une conscience tendre ; c’est une conscience scrupuleuse, délicate. (D. J.)

Tendre, (Art statuaire en fonte.) le statuaire comme le peintre s’étudie à copier la nature ; & la fonte ainsi que le ciseau, ont des délicatesses qui ne naissent que sous la main des grands maîtres. La rudesse des traits ne fait pas précisément cette dureté que l’on blâme dans une statue. Avec les traits les plus doux, une Vénus ou un Cupidon auront cette dureté vicieuse, si les attitudes ne sont point dans une proportion réguliere, si les membres & les nerfs ne paroissent point souples & flexibles ; en un mot, si le sentiment ne sort pas, pour ainsi dire, de l’harmonie naturelle des traits & des mouvemens que demande l’action représentée. Virgile a peint en deux mots ce que nous appellons le tendre, spirantia mollius æra. (D. J.)

Tendre, v. act. (Gram.) on dit tendre un arc, pour le bander avec effort ; tendre un piege, pour le préparer ; tendre une corde, pour l’attacher fixement par les deux bouts ; tendre une tente, des voiles, un lit, une tapisserie, un filet aux bécasses, aux grives ; tendre le cou, le dos, la main ; tendre à un but ; tendre à la mort ; tendre à la fin d’un ouvrage ou de la vie ; tendre les bras à quelqu’un ; tendre les bras au ciel ; tendre l’esprit, &c.

Tendre à caillou, (Botan.) nom vulgaire qu’on donne dans les îles de l’Amérique françoise à un arbre, dont le bois est d’une extrème dureté ; le P. Labat dit que cet arbre n’a guere qu’un pié de diametre ; son écorce est blanchâtre ; ses feuilles sont clair-semées, de médiocre grandeur, ovales, dentelées, & comme brûlées du soleil, ensorte que cet arbre paroît tout rougeâtre de loin. (D. J.)