L’Encyclopédie/1re édition/RUGEN

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RUGEN, (Géog. mod.) île de la mer Baltique, dans les états que la Suede possede en Allemagne, sur la côte de Poméranie, qui lui est opposée au midi & au couchant. Elle a été autrefois beaucoup plus grande qu’elle n’est aujourd’hui ; car elle avançoit presque jusqu’à l’île de Ruden, au lieu qu’à présent elle en est éloignée d’un mille & demi. Elle a perdu ce terrein en 1309, par une inondation qui submergea tout cet espace. Les habitans de cette île étoient anciennement connus sous les noms de Rugii, Rugiani ; ils étoient Slaves ou Vandales d’origine, & n’embrasserent l’Evangile que sur la fin du douzieme siecle.

On donne sept milles germaniques de longueur, & à-peu-près autant de largeur à l’île de Rugen ; mais elle est coupée par tant de baies & de golfes, qu’en quelqu’endroit qu’on se place, on ne se trouve jamais qu’à un demi-mille de la côte. Cette île fournit beaucoup de chevaux, de bœufs, de brebis, & surtout de grosses oies. La terre y est si fertile en blé, que Rugen est appellé le grenier de Stralsund. Autrefois il y avoit deux fortes places dans Rugen ; mais il n’y a aujourd’hui que quelques bourgades.

On sait que Charles XII. après avoir vu ses lauriers flétris à Pultawa, fit des efforts inutiles pour défendre cette île contre les Danois & les Prussiens ; ses troupes furent toujours repoussées ; enfin Grothusen son favori, & le général Dardof étant tombés morts à ses piés, il se vit contraint de monter lui-même à cheval, & de se sauver, pour n’être pas fait prisonnier.

Du midi jusqu’à l’ourse on vante ce monarque,
Qui remplit tout le nord de tumulte & de sang ;
Il fuit, sa gloire tombe, & le destin lui marque
Son véritable rang.
Ce n’est plus ce héros guidé de la victoire,
Par qui tous les guerriers devoient être effacés ;
C’est un nouveau Pyrrhus, qui va grossir l’histoire
Des fameux insensés.

(D. J.)