L’Encyclopédie/1re édition/REDDE

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REDDE, s. f. (Jurisprud.) au parlement de Toulouse est un élargissement accordé aux prisonniers détenus pour affaires légeres, en faveur des fêtes, à la charge par eux de se représenter toutes fois & quantes ils en seront sommés. C’est ainsi que la redde est définie dans les décisions du droit civil de M. de Fromental, procureur du roi au présidial du Puy, au mot prisonniers, pag. 586. col. 2. Cet auteur ajoute que l’usage en est très-ancien dans le royaume, qu’elle se fait aux fêtes de Noël, de Pâques & de Pentecôte, sur quoi il renvoie à Graverol sur la Rocheflavin, au mot emprisonnement, art. 6.

Gabriel Cayton, dans son style du parlement de Toulouse, liv. IV. tit. 13. p. 573. art. des reddes & élargissemens des prisonniers, dit que le parlement de Toulouse ému d’un devoir de charité, suivant l’ordonnance du roi Henri II. de l’an 1549, a accoutumé d’aller trois ou quatre fois l’an par compagnies faisant un corps, même les veilles de Noël, Pâques & Pentecôte, ès prisons de la ville, pour voir & entendre les délits & nécessités des prisonniers, & ordonner leur expédition & déivrance si faire se peut ; que sur les lieux, après avoir entendu les jugemens des reddes précédemment faits, ou le fait sommairement, soit de leur bouche, ou par un avocat ou procureur qui les assiste, ils sont retenus ou élargis pour l’honneur de la fête ou autrement, en baillant caution, ou à la charge de se remettre, la justice inclinant toujours à miséricorde ; qu’avant d’en venir là, le greffier criminel ou garde-sacs, ont accoutumé remettre ès mains de MM. les gens du roi, tant le rôle des prisonniers cohartés de la cause & du fait de leur détention, que les procédures & informations contre eux faites, afin que la cour sur leur rapport sommaire, en fasse le jugement.

M. de Fromental, loc. cit. dit encore que les officiers du sénéchal & les capitouls de la ville de Toulouse, se rendent la veille des fêtes solemnelles à la grand-chambre du parlement de Toulouse, & y rendent compte au parlement des prisonniers qu’ils ont dans leurs prisons, & de l’état dans lequel sont leurs procédures, & qu’ensuite le parlement se distribue pour aller faire la redde dans toutes les prisons.

Il paroît par ce que disent ces auteurs, que la redde est la même chose que ce qu’on appelle dans les autres parlemens, la séance aux prisons, & que la redde ne differe de cette séance quant à la forme, si ce n’est qu’il n’y a qu’une seule députation pour la séance, au lieu qu’il paroît qu’il y en a plusieurs pour la redde, selon le nombre des prisons.

En d’autres endroits ces sortes de séances aux prisons, s’appellent audience de misericordiâ, de miséricorde ; on en tient une au présidial de Bourg-en-Bresse le samedi-saint dans les prisons ; c’est le lieutenant général qui y va : il peut y mener des conseillers pour les consulter, mais sans être astraint à suivre leur avis. Il étoit d’usage autrefois que le lieutenant général élargissoit un prisonnier sans aucune formalité. M. le chancelier d’Aguesseau écrivit à ce sujet à M. du Four, qui étoit alors lieutenant général de Bourg, pour empêcher cet abus. On prétend que cet usage avoit été établi à l’instar de ce qui se pratiquoit du tems des Juifs. Voyez Séance. (A)