L’Encyclopédie/1re édition/PEPLUS

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PEPLUS minor, s. m. (Botan.) espece de tithymale, nommée par Tournefort tithymalus annuus folio rotundiore acuminato ; en effet ses feuilles sont presque rondes, un peu pointues : ses fleurs sont des godets découpés en plusieurs quartiers ; il leur succede, quand elles sont tombées, de petits fruits lisses, relevés de trois coins, & divisés en trois cellules remplies chacune d’une semence oblongue : sa racine est menue, fibrée. Toute la plante jette du lait quand on la rompt, & ce lait est un si violent purgatif, qu’on ne l’emploie qu’extérieurement pour faire tomber les verrues. (D. J.)

Peplus, s. m. (Antiq. tom.) πέπλος, habit de femme ou de déesse. Manteau léger, sans manches, brodé ou broché d’or ou de pourpre, attaché avec des agraffes sur l’épaule ou sur le bras.

Voilà l’habillement dont on paroit anciennement les statues, ou autres représentations des dieux & des déesses. C’est pour cela qu’Homere donne l’épithete de divin au peplus de Vénus, & dit que les graces l’avoient fait de leurs propres doigts.

On voit dans les monumens anciens que les pépli s’attachoient par des agraffes, per fibulas, tantôt sur l’épaule droite, tantôt sur la gauche, quelquefois sur les deux épaules, & souvent au-dessous des mamelles sur le bras droit ; d’où il paroît qu’Eustathe n’a pas assez consulté les antiques, quand il prétend que le péplus couvroit toujours le côté gauche, & que ses deux aîles, comme il les nomme, du devant & du derriere, ne s’attachoient ensemble que du côté droit.

Le nom de voile fut donné à tous les pepli consacrés aux divinités célestes ; témoin ce que dit Virgile du fameux peplus de Minerve à Athènes, tale deæ velum solemni in tempore portant ; aussi dans Porphyre, le ciel est appellé peplos comme le voile des dieux.

Ces pepli n’étoient pas toujours traînans, mais quelquefois retroussés, ou même attachés par des ceintures. Ils laissoient communément une partie du corps nud & à découvert, comme chez les Lacédémoniens, qui les attachoient par des agraffes sur les deux épaules. Aussi quand Homere dit de Minerve, qu’elle se développa de son peplus pour endosser le harnois ; ce poëte par ces paroles nous la représente toute nue, ce qui n’étoit pas une chose nouvelle à cette déesse, puisqu’il en coûta la vûe à Tyresias.

Après tout, les pepli n’ont pas seulement été donnés aux femmes & aux déesses, mais aussi aux dieux & aux hommes ; c’est ce qu’on peut recueillir des monumens anciens qui nous restent, indépendamment du témoignage d’Eschyle, de Théocrite, & autres. Dans Sophocle, le manteau fatal que Dejanire envoie à Hercule, y est souvent appellé du nom de peplos ; & Eustathius qui en fait la remarque, cite encore à ce sujet Eurypide. Eschyle parle des pepli du roi de Perse, & Xénophon de ceux de l’arménien Tigranes. Synésius appelle du nom de peplos la robe triomphale des Romains. Je ne dis rien du peplos des époux & des épouses.

Du reste nous savons que ces pepli étoient d’ordinaire blancs. On les faisoit dans l’Orient de byssus, & ils formoient une étoffe très-légere. Il faut encore ajouter qu’on les faisoit de diverses couleurs, versicolores ; desorte que dans Homere, la mere d’Hector cherche d’offrir à Minerve celui qui se trouveroit être le plus grand & le plus bigarré : c’est aussi ce que fait Hélene à l’égard de Télémaque dans l’Odyssée. De-là vient qu’Eschyle désigne un peplus par le mot de ποίκιλμα, à cause de sa bigarrure, variis liciis tectus ; mais indépendamment de la couleur, le peplus étoit d’ordinaire brode, frangé, & tissu d’or & de pourpre. Tels étoient sur-tout ces pepli barbarici dont parle Eschyle, & qu’il représente fort différens de ceux qui étoient usités en Grece, pepli dorici.

Enfin le mot de peplus signifie quelquefois un drap mortuaire ; mais alors ils étoient très-simples & sans bigarrure, du-moins chez les Grecs ; Eschyle, dans son Agamemnon, dit que le peplus dont Patrocle fut enveloppé, étoit simple, sans bigarrure ; au lien que quand il parle des funérailles d’Hector, il lui donne un peplus ou drap mortuaire teint de pourpre, ainsi qu’il pouvoit convenir à un barbare à l’égard des Grecs. Tous ces faits sont justifiés par une infinité de passages, qu’il eût été trop long de citer ici.

Acesée, fameux brodeur de Patare en Lycie, fut celui qui fit pour la Pallas des Athéniens le voile sacré, que les Grecs nommoient peplone. C’étoit un homme admirable en son genre. Minerve elle-même avoit donné à ses mains une grace divine. (D. J.)

Peplus de Minerve (Littérat.) Lisez ce qu’en a dit au mot Peplus ; j’ajouterai seulement que le peplus de Minerve étoit une robe blanche sans manches, & toute brochée d’or, sur laquelle on voyoit représentées les grandes actions de la déesse, de Jupiter, & des héros. On portoit ce peplus dans les processions des grandes panathénées, qui se faisoient tous les cinq ans ; ou plutôt on transportoit ce voile célebre sur un vaisseau le long du Céramique, jusqu’au temple de Cérès, d’où on le remenoit aussitôt pour le conserver dans la citadelle. Les dames romaines imiterent l’usage d’Athènes, en offrant tous les cinq ans en grande pompe une robe magnifique à Minerve. (D. J.)