L’Encyclopédie/1re édition/PÉGASE

PÉGASE, s. m. (Mythol.) Hésiode nous dit que c’est du sang de Méduse, à qui Persée coupa la tête, qu’étoit né pégase, ce cheval aîlé, si utile aux poëtes, soit par lui-même, soit qu’ils le montent pour prendre leur vol vers le ciel, soit par la fontaine d’Hippocrène qu’il fit sortir de terre d’un coup de pié, & dans laquelle ils puisent à longs traits les fureurs divines qui les agitent. Voilà la fable ; M. Fourmont en a donné dans les Mém. de littérat. une explication presque démontrée, en remettant seulement cette fable en langue phénicienne.

Méduse n’étoit autre chose, qu’un des cinq vaisseaux de la flotte de Phorcis, prince Phénicien, roi d’Itaque. La tête de Méduse étant une fois coupée, c’est-à-dire le commandant du vaisseau tué, il sortit du vaisseau, Chrysaor, célébre ouvrier en métaux, & le Pégase.

Le chef de la Méduse, en achetant de l’or des Africains, avoit attiré de chez eux un ouvrier qui sçût le mettre en œuvre ; cela étoit fort à sa place. Le pégase est ancien grec pagasse : devons nous l’aller chercher bien loin ; & pendant qu’ος est la finale grecque, dire avec Bochart & M. le Clerc, que pegasos s’est formé de pagasous, fræni equus, ce qui est encore contre les regles de la grammaire phénicienne ou hébraïque, qui n’admet point une semblable transposition ? Pagasos sans détour & sans violence, est manifestement le pacasse : lorsque les Romains virent pour la premiere fois l’éléphant, ils l’appellerent bos ; de même le pacasse sorti de la Méduse, parce qu’on l’avoit apprivoisé, & que l’on montoit dessus comme sur les chevaux, fut appellé cheval. Les dénominations empruntées pour les choses extraordinaires sont de tous les tems & de toutes les langues ; & une marque que c’étoit un animal sauvage, c’est qu’il s’échappa, qu’il ne fut rattrapé que par Bellerophon, qu’il tua Bargylle, l’ami de Bellerophon, qu’il le blessa lui-même, & disparut. Mém. de Littérat. tom. III. (D. J.)

Pégase, (Art numismat.) l’auteur de la science des médailles a remarqué que pégase est le symbole de Corinthe, où Minerve le donna à Bellerophon pour combattre la Chimère ; il se trouve aussi sur les médailles des villes d’Afrique & sur celles de Sicile, depuis que les Carthaginois s’en furent rendu maîtres, parce qu’on tenoit que ce cheval est né du sang de Méduse qui étoit Africaine. Syracuse en particulier, qui avoit une étroite alliance avec Corinthe, marquoit ses médailles d’un pégase. (D. J.)

Pégase, s. m. en Astronomie, est une constellation de l’hémisphere septentrional ; on la désigne par un cheval aîlé. Voyez Constellation.

Pégase a selon le catalogue de Ptolomée, vingt étoiles ; selon Tycho, dix-neuf ; & dans le catalogue Britannique, quatre-vingt-treize. (O)