L’Encyclopédie/1re édition/IMPARFAIT

Briasson, David l’aîné, Le Breton, Durand (Tome 8p. 584).

* IMPARFAIT, adj. (Gramm.) à qui il manque quelque chose. Ainsi un ouvrage est imparfait, ou lorsqu’on y remarque quelque défaut, ou lorsque l’auteur ne l’a pas conduit à sa fin. Un livre est imparfait s’il y manque un feuillet. Un grand bâtiment demeure imparfait lorsqu’un ministre est déplacé, & que celui qui lui succede a la petitesse d’abandonner ses projets. Il y a dans la Musique des accords imparfaits. Voyez Accords. Une cadence imparfaite. Voyez Cadence. En Arithmétique, des nombres imparfaits. Voyez Nombres. En Botanique, des plantes imparfaites, & très-improprement appellées ainsi, car il n’y a rien d’imparfait dans la nature, pas même les monstres. Tout y est enchainé, & le monstre y est un effet aussi nécessaire que l’animal parfait. Les causes qui ont concouru à sa production tiennent à une infinité d’autres, & celles-ci à une infinité d’autres, & ainsi de suite en remontant jusqu’à l’éternité des choses. Il n’y a d’imperfection que dans l’art, parce que l’art a un modele subsistant dans la nature, auquel on peut comparer ses productions. Nous ne sommes pas dignes de louer ni de blâmer l’ensemble général des choses, dont nous ne connoissons ni l’harmonie ni la fin ; & bien & mal sont des mots vuides de sens, lorsque le tout excede l’étendue de nos facultés & de nos connoissances.

Imparfait, adj. (Gramm.) employé quelquefois comme tel en Grammaire, avec le nom de prétérit : & quelquefois employé seul & substantivement, ainsi l’on dit le prétérit imparfait ou l’imparfait. C’est un tems du verbe distingué de tous les autres par ses inflexions & par sa destination : j’étois (eram) est l’imparfait de l’indicatif ; que je fusse (essem) est l’imparfait du subjonctif. Voilà des connoissances de fait, & personne ne s’y méprend. Mais il n’en est pas de même des principes raisonnés qui concernent la nature de ce tems : il me semble qu’on n’en a eu encore que des notions bien vagues & même fausses ; & la dénomination même qu’on lui a donnée, caractérise moins l’idée qu’il en faut prendre, que la maniere dont on l’a envisagé. Ceci est développé & justifié à l’article Tems. On y verra que ce tems est de la classe des présens, parce qu’il désigne la simultanéité d’existence, & que c’est un présent antérieur, parce qu’il est relatif à une époque antérieure à l’acte même de la parole. Article de M. Beauzée.