L’Encyclopédie/1re édition/FUSAIN

FUSAROLE  ►

FUSAIN, s. m. evonginus, (Hist. nat. bot.) genre de plantes à fleurs en rose composées de plusieurs pétales disposées en rond. Il sort du calice un pistil qui devient dans la suite un fruit membraneux & anguleux, qui est partagé en différentes loges, & qui renferme des semences oblongues pour l’ordinaire. Tournefort, inst. rei herb. Voyez Plante. (I)

Fusain, arbrisseau qui se trouve communément dans les pays temperés de l’Europe, parmi les buissons & les haies, où il s’éleve à six ou sept piés au plus. Sa tige est ordinairement droite ; son écorce est verte sur le jeune bois qui paroît quarré, à cause de quatre lignes quadrangulaires relevées, & d’une couleur cendrée qui regnent le long des jeunes branches. Ces lignes qui sont le commencement des rides & des gersures qui doivent recouvrir toute l’écorce, se dérangent, se multiplient, & s’étendent les années suivantes, à mesure que le bois grossit. Ses feuilles sont oblongues, pointues, très-legerement dentelées, & d’une belle verdure ; elles sont placées deux à deux sur les branches. Ses fleurs qui paroissent au mois de Mai, sont petites, de couleur d’herbe, & de peu d’apparence. Les graines qui leur succedent, sont renfermées dans des gousses quadrangulaires, qui ont fait donner à cet arbrisseau le nom vulgaire de bonnet de prêtre. Les gousses, ainsi que la graine qu’elles renferment, sont d’un rouge brillant, qui fait tout le mérite du fusain, qui est d’un assez bel aspect en automne, pour le faire employer dans des bosquets d’agrément.

Cet arbrisseau est très-robuste, il réussit dans tous les terreins ; & on peut le multiplier aisément de branche couchée, de bouture, ou de graine qui ne leve que la seconde année.

Le bois du fusain est blanc, cassant, & assez dur, quoique fort moëlleux dans les jeunes branches sur tout. Il est propre à faire des fuseaux, des lardoires, & quelqu’autres menus ouvrages. Les Dessinateurs se servent du charbon de ce bois pour faire leurs esquisses, parce que les traits s’en peuvent effacer aisément.

On prétend que la feuille & le fruit de cet arbrisseau sont pernicieux au bétail, à cause de leurs qualités purgatives & violentes. Ce qu’il y a de sûr, c’est que tout le bétail a de la répugnance pour cet arbrisseau, & que les insectes même ne s’y attachent point.

Voici les différentes especes ou variétés du fusain.

1°. Le fusain commun à fruit rouge, c’est celui auquel on peut appliquer plus particulierement ce qui vient d’être dit en général.

2°. Le fusain à fruit blanc. Cette variété qui ne consiste que dans la couleur du fruit, est très-rare.

3°. Le fusain à fleur rouge. Cet arbrisseau se trouve en Hongrie, en Moravie, & dans la basse Autriche. Il est aussi robuste que le commun, il s’éleve à la même hauteur, & il se multiplie aussi aisément. C’est le plus beau des fusains ; sa fleur d’une couleur pourprée & brillante, paroît au mois de Mai ; ses fruits, dont l’enveloppe est d’un jaune vif, & les graines d’un noir luisant, font remarquer cet arbrisseau dès la fin de l’été, & pendant la plus grande partie de l’automne : mais cet arbrisseau est encore trop rare pour le voir de si-tôt embellir nos bosquets.

4°. Le fusain à large feuille, ou le grand fusain. Cet arbrisseau vient naturellement dans les provinces méridionales de ce royaume : il est en toutes ses parties plus considérable que les trois variétés ci-dessus. Il prend plus de hauteur, sa feuille est beaucoup plus grande, & son fruit plus gros : il differe aussi des précédens, en ce que son écorce est roussâtre, & qu’elle n’est pas marquée de lignes quadrangulaires, & en ce que ses boutons pendant l’hyver sont fort gros, extrèmement longs & très-pointus. Cet arbrisseau donne une belle verdure, qui fait son principal mérite ; ses fruits ne sont pas si abondans que dans le fusain commun, ils n’ont pas tant d’apparence, & ne durent pas si long-tems, parce qu’ils murissent plûtôt. Cet arbrisseau est très-robuste ; tous les terreins lui conviennent, & on peut le multiplier très-aisément de boutures, qui font quantité de racines dès la premiere année.

5°. Le fusain de Virginie. Sa feuille est ovale, & sa fleur d’un verd rougeâtre. Il est bon d’observer qu’il quitte ses feuilles, afin de le distinguer du suivant, qui est toûjours verd. Cet arbrisseau est si rare en France, qu’il est encore peu connu : on peut le voir à Trianon.

6°. Le fusain de Virginie toûjours verd. Ses feuilles ont quelque ressemblance avec celles du buisson ardent, & ses fruits sont rouges & couverts de petites bosses. Cet arbrisseau est délicat ; il faut le conduire & l’abriter pendant l’hyver comme les orangers : mais on peut très-aisément le multiplier de bouture qu’il faut faire au mois de Mai ou en Septembre. Le seul goût pour la variété peut engager à cultiver cet arbrisseau, qui n’a pas grand agrément. (c)

Fusain, (Mat. médicale.) voyez Bonnet de Prêtre.

Fusain, (Peinture & Dessein.) c’est un crayon fait avec le charbon de l’arbre de ce nom : les Peintres s’en servent beaucoup pour esquisser ; les traits ou lignes qu’on fait avec le fusain s’effacent facilement en passant dessus un linge blanc & sec. On prépare ces crayons en coupant le fusain par morceaux environ de deux lignes de grosseur, & les mettant dans un petit canon ou étui de fer, qu’on rougit au feu pour le réduire en charbon. (R)