L’Encyclopédie/1re édition/FÉBRIFUGE

FÉBRILE  ►

FÉBRIFUGE, adj. pris subst. (Med. Thérapeut.) febrifuga, antifebritia ; on donne en général ces épithetes à tout médicament employé directement pour faire cesser la fievre, ou pour en détruire la cause & les effets.

Aimsi on ne qualifie pas de fébrifuges les purgatifs dont on use dans le traitement des fievres ; parce qu’ils ne sont pas ordinairement censés agir directement contre le vice qui les a produites & les entretient, mais pour préparer les voies aux autres sortes de médicamens qui sont particulierement jugés propres à cet effet : tels que la plûpart des amers, & le quinquina principalement, qui est regardé comme spécifique à cet égard.

Ce sont donc ces derniers, auxquels l’usage soûtenu par l’expérience ou le préjugé, a attribué spécialement la qualité de fébrifuge, sur-tout pour ce qui regarde les fievres intermittentes ; mais bien improprement, puisqu’on peut la trouver dans tous les moyens, quels qu’ils soient, qui peuvent être employés efficacement contre la cause des lésions de fonctions, en quoi consiste la fievre, de quelque nature qu’elle puisse être, soit continue, soit intermittente.

En effet quel est le fébrifuge, même le plus sûr spécifique en ce genre, qui opere aussi promptement, pour faire cesser la fievre, qu’un émétique, un cathartique placés à-propos ? Cependant ces remedes évacuans ne sont jamais compris au nombre des fébrifuges : on ne cherche communément ceux-ci que dans la classe des altérans.

Or comme le mouvement accéléré, soit absolu, soit respectif, dans l’exercice des fonctions vitales, qui est le signe pathognomonique de la fievre, est le plus souvent le seul instrument que la nature mette en usage pour détruire la cause morbifique, & qui la détruise en effet, souvent même sans qu’il suive aucune évacuation, en agissant comme simple altérant ; ne pourroit-on pas conséquemment regarder à juste titre le mouvement, l’action des solides, des fluides, en un mot l’agitation fébrile, comme le premier & le plus universel des fébrifuges ? Mais on n’a peut-être pas encore bien généralement des idées justes à ce sujet ; on confond le plus souvent les effets de la fievre, c’est-à-dire les mouvemens extraordinaires qui la caractérisent, avec la cause même qui rend ces mouvemens nécessaires. Voy. Effort (Econ. anim.) On n’a encore trop communément en vûe que des matieres médicinales, lorsqu’il s’agit de fébrifuges dans la Medecine pratique.

C’est par conséquent sous cette restriction, que pour se conformer aux idées les plus reçûes, il devroit être ici question de cette sorte de remede, s’il étoit possible d’en traiter d’une maniere méthodique : mais ce seroit induire en erreur, que de proposer des genres & des especes de fébrifuges ; ils ne sont pas susceptibles d’une pareille division, à moins que l’on n’en fasse une qui réponde à celle des genres & des especes de fievre ; que l’on n’indique ceux qui conviennent aux différentes natures de fievre : mais alors c’est tomber dans le cas de faire l’exposition de la méthode, de traiter la fievre en général & toutes ses différences en particulier, ce qui n’est pas de cet article : ainsi il faut recourir au mot Fievre, où se trouve, dans le plus grand détail dont soit susceptible cet ouvrage, & d’une maniere qui n’y laisse rien à desirer, tout ce qui peut être dit concernant les différentes curations de toutes les diverses affections qui sont comprises sous ce mot.

Voyez aussi toutes les généralités concernant les remedes évacuans, comme les articles Vomitif, Purgatif, Sudorifique, Diurétique, &c. concernant les altérans, comme les articles Apéritif, Astringent, Anodyn, &c. En un mot presque toutes les classes, tous les genres de remedes tant diététiques, chirurgicaux, que pharmaceutiques, & les moraux même, peuvent fournir des fébrifuges différens, selon la différence des causes de la fievre, selon qu’elle dépend du vice des solides ou de celui des fluides, qu’elle est simple ou compliquée, qu’elle est occasionnée par des affections du corps, ou par celles de l’ame : ainsi on peut dire que le ressort des fébrifuges n’est guere différent de la Thérapeutique entiere, parce qu’il n’est presque point de cause morbifique qui ne puisse être ou devenir celle de la fievre immédiatement ou par accident.

Telle est l’idée que l’on peut donner des fébrifuges en général.

Quant aux médicamens particuliers auxquels on attribue préférablement à tous autres la qualité de fébrifuge, voyez Amer (Mat. med.), Centaurée, Cascarille, &c. mais sur-tout Quinquina ou kina, qui est le fébrifuge par excellence. (d)