L’Encyclopédie/1re édition/ESKIMAUX

ESKIMAUX (Geog.) peuple sauvage de l’Amérique septentrionale, sur les côtes de la terre du Labrador & de la baie d’Hudson, pays extrèmement froids.

Ce sont les sauvages des sauvages, & les seuls de l’Amérique qu’on n’a jamais pû apprivoiser ; petits, blancs, gros, & vrais anthropophages. On voit chez les autres peuples des manieres humaines, mais dans ceux-ci tout est féroce & presqu’incroyable.

Malgré la rigueur du climat, il n’allument point de feu, vivent de chasse, & se servent de fleches armées de pointes faites de dents de vaches marines, ou de pointes de fer quand ils en peuvent avoir. Ils mangent tout crud, racines, viande et poisson. Leur nourriture la plus ordinaire est la chair de loups ou veaux marins ; ils sont aussi très-friands de l’huile qu’on en tire. Ils forment de la peau de ces sortes de bêtes, des sacs dans lesquels ils serrent pour le mauvais tems une provision de cette chair coupée par morceaux.

Ils ne quittent point leurs vêtemens, & habitent des trous souterrains, où ils entrent à quatre pattes. Il se font de petites tuniques de peaux d’oiseaux, la plume en-dedans, pour se mieux garantir du froid, & ont par-dessus en forme de chemise d’autres tuniques de boyaux ou peaux d’animaux cousues par bandes, pour que la pluie ne les pénetre point. Les femmes portent leurs petits-enfans sur leur dos, entre les deux tuniques, & tirent ces pauvres innocens par-dessous le bras, ou par-dessus l’épaule pour leur donner le teton.

Ces sauvages construisent des canots avec des cuirs, & ils les couvrent par-dessus, laissant au milieu une ouverture comme à une bourse, dans laquelle un homme seul se met ; ensuite liant à sa ceinture cette espece de bourse, il rame avec un aviron à deux pelles, & affronte de cette maniere la tempête et les gros poissons.

Les Danois ont les premiers découvert les Eskimaux. Le pays qu’ils habitent est rempli de havres, de ports, & de baies, où les barques de Quebec vont chercher en troc de quincaillerie, les peaux de loups matins que ces sauvages leur apportent pendant l’été. Extrait d’une lettre de Ste Helene, du 30 octobre 1751. Voyez aussi si vous voulez la relation du Groenland insérée dans les voyages du Nord, & ceux du baron de la Hontan ; mais ne croyez pas que ces livres satisfassent votre curiosité, ils ne contiennent que des fictions ; ce qui n’est pas étonnant, puisqu’aucun voyageur, ni aucun armateur ne s’est encore hasardé de pénétrer dans ce vaste pays de Labrador pour en pouvoir parler. Ainsi les Eskimaux sont le peuple sauvage de l’Amérique que nous connoissons le moins jusqu’à ce jour. Article de M. le Chevalier de Jaucourt