L’Encyclopédie/1re édition/EBOURGEONNER

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EBOURGEONNER, v. act. (Jardin.) L’ébourgeonnement est l’art de supprimer avec autant d’œconomie que de connoissance, les bourgeons surnuméraires d’un arbre, pour lui donner une belle forme, contribuer à sa santé & à sa fertilité : c’est le but de l’ébourgeonnement.

C’est encore par le moyen de l’ébourgeonnement qu’on ôte la confusion des branches d’un arbre pour le soulager, pour lui faire rapporter de plus beaux fruits, de meilleur goût, & pour le faire durer plus long-tems.

La Quintinie veut qu’on ébourgeonne les buissons comme les arbres d’espalier & de contr’espalier.

On ne doit ébourgeonner les arbres que quand les bourgeons ont environ un pié de long, pour laisser aux arbres jetter leur feu, pour ainsi dire, & amuser la séve ; sans cette précaution l’ébourgeonnement est nuisible aux arbres.

Il faut couper avec la serpette, tout près de l’écorce, les bourgeons ; ce qui fait aller de pair cette opération avec la taille. Ceux qui cassent avec les doigts & arrachent les bourgeons, laissant de petites esquilles, & faisant des plaies inégales à chaque endroit, occasionnent l’arrivée de la gomme aux fruits à noyau, ce qui cause leur perte certaine.

L’ébourgeonnement doit toûjours être accompagné du palissage, il n’y a que les mauvais jardiniers qui en usent autrement. On doit ébourgeonner tout ce qui pousse par-devant & par-derriere un arbre, pour le faire jetter des deux côtés. Les branches chiffonnes, celles de faux bois, sont du nombre de celles qu’on doit ébourgeonner, à moins qu’il n’y ait une nécessité d’en laisser quelques-unes pour garnir l’arbre.

Si l’on faisoit réflexion à la quantité de branches que l’on coupe à un arbre, soit en le taillant, soit en l’ébourgeonnant, & en retranchant les branches de devant & de derriere à chaque pousse, on verroit qu’on en supprime au moins les trois quarts. Si donc à cette prodigieuse suppression de tant de parties d’un arbre, on joint encore celle des extrémités de tous les rameaux, il sera impossible qu’ils s’allongent : c’est le moyen de les faire souvent avorter, ou du moins de les rendre stériles.

Ces rameaux ainsi ménagés prennent de l’étendue, & procurent au centuple ce qu’ils ont coûtume de donner.

Il faut donc, en ôtant aux arbres toutes les branches de devant & de derriere, qui font la moitié d’eux-mêmes, les dédommager, en leur laissant pousser par les côtes les rameaux dans toute leur longueur, & les étendant suivant la force des arbres.

Quand on ôte à la séve les vaisseaux & les récipiens qui sont les instrumens de son ressort & de son jeu, on lui ôte les moyens d’agir, & il faut nécessairement que la disette ou la mortalité suivent d’un pareil traitement.

Par le moyen de l’allongement des branches des côtés, on répare en quelque sorte, & autant qu’il est possible, ce qu’on est forcé de couper aux arbres par-devant & par-derriere.

On doit ébourgeonner les vignes, alors ce mot doit s’entendre autrement que pour les arbres fruitiers : on ébourgeonne les vignes. non-seulement quand on supprime les bourgeons surnuméraires, mais encore quand on arrête par-en-haut les bourgeons. Il en est de même quand on détache en cassant les faux bourgeons qui poussent d’ordinaire à chaque nœud à côté des yeux, à commencer par le bas. (K)