L’Encyclopédie/1re édition/AUTRUCHE

◄  AUTRICHE
AUTRY  ►

AUTRUCHE, s. f. en latin struthio ou struthio-camelus, (Hist. nat. Orn.) très-grand oiseau, dont le corps paroît petit à proportion de la longueur du cou & dés pattes. V. Pl. IX. hist. nat. fig. 1. c’est pourquoi la plûpart des voyageurs ont trouvé au premier coup d’œil quelques rapports entre la forme de l’autruche & celle du chameau, d’où est venu le nom latin struthio-camelus.

M. Perrault rapporte que huit autruches, dont la description avoit été faite, & dont cinq étoient mâles & trois femelles, avoient toutes la hauteur de sept piés depuis le sommet de la tête jusqu’à terre ; le dos étoit à environ quatre piés au-dessus de la plante des piés, & il y avoit trois piés depuis la naissance du cou jusqu’au-dessus de la tête ; la longueur de la queue étoit d’un pié ; l’aîle étant étendue avoit un pié & demi sans les plumes, & en y comprenant les plumes il y avoit le double de longueur. Le plumage de toutes ces autruches étoit assez ressemblant ; la plûpart avoient des plumes noires & blanches, quelques-unes grises. Il n’y avoit point de plumes sur les côtés du corps qui sont recouverts par les aîles, sur les flancs, ni sur les cuisses. Le bas du cou jusqu’à la moitié étoit garni de plumes plus petites que celles du dos & du ventre ; toutes ces plumes sont aussi molles & effilées que le duvet, de sorte qu’elles ne peuvent pas servir pour le vol ni pour défendre l’autruche des injures de l’air comme les plumes des autres oiseaux. Le haut du cou & de la tête étoit garni en partie de petits poils blancs, luisans comme des soies de porc, & en partie de petits bouquets composés chacun d’environ douze poils blancs & fort menus, & de la longueur de quatre ou cinq lignes, qui n’avoient tous ensemble qu’une racine faite en forme de tuyau de la grosseur d’une très-petite épingle. Ces poils étoient assez rares sur le cou, & encore moins fréquens sur la tête, qui étoit absolument chauve par-dessus. Il y avoit au bout de chaque aîle deux ergots à peu près semblables aux aiguillons d’un porc-épic ; ces ergots avoient environ un pouce de longueur & une ligne & demie de diametre à la base ; leur substance ressembloit à de la corne. Le plus grand étoit à l’extrémité du dernier os de l’aîle, & l’autre à un demi-pié plus bas. Le bec étoit court, & sa pointe émoussée & arrondie par le bout, qui étoit fortifié par une éminence un peu crochue. L’œil étoit assez ressemblant à l’œil de l’homme pour la forme extérieure ; l’ouverture étoit ovale ; la paupiere supérieure étoit grande, & avoit des cils beaucoup plus longs que ceux de la paupiere inférieure ; la ligne qui alloit de l’un des angles à l’autre étoit droite selon la direction du bec ; les cuisses étoient grosses & charnues ; les pattes étoient recouvertes par-devant de grandes écailles en forme de tables. Mém. de l’Acad. roy. des Scienc. tom. III. part. II. L’autruche n’a que deux doigts, qui sont tous les deux en-devant ; l’intérieur est le plus long, & il est terminé par un grand ongle noirâtre, l’extérieur n’en a point. Ces deux doigts sont joints jusqu’à la premiere articulation par une forte membrane. Cet oiseau est naturel à l’Afrique. On en voit quelquefois dans les deserts rassemblés en un si grand nombre, qu’on les prendroit de loin pour une troupe de gens à cheval. On en troûve aussi dans l’Asie, sur-tout dans l’Arabie, & il y en a en Amérique de différentes especes. L’autruche se nourrit de différentes choses, & mange des herbes, du pain, & presque tout ce qu’on lui présente. Elle avale jusqu’à du cuir, & même du fer ; c’est ce qui a fait croire qu’elle pouvoit digérer ce métal : mais c’est mal-à-propos qu’on a attribué cette force à l’estomac de l’autruche, car elle rend le fer dans l’état où elle l’a avalé. Willughby, Ornit.

On a trouvé dans les ventricules des autruches que M. Perrault a fait disséquer, du foin, des herbes, de l’orge, des féves, des os, & des cailloux, dont quelques-uns étoient de la grosseur d’un œuf de poule. Il y avoit dans un de ces ventricules jusqu’à soixante & dix doubles, dont la plûpart étoient usés jusqu’aux trois quarts pour avoir frotté les uns contre les autres ou contre les cailloux ; car ceux qui étoient courbés avoient été usés & polis sur le côté convexe & restoient entiers du côté concave : ces pieces de cuivre avoient teint en verd tout ce qui étoit dans le ventricule : on a observé que les autruches meurent, lorsqu’elles ont avallé beaucoup de fer ou de cuivre. Mém. de l’Acad. roy. des Scienc. tom. III. part. II.

Les œufs d’autruche sont très-gros, & leur coque fort dure : on dit qu’il y en a qui pesent près de quinze livres : elle les dépose dans le sable & les abandonne à la chaleur du soleil sans les couver ; cette chaleur les fait éclorre. Willughby, Ornit. V. Oiseau. (I)

La membrane intérieure de l’estomac d’autruche est estimée propre pour fortifier l’estomac : elle est apéritive étant séchée & prise en poudre. Sa graisse est émolliente, résolutive, nervale. (N)

* L’autruche fournit aux plumassiers la plûpart des matériaux qu’ils employent dans presque tous leurs ouvrages.

Les plumes grises qu’elles ont ordinairement sous le ventre & sous les aîles, sont appellées petit-gris. Voyez Petit-gris.

Les plumes des mâles sont les plus estimées, tant parce qu’elles sont plus larges, mieux fournies, & qu’elles ont le bout plus touffu & la soie plus fine, que parce qu’on peut leur donner telle couleur qu’il plaît à l’ouvrier ; ce qu’on ne fait que très-difficilement, & même jamais bien aux plumes des femelles.

On les tire de Barbarie, d’Egypte, de Seyde, d’Alep, &c. Voyez Plume.