L’Au delà et les forces inconnues/La psychologie officielle ne nie pas, elle attend des preuves définitives

Société d’éditions littéraires et artistiques (p. 176-179).


LA PSYCHOLOGIE OFFICIELLE NE NIE PAS, ELLE ATTEND DES PREUVES DEFINITIVES


TH. RIBOT de l’Institut, président du Congrès de Psychologie de 1900.


La philosophie subit depuis une vingtaine d’années une crise particulière qui en fait l’humble servante dé la physiologie, et, on dirait, une simple classeuse de petits faits. M. Th. Ribot est le chef de cette école à la fois scrupuleuse et, disons-le, indigente. Il a d’excellents disciplei comme par exemple M. Dumas, et sa revue, la Revue Philosophique, est encore un des rares recueils où l’on manie en France les idées. Néanmoins quelle distance entre M. Th. Ribot et M. Taine ! Taine ne pouvait toujours retenir cet élan vers la synthèse qui marque définitivement les esprits supérieurs. M. Ribot s’est toujours borné à l’analyse. Il a beau être philosophe et psychologue, nous ne saurons jamais sa conception sur l’âme et le monde ; c’est qu’il n’en a pas, je pense, ou que cela lui est égal. Il a recueilli les observations de médecins, de physiologistes, d’aliénistes et d’hypnotiseurs, et, avec ces documents, il est arrivera colliger des recueils intéressants, tels que la psychologie de la mémoire, ou les maladies de la volonté. Il écarte soigneusement toute idée ou toute opinion qui lui soit propre. Le Directeur de la « Revue philosophique » est un annaliste des menus faits de la conscience. Tandis que M. Félix Ravaissonet M. Charles Renouvier élaborèrent encore des systèmes ou les critiquèrent, M. Ribot étiquette et annote des dossiers.

La lettre que j’ai reçue de lui ne peut que nous confirmer sur cet état d’esprit amorphe, mais singulièrement prudent qui est devenu aujourd’hui une sorte de doctrine.


« Paris, 20 novembre 1901.


» Monsieur,


» Il m’est impossible de répondre comme je le voudrais aux questions que vous me posez.

» Je n’accepte ni ne rejette ; je n’affirme pas et je ne nie pas non plus ; mon attitude est sceptique (au sens étymologique).

» En ce qui concerne la télépathie, je ne puis m’abstenir de remarquer qu’on ne tient guère compte des pressentiments non réalisés (j’en ai eu pour ma part un assez grand nombre) et qu’on est plus frappé d’un cas positif que de vingt cas négatifs.

» Pour les phénomènes d’extériorisation sensitive et motrice, j’attends de plus amples informations et des procédés d’expérimentation irréprochable.

» Mais, moins que personne, je condamne ces recherches, sachant bien que, dans l’ordre scientifique, le dogmatisme absolu est un fléau et que rien n’est plus arbitraire que de décider, une fois pour toutes, que ceci peut être incorporé à la science et que cela ne pourra jamais y entrer.

» Recevez, Monsieur, l’assurance de ma considération la plus distinguée.


» Th. Ribot. »