L’Association française pour l’avancement des sciences/02

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L’ASSOCIATION FRANÇAISE
POUR l’AVANCEMENT DES SCIENCES.

(Suite. — Voy. premier article.)
2e session. — Congrès de Lyon. — Août 1873.

La séance d’inauguration dont nous avons récemment parlé, a eu lieu le 21 août dans les salons de l’Hôtel de Ville. Le président, M. de Quatrefages, après une courte allocution de M. le préfet du Rhône, a prononcé un discours qui a été fréquemment interrompu par les applaudissements. L’orateur remercie d’abord la municipalité lyonnaise de la large hospitalité qu’elle accorde à la science. « L’Association française, dit l’honorable président, retrouve à Lyon la splendide et cordiale hospitalité de Bordeaux … La municipalité qui, la première, est venue en aide à notre comité lyonnais n’existe plus ; son dernier acte, peut-être, a été de voter la riche subvention qui devait satisfaire aux besoins, au superflu de la session. Loin de répudier ce vote, la municipalité actuelle l’a généreusement accepté comme lui léguant une dette d’honneur.

« … N’admirez-vous pas, messieurs, comment des hommes partout ailleurs en lutte ardente, se sont trouvés subitement sentir et penser de même dès qu’il s’est agi de notre Association ? — C’est que, placée en dehors et au-dessus des opinions qui se combattent, n’appartenant à aucune, elle n’en tient pas moins à toutes, par les sentiments généreux et vrais, par ce que les hommes d’intelligence et de cœur portent en eux. Or, croyez-le bien, messieurs, il y a de ces sentiments dans toutes les doctrines qui nous divisent, il y a de ces hommes dans tous les partis. Le malheur est qu’ils ne savent à quoi se rattacher et se prendre pour se rencontrer. La France d’aujourd’hui est comme une mer démontée au lendemain d’un ouragan, alors que les flots, cherchant le niveau perdu, retombent et s’entrechoquent dans un inextricable désordre. Chez nous aussi, les groupes formés au vent des révolutions, se heurtent le plus souvent sans but et usent à ne rien faire les forces vives de la nation. Chacun d’eux a son drapeau, hostile à tous les drapeaux voisins. Nous aussi, nous avons le nôtre, et nous le plantons hardiment au cœur de la mêlée comme un signal de rendez-vous à tous les hommes de bonne volonté. Quelle que soit leur bannière habituelle, ils peuvent sans la trahir passer quelques jours au moins à l’ombre de celle qui n’a d’autre devise que les mots science et patrie. Qu’ils viennent donc grossir nos rangs où les attendent à coup sûr d’heureuses surprises. Ils y apprendront à se rendre justice ; et tels qui se croient aujourd’hui adversaires irréconciliables, seront demain alliés sérieux, plus tard peut-être amis dévoués. La science les unira. Quiconque aime le vrai doit aimer la science, cette lumière de l’esprit qui chasse l’erreur d’où qu’elle vienne, comme le soleil dissipe la brume sortie de la fange d’un fleuve ou descendue du ciel. Quiconque aime son pays doit aimer la science, qui seule peut forger les armes nécessaires aux luttes de tout genre du présent et de l’avenir. »

Nous ne saurions trop approuver ces nobles paroles ; certes l’avenir est à la science, qui seule est capable de rapprocher les partis, s’ils professent l’amour de la vérité et du progrès. Le discours de M. de Quatrefages a eu surtout pour but de faire valoir l’importance de l’enseignement scientifique, qui doit former les véritables hommes de l’avenir ; les arguments abondent dans les bonnes causes ; ils n’ont pas fait défaut à l’orateur. Puisse-t-il avoir été entendu quand il a dit : « Nous voulons voir la science avancer et se répandre dans notre pays naguère si cruellement éprouvé ! Tous nous avons pleuré les malheurs de la France ; tous nous souffrons de la plaie que ses désastres sans exemple lui ont laissée au flanc ; tous nous songeons à l’avenir. La grande tâche de l’Association française est de le préparer en montrant la route qui conduit au but, en indiquant les armes qui, dans les luttes de la paix ou de la guerre, peuvent seules donner la victoire. »

Ce discours a été suivi par la lecture du compte rendu des travaux de l’Association par le docteur C. M. Gariel, remplissant les fonctions de secrétaire en l’absence de M. Levasseur. M. G. Masson, trésorier, a pris ensuite la parole pour donner le compte rendu de la gestion financière de l’Association. « Les souscripteurs annuels étaient au 31 juillet au nombre de 659, soit 172 de plus que lors de la session de Bordeaux. Ces nombres augmentent de jour en jour … tels qu’ils sont ils nous assurent pour l’exercice 1873 un revenu de près de 24 000 francs ; ils témoignent d’une prospérité toujours croissante et toujours plus en rapport avec le but élevé que vous poursuivez. »

Après cette première séance, les membres du Congrès procèdent à l’élection des bureaux, dans leurs diverses sections.

Le soir a eu lieu, à huit heures, au palais de la Bourse, une conférence publique faite par le célèbre naturaliste M. E. Karl Vogt. Les volcans formaient le sujet de la séance. M. Vogt a parlé longuement, à l’occasion des feux souterrains, du phénomène des tremblements de terre. Il croit qu’il est erroné d’en rapporter les effets au feu central : il suppose que les tremblements de terre sont dus aux réactions chimiques produites par le contact de l’eau avec des métaux alcalins, qui se rencontreraient dans les profondeurs de l’épiderme terrestre.

Les séances de la section des sciences médicales de l’Association ont eu lieu à compter du 22 août : elles se sont signalées par un certain nombre de communications d’un grand intérêt. Les travaux de M. Ollier, sur les moyens chirurgicaux pour activer l’accroissement des os chez l’homme, ceux de M. Chauveau sur la transmission de la tuberculose par voie digestive, ceux de M. Blanc sur le traitement du choléra, ont surtout excité l’attention. Nous continuerons à mentionner les faits importants du congrès de Lyon, et nous parlerons prochainement des excursions scientifiques qui viennent d’être entreprises, et de la belle réception qui a été faite aux membres de l’Association par la ville de Genève.

La suite prochainement.