Kama Soutra (trad. Lamairesse)/Titre III/Chapitre 3

Kama Soutra, règles de l’amour de Vatsyayana.
Traduction par Pierre-Eugène Lamairesse.
(p. 48-49).
CHAPITRE III


Des pressions et frictions (App 1), égratignures, marques faites avec les ongles.


Généralement, les marques avec les ongles s’impriment sur les aisselles, la gorge, les seins, les lèvres, le Djadgana ou milieu du corps, et les cuisses.

Ce sont, aussi bien que les morsures, des témoignages d’amour singuliers, souvent affectés, entre amants très passionnés ; ils se les donnent au premier rendez-vous, au départ pour un voyage, au retour, lors d’une réconciliation, enfin quand la femme est dans une ivresse quelconque.

On fait avec les ongles huit marques, par égratignures ou pressions : la sonore, la demi-lune, le cercle, le trait de l’ongle ou la griffe du tigre, la patte de paon, le saut du lièvre, la feuille de lotus bleu.

La sonore se fait en pressant le menton, les seins, la lèvre inférieure ou le Djadgana, assez doucement pour ne faire aucune marque ou égratignure, et seulement pour que les poils se hérissent au contact des ongles dont on entend le grattement.

Un amant en use ainsi avec une jeune fille, lorsqu’il la masse ou lui égratigne légèrement la tête et s’amuse à la troubler en l’effrayant.

La demi-lune : la courbe d’un seul ongle que l’on imprime sur le cou ou les seins.

Le cercle : l’ensemble de deux demi-lunes opposées. Cette marque se fait ordinairement sur le nombril, dans les petits creux qui se forment autour des fesses dans la station droite, aux aînés.

Le trait : un petit trait d’ongle que l’on imprime sur une partie quelconque du corps.

La griffe de tigre : ligne courbe tracée sur le sein.

La patte de paon : courbe semblablement tracée sur le sein avec les cinq ongles ; celui qui la réussit est considéré comme un artiste.

Le saut du lièvre : la marque des cinq ongles est faite près d’un bouton du sein.

La feuille de lotus bleu : marques faites sur les seins ou les hanches en forme de feuilles de lotus.

Il existe encore d’autres marques et même en nombre illimité ; car, dit un auteur ancien : « l’art d’imprimer les marques d’amour est familier à tous. » (App. n° 2).

Vatsyayana ajoute : « De même que la variété est nécessaire dans l’amour, la variété, à son tour, engendre l’amour.

C’est pourquoi les courtisanes, qui n’ignorent rien de ce qui concerne l’amour, sont si désirables.

On ne fait point de marques avec les ongles sur les femmes mariées ; mais on peut faire des marques particulières sur les parties cachées de leur corps, comme souvenir et pour accroître l’amour.

Les marques des ongles même anciennes et presque effacées rappellent à une femme et réveillent son amour qui, sans cela, pourrait se perdre tout à fait.

Une jeune femme sur les seins de laquelle apparaissent ces empreintes impressionne même un étranger qui les aperçoit à distance.

Un homme qui porte des marques d’ongles et de dents réussit auprès des femmes, même celles qui sont rebelles à l’amour.