Journal (Eugène Delacroix)/30 juin 1824

Texte établi par Paul Flat, René PiotPlon (tome 1p. 135-136).

Mercredi 30 juin. — Chez M. Auguste[1]. Vu d’admirables peintures d’après les maîtres : costumes, chevaux surtout, admirables… comme Géricault était loin d’en faire.

Il serait très avantageux d’avoir de ces chevaux et de les copier, ainsi que les costumes grecs et persans, indiens, etc.

— Vu aussi chez lui de la peinture d’après Haydon[2] : très grand talent. Mais, comme disait très bien Édouard, absence d’un style bien ferme à lui, dessin à la West. J’oubliais les belles études de M. Auguste, d’après les marbres d’Elgin[3]. Haydon a passé un temps considérable à les copier ; il ne lui en est rien resté… Les belles cuisses d’homme et de femmes ! Quelle beauté sans enflure ! incorrections qui ne se remarquent pas.

— Le soir avec Fielding. Pris du thé, rue de la Paix.

  1. Dans une note de la Correspondance de Delacroix, M. Burty écrit : « Ce M. Auguste, — c’est ainsi que le désignaient toujours ses contemporains, — avait obtenu le second grand prix de sculpture et était pari pour Rome en même temps que Ingres. Il devint un riche dilettante, qui mettait ses collections d’armes et de costumes orientaux à la disposition des artistes romantiques. Il signala le premier à Géricault et à Delacroix l’intérêt capital des marbres du Parthénon, recueillis par lord Elgin et exhibés à Londres. »
    (V. le livre de M. Ernest Chesneau : Peintres et statuaires romantiques, p. 70 à 73.)
  2. Haydon, peintre anglais, né en 1786, mort en 1846. Il fut l’élève de Fuessli. Il a laissé de curieux Mémoires.
  3. Il s’agit ici de la célèbre collection de sculptures en marbre que lord Elgin rapporta d’Athènes en 1814 et qui fut déposée au British Museum.