Journal (Eugène Delacroix)/21 janvier 1847

Texte établi par Paul Flat, René PiotPlon (tome 1p. 239-240).

21 janvier. — Resté chez moi toute la journée. Le pastel du lion, pour les inondés. Composé trois sujets : le Christ portant sa croix, d’après une ancienne sépia ; le Christ au jardin des Oliviers, pour M.  Roché[1]  ; le Christ étendu sur une pierre, reçu par les saintes femmes.

Je lis les Souvenirs de la Terreur, de G. Duval[2]. Les frais de mise en scène, les conversations supposées, imaginées, pour donner de la couleur et de la réalité, ôtent toute confiance. La haine systématique contre la révolution se montre trop à découvert. L’historien cependant aurait à profiter dans cette lecture, non pour les petits faits qui y sont rapportés, mais il y verrait, à travers la partialité de l’écrivain, qu’il y a fort à rabattre de l’enthousiasme et de la spontanéité dans les mouvements que l’on admire le plus à cette époque. Ce qu’on y voit des rouages subalternes réduit à la proportion de complots ce qui paraît souvent dans l’histoire l’effet du sentiment national.

  1. « Je travaille maintenant à mon petit Christ au jardin des Oliviers, que je fais au pastel et que je prierai Mme Roché d’accepter en souvenir de ses bontés. » (Corresp., t. I, p. 329.) Voir Catalogue Robaut, nos 178 et 999.
  2. Georges Duval, vaudevilliste français et auteur de plusieurs ouvrages sur la Révolution.