J. Hetzel (Œuvres illustrées de George Sand, volume 3p. 29-31).
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VIII.

LA LAVANDIÈRE.

Jeanne se rapprocha aussitôt du dolmen, et Guillaume la voyant s’agenouiller encore sur la pierre, alla lui chercher un coussin de paille qui se trouvait parmi les meubles entassés et brisés que la Grand’Gothe avait commencé par sauver. — Mon parrain, vous êtes bien trop charitable, dit Jeanne étonnée de tant d’attentions. Ma pauvre chère âme de mère n’en aurait pas fait plus pour moi que vous n’en faites, vrai !

— Bonne et chère enfant, répondit le jeune homme ému, je voudrais te parler sérieusement et plus tôt que plus tard. Te sens-tu le courage de m’écouter ?

— Mon parrain, ça sera à votre volonté. Pourtant si vous aimiez mieux que ça soit demain, ça me conviendrait mieux aussi. Voilà ma pauvre chère défunte qui demande des prières, et m’est avis que ce n’est pas joli de causer à côté d’elle. Demain après l’enterrement, mon parrain, si vous souhaitez que je vous cause, il n’y aura pas d’empêchement.

— Non, Jeanne, je désire précisément te parler ici, à côté de ta défunte mère, et pour ainsi dire en sa présence. Je veux la prendre à témoin de mes bonnes intentions et de la pureté de mes sentiments pour toi. Je veux lui jurer d’être ton ami et ton défenseur, ma chère Jeanne, et je suis certain que, loin d’être impie, notre entretien réjouira son âme qui est dans le ciel.

— Vous parlez trop comme il faut pour que je ne vous écoute pas, mon parrain. Vous en savez plus long que moi, et je vous crois bien.

— Eh bien, Jeanne ! dis-moi d’abord que tu auras confiance en moi, et que tu me laisseras m’occuper seul de ton sort… Je dis seul… avec ma mère, pourtant, avec ma mère principalement.

— Je ne peux pas mieux faire que de vous écouter là-dessus, mon parrain. Mêmement, ma mère m’a toujours dit que votre mère était une femme très-bonne, et votre défunt père un homme très-juste.

— Tu me promets donc de ne prendre conseil que de nous ?

— Oui, mon parrain, avec l’agrément de M. le curé qui est un homme très-juste aussi, et que ma mère m’a bien enchargée de croire.

— Avec l’agrément de M. le curé, soit ; mais de personne autre, pas même de ta tante !

Jeanne hésita un instant, puis elle dit : « Pas même de ma tante, mon parrain. » Elle avait compris, cette nuit même, que sa tante n’avait qu’une passion, la cupidité ; et elle était révoltée, dans son âme pieuse, que la sœur de sa mère eût abandonné ce corps vénéré à la merci des flammes, sans même songer ensuite à faire la veillée des morts auprès d’elle.

— Merci, Jeanne, merci, dit Guillaume en lui prenant la main.

— De quoi donc que vous me remerciez, mon parrain ?

— De m’accepter pour ton guide et pour ton ami. Ta mère a entendu ta promesse, Jeanne !

— Plaise à Dieu que ça lui soit agréable ! dit Jeanne en baisant le bord du linceul. À présent, mon parrain, qu’est-ce que vous voulez me conseiller ?

— De venir demeurer à Boussac dans la maison de ma mère, si, comme j’en suis bien sûr, ma mère t’y engage.

— Ça serait-il pour la servir, mon parrain ? Croyez-vous qu’elle ait besoin de moi, votre mère ?

— Non, Jeanne, je ne crois pas qu’elle ait besoin de toi ; mais….

— Dans ce cas-là, mon parrain, excusez-moi ; je ne voudrais pas demeurer à la ville.

— Tu n’aimes donc que la campagne ?

— Je n’ai jamais été à la ville, mon parrain, c’est-à-dire j’y suis naissue ; mais depuis que j’en suis sortie à l’âge de cinq ans, je n’y ai jamais retourné une seule fois, ni ma mère non plus.

— Et pourquoi cela ?

— Je ne sais pas, mon parrain. Il paraît que ma mère avait eu du chagrin dans cet endroit-là, et elle me disait toujours : Jeanne, ça n’est pas bon de quitter sa famille et sa maison, va ! crois-moi quand tu seras ta maîtresse.

— Mais à présent, ma pauvre Jeanne, tu n’as plus ni famille ni maison !

— C’est la vérité, dit Jeanne en regardant le corps de sa mère. Puis elle se retourna vers sa maison en ruines, et pour la première fois elle sentit ce qu’il y a d’affreux à voir écrouler le toit où l’on a passé toute sa vie. « C’est la vérité, répéta-t-elle d’une voix altérée ; je n’y pensais pas à cette pauvre maison où j’étais si bien accoutumée, où je voyais ma mère tous les soirs et tous les matins, où je dormais à côté d’elle, et où j’entendais mes chebris (chevreaux) remuer et bêler pendant que je m’endormais. Oui, c’est vrai, tout ça est fini. J’en étais contente sur le moment ; ça me semblait que je ne pourrais plus dormir là dedans quand ma mère n’y serait plus. À présent, ça me semble que j’aurais été contente de revoir son lit, son armoire, sa grande chaise de bois, sa quenouille, et sa vaisselle, qu’elle lavait et qu’elle rangeait si bien. Ils ont sauvé en partie le mobilier, c’est vrai, mais la place où tout ça était accoutumé, et la main qui s’en servait… et la voix qui parlait dans c’te chambre, et qui disait, à la petite pointe du jour : Jeanne, allons, ma Jeanne, allons, ma mignonne, v’là les allouettes réveillées, c’est le tour des jeunes filles. Et le soir, quand je revenais des champs : La v’là donc, c’te Jeanne ! Les loups ne me l’ont donc pas mangée ! Et puis on se mettait à souper toutes les trois, mon parrain, et ma tante se fâchait toujours, et ma mère ne se fâchait pas. Elle riait, elle disait des histoires, elle chantait des chansons ; et puis elle faisait rire ma tante, et moi aussi ; dame ! fallait rire absolument ! C’est pas, mon parrain, que j’aie jamais été portée absolument là-dessus. Elle me disait bien que je n’aurais jamais de l’esprit comme elle. « Mais ça n’y fait rien, qu’elle disait, je t’aime comme tu es, ma Jeanne, c’est le bon Dieu qui t’a donnée comme ça à moi. Ce que le bon Dieu a fait me convient. » Oh ! c’est qu’elle est juste, cette femme-là, mon parrain ! il n’y en a pas une autre comme elle. On lui dirait de moi tout ce qu’on voudrait, elle ne le croirait pas. Elle leur dirait comme ça…

Jeanne se retourna brusquement vers sa mère ; elle avait parlé comme dans un rêve. Et tout à coup, au moment d’oublier entièrement qu’elle parlait du passé, elle regarda ce cadavre, et la parole expirant sur ses lèvres, elle se jeta sur le corps de sa mère, et laissa échapper de longs sanglots. Ce fut le seul moment de révolte et de faiblesse qu’elle eût encore éprouvé.

Son parler naïf, la vulgarité des images qu’elle retraçait, n’avaient pas désenchanté le jeune baron de l’admiration qu’il avait conçue pour elle dans cette soirée désastreuse. L’accent de Jeanne partait d’un cœur ardent et vrai, sa voix était douce comme celle du ruisseau qui murmurait sous la bruyère à deux pas d’elle ; son accent rustique n’avait rien de grossier ni de trivial. On sentait la distinction naturelle de son être sous ces formes primitives. Guillaume comprit qu’à l’église comme au théâtre il n’avait jamais entendu que de la déclamation, et la parole de Jeanne le toucha si profondément, qu’il fondit en larmes.

— Ah ! mon parrain ! dit Jeanne, en se relevant et en essuyant rudement ses yeux, comme pour faire rentrer ses pleurs, je vous fais de la peine, pardonnez-moi.

— Que peuvent-ils se dire si longtemps ? pensait Marsillat, qui était assez près pour les voir, mais non pour les entendre, d’autant plus que, retenu par ce respect qu’inspire instinctivement la présence d’un mort aimé, ils n’avaient élevé la voix ni l’un ni l’autre. Quand un léger nuage passait devant la lune, ce groupe de la morte et du jeune couple pâlissait sous le regard perçant de Léon, et se confondait un peu avec les pierres druidiques qui l’environnaient. Vraiment, se disait-il, ce garçon si religieux, à ce qu’il veut paraître, aurait-il l’aplomb de lui parler d’amour auprès du cadavre de sa mère ? Je ne l’oserais pas, moi. Je ne me suis pas senti l’audace de dire un seul mot ce soir à cette pauvre fille ! mais il me semble que mon Guillaume n’attend pas que la morte soit mise en terre pour en conter à l’enfant, et prendre son inscription. Va, mon garçon, va ! tout cela se bornera à de belles paroles, j’espère ; d’autant plus sûrement que je ne te perdrai pas de vue, et que les paroles sont une monnaie qui n’a pas de cours chez nos fillettes. Est-ce qu’il réciterait des Oremus avec elle ? Il en est pardieu bien capable…. Mais ces jeunes chrétiens sont de francs hypocrites, et je ne me laisserai pas damer le pion par celui-là. Si ce maraud ne ronflait pas à faire écrouler sur nous le reste de ces murs, j’entendrais peut-être quelque chose.

— Monsieur Léonard jeune, dit-il en secouant Cadet pour l’éveiller, vous dormez trop fort, vous réveillez toute la chambrée. Et il lui allongea quatre à cinq coups de poing pour le réveiller.

— Attends ! attends ! dit Cadet en étendant les bras et en ouvrant, pour bâiller, une bouche démesurée, j’vas t’faire battre en grange sur mon dos ! Qui qu’c’est qu’samuse comme ça anvec moi ? Ah ! c’est vous, monsieur Lion ! Ah ! farceur, allez ! vous m’avez bien arveillé tout d’même !

— Allons, lève-toi donc, imbécile ! Tu tombes dans la ruelle du lit.

Hié ! la rouette du lit ! alle est gente, la rouette du lit ! Ah ! qu’vous fasez rire ! Vou’êtes l’houme le pu aimable qu’jasse pas connaissu (que j’aie jamais connu).

— Allons, lève-toi, mon joli Cadet ; tu vois bien que Jeanne s’enrhume là-bas à garder cette morte.

— Alle est donc toujours là, la Jeanne ? Oh ! la bonne chrétienne fille que ça fait ! c’est la fille la pu bonne que jasse pas connaissu !

— Allons, allons, counnaissu ou non, viens avec moi lui dire de venir se chauffer un peu.

— J’veux ben, j’veux ben ; ça, c’est de raison, monsieur Lion.

L’approche de Marsillat contraria vivement Guillaume ; mais Jeanne y parut indifférente, et même elle le remercia aussi poliment qu’elle sut le faire, d’avoir pris tant de peine pour sauver sa maison, et de s’être condamné à une si mauvaise nuit à cause d’elle.

— Ne faites pas attention à nous, Jeanne, répondit Léon, qui ne croyait pas M. de Boussac si bien informé de ses desseins, et qui affectait devant lui de ne voir dans sa protégée qu’une pauvre fille à secourir dans une circonstance fortuite. Nous faisons tous les trois notre devoir, en ne t’abandonnant pas ; mais ton parrain et toi devez souffrir du froid ; nous venons vous relayer un peu. Approchez du feu qui flambe encore assez bien là-bas, et laissez-nous ici à votre place.

En parlant ainsi, Marsillat se promettait bien de laisser, au bout d’un instant, Cadet tout seul auprès de la morte, et de revenir auprès du feu troubler le tête-à-tête par trop prolongé à son gré, du parrain et de la filleule. Mais il se flattait : Cadet n’était pas d’humeur, lui, à rester en tête-à-tête avec un mort. Quoiqu’il eût assisté déjà, en qualité d’apprenti sacristain-fossoyeur à bien des funérailles, il ne s’était jamais trouvé seul dans l’exercice de ses fonctions, et il était loin de partager le scepticisme de son père ; aussi montrait-il peu de dispositions pour l’emploi dont il devait hériter. D’ailleurs, Jeanne n’entendait pas se remettre sur Marsillat, qu’elle pressentait irréligieux et moqueur, du soin d’assister, comme elle disait, l’âme de sa mère par des prières. Elle consentit seulement, à cause de son parrain, à ce que l’obligeant Cadet allât chercher quelques gros morceaux de bois enflammés pour établir un feu auprès du dolmen.

Tout en bouffissant ses grosses joues pour souffler le feu, Cadet s’arrêta comme pour prêter l’oreille ; puis n’ayant rien entendu de distinct, il recommença son office, tout en disant : Crois-tu, Jeanne, que ça soit bon de faire une clarté dans l’endroit où que je sons ?

— Qu’est-ce que tu veux dire ? demanda Marsillat.

— Dame ! reprit Cadet, ils disont que c’est un endroit bien mauvais pour les fades !

— Tais-toi, Cadet, ne parle pas de ça, lui dit Jeanne, qui s’était approchée du feu, pour embraiser ses sabots[1]. Tu sais bien que c’est des folies de craindre les fades, elles ne sont d’ailleurs pas méchantes dans l’endrait d’ici.

— C’est pas des folletés, Jeanne, s’écria Cadet en pâlissant. Tais-toi, accoutes-tu ?

— J’écoute quelque chose comme un battoir de laveuse, dit Jeanne.

— Dame ! quand je le disais ! ça l’est ! c’est la lavandière ! Diache la faute, que j’avons fait de la clarté ! Et Cadet se retira grelottant de peur auprès de Marsillat, qui écoutait aussi avec quelque surprise.

— De quoi donc vous étonnez-vous ainsi ? leur dit Guillaume en se rapprochant.

— Ça n’est pas grand’chose, mon parrain, dit Jeanne un peu pâle ; c’est un mauvais esprit qui voudrait nous écarter. Mais la pierre est une bonne pierre, et en disant des prières, sans avoir peur, il n’y a pas à craindre. » Jeanne rechaussa ses sabots à la hâte, et se remit à genoux à côté de la morte.

— Ah çà ! je ne rêve pas aussi, moi ? dit Léon prêtant toujours l’oreille. Guillaume, vous entendez bien le bruit d’un battoir de laveuse sur le ruisseau ?

— Certainement ! Mais que trouvez-vous là d’extraordinaire ?

— Vous ne connaissez donc pas la légende des lavandières nocturnes ? ces êtres fantastiques qui s’emparent au clair de la lune, des planches et des battoirs des laveuses oubliés dans les endroits écartés pour venir y faire un sabbat aquatique d’une espèce particulière ?

— Oui, c’est une superstition de tous les pays, mais bien explicable par le caprice ou la nécessité de quelque laveuse véritable.

— Ce n’est pas si facile à expliquer que vous croyez. Dans ce pays-ci, je ne sache pas qu’il y eût une femme assez hardie pour se livrer à ce travail après le coucher du soleil, sans craindre d’attirer autour d’elle le sinistre cortége des Lavandières. N’est-ce pas vrai, Cadet ?

— Oh ! c’est la vraie vérité, monsieur Lion ! Diache la faute ! c’est ben ça la plus chétite nuit que j’asse pas veillée ? Et le pauvre Cadet, dont les dents claquaient de terreur, se mit à quatre pattes derrière Jeanne, et fit précipitamment plusieurs signes de croix.

— S’il y a là quelque chose d’extraordinaire, dit Guillaume, il faut aller vérifier.

— Attendez, dit Marsillat en allant chercher la hache du charpentier, ce peut être quelque drôle mal intentionné.

Pendant que Léon retournait en courant vers l’endroit où il avait laissé son arme, Guillaume, ouvrant le couteau de chasse dont il s’était muni pour voyager, écoutait le bruit clair et sec de ce battoir qui s’arrêtait de temps en temps, et reprenant au bout d’une minute, semblait s’être rapproché, comme si la laveuse eût fait un ou deux pas en descendant le cours du ruisseau qui coulait de la colline dans la direction des pierres d’Ep-Nell.

— Tu n’as pas peur avec moi, Jeanne ? dit Guillaume à sa filleule, qui s’était levée et lui avait pris le bras.

— N’allez pas là, mon parrain, dit Jeanne, qui montrait d’autant plus de courage qu’elle croyait à l’existence fantastique de la laveuse ; ces choses-là ne se renvoient qu’avec des prières.

— Prie pour nous, bonne Jeanne, dit Guillaume en souriant. Ceci ne peut être qu’une méchante plaisanterie, quelqu’un qui ignore sans doute les malheurs qui t’accablent. Mais nous sommes trois, ne sois pas inquiète. Cadet, tu vas venir avec nous.

Non moi, Monsieur, non ! dit Cadet en faisant mine de se sauver. Je n’irai point.

— Tu as peur, nigaud ?

— Je n’ai pas peur, Monsieur, mais vous me couperiez par morciaux que je n’irais point. Je n’ai guère d’envie d’être lavé, battu et torsu comme un linge, à nuité, pour être neyé à matin.

— C’est bien inutile d’essayer d’avoir l’aide de M. Cadet, dit Marsillat qui arrivait en brandissant sa hache. C’est assez de nous deux, Guillaume. Et il se mit rapidement à marcher dans la direction du bruit.

— C’est même trop, répondit Guillaume en s’efforçant de le dépasser. Si c’est une femme, comme j’en suis persuadé, notre expédition en armes est souverainement ridicule.

Comme Guillaume disait ces paroles, il vit, au détour d’un rocher qui lui avait masqué jusque-là le cours du ruisseau, une espèce d’anse ombragée de saules et de bouleaux qui servait de lavoir aux femmes des environs, et sous ces arbres une forme vague qui paraissait une paysanne vêtue comme les vieilles, et qui maniait son battoir à coups précipités, parlant seule, à demi-voix, très-vite, d’une manière inintelligible, et comme en proie à une sorte de frénésie.

— Vous lavez bien tard, la mère, lui demanda brusquement Marsillat, qui s’était approché d’elle assez près, mais qui ne pouvait réussir à distinguer ses traits.

La lavandière fit entendre une sorte de grognement comme celui d’une bête sauvage, et jetant son battoir dans l’eau, elle se leva, ramassa précipitamment des pierres dont elle accabla, en fuyant, les curieux qui venaient l’interrompre. Marsillat se lança à sa poursuite, mais la voyant gagner sur lui du terrain avec une rapidité qui semblait fantastique, et se diriger vers un vivier qu’il appréhendait avec raison, il se retourna pour voir si Guillaume le suivait ; c’est alors qu’il vit son ami étendu par terre et complètement immobile.

Une pierre l’avait frappé à la tête assez violemment. La visière de sa casquette de voyage avait amorti le coup, et le sang n’avait pas coulé. Mais la commotion avait été si forte que le jeune homme avait perdu connaissance. Il se releva bientôt avec l’aide de Léon ; mais en retrouvant l’usage de ses membres, il ne retrouva pas celui de ses facultés, et il s’éveilla dans le lit du curé de Toull, vers deux heures de l’après-midi, ne se sentant pas précisément malade, mais ne pouvant aucunement retrouver la mémoire de ce qui lui était arrivé depuis sa fâcheuse rencontre avec la laveuse de nuit. Cadet seul était auprès de lui, et le jeune malade, croyant rêver encore, entendait au dehors un chant lugubre comme celui des funérailles.

  1. On remplit de cendre chaude et de menue braise l’intérieur du sabot, et on le vide au bout de quelques instants. Le bois conserve fort longtemps la chaleur.