Instruction pour l’estampage des inscriptions


Instruction pour l’estampage des inscriptions
1881

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ANHANG III. modifier

Instruction pour l’estampage des inscriptions. modifier

L’estampage en papier mouillé s’obtient par un procédé très-simple, qu’un ouvrier quelconque, homme ou femme, même un apprenti pas trop maladroit, pourra exécuter d’après une instruction très-courte. Le procédé ne peut être appliqué qu’aux inscriptions gravées sur pierre ou marbre, sur des plaques de bronze assez fortes, et sur des terres cuites d’une épaisseur suffisante. Pour les inscriptions des grandes tables de bronze à très-petite écriture (comme les lois, les diplômes militaires, les décrets de patronat, etc.), ainsi que pour celles gravées sur des plaques très-minces d’or, d’argent ou de plomb, le papier commun peut être remplacé par le papier d’étain ou de plomb, papier qui toutefois, outre d’autres défauts, a celui de se conserver très-mal. L’estampage ne se prête, d’ailleurs, qu’aux inscriptions gravées en creux. Cependant à peu près toutes les inscriptions antiques étant gravées de cette manière, on peut l’obtenir presque partout, à moins que le monument dont il s’agit ne soit d’une grandeur exceptionnelle, ou qu’il ne se trouve dans un endroit inaccessible, ou que l’on ne soit sans l’eau nécessaire. Dans ces cas-là, la photographie ou le calque en mine de plomb doivent remplacer l’estampage. Quand les lettres de l’inscription sont incrustées, comme dans les mosaïques, ou dans les vases d’argent et de bronze (à lettres d’or ou d’argent), il n’y a de possible, en dehors du plâtre, que la reproduction par un calque au crayon, qui, du reste, n’est pas une reproduction tout-à-fait mécanique. L’estampage est, sans doute, le moyen de reproduction le plus facile, et, en même temps, le plus scientifique de tous. Même le plâtre, quoiqu’il donne une reproduction plus complète des monuments avec tous leurs accessoires de sculpture et d’architecture, ne mérite point la préférence, parce qu’il ne peut être étudié aussi aisément que les estampages, que l’on peut tenir sur la table en nombre quelconque et mettre au jour le plus favorable. Souvent le déchiffrement d’un passage détérioré et difficile à lire n’est dû qu’à l’étude du revers de l’estampage. Du reste, le plâtre est, la plupart des fois, beaucoup plus difficile à obtenir et toujours bien plus cher que l’estampage en papier.

Voici la description du procédé de l’estampage.

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I. Le papier. modifier

Le papier non collé (ou très-peu collé) est préférable, pourvu qu’il soit assez fort; le format dit grand-raisin (d’environ 43 sur 56 centimètres) est le plus commode; les formats plus grands sont trop difficiles à manier et à conserver. Le papier employé en Allemagne, pour l’impression des livres, n’étant presque pas collé, est le meilleur de tous, à la condition toutefois que son épaisseur soit en rapport avec la profondeur des lettres à estamper. M. M. Ebart frères, à Berlin, W., Mohrenstraße 13.14, en fournissent trois sortes d’épaisseur différente (marquées LMDII, EF et TG), qui suffiront dans tous les cas.

S’il se trouve, en estampant, que le papier soit trop mince, on mettra une feuille nouvelle sur celle qu’on à déjà employée. On obtiendra de cette manière, deux ou trois estampages à la fois; toutefois le dernier, bien entendu, ne sera pas aussi net et profond que les autres. Si le format du papier ne suffit pas pour la grandeur des monuments, on mettra autant de feuilles l’une à côté de l’autre (marge sur marge), que l’étendue de l’inscription l’exigera, en n’oubliant pas de marquer, sur la pierre même, par des traits d’union ou des croix (avec du crayon tendre, ou de l’encre, ou de la couleur), comment les feuilles se suivent. Cela suffit pour qu’on puisse reconstituer l’ensemble au moment où l’on voudra lire l’inscription. Inutile de les coller l’une à l’autre, ce qui même en rendrait incommode le maniement. Il est bon, en tout cas, de faire une copie de l’inscription, en dehors de l’estampage, au lapis ou à la plume, fûtelle imparfaite dans les détails; elle aidera à comprendre l’ensemble de l’estampage.

II. Le trempage. modifier

On commence par brosser la pierre (ou le bronze) à sec et par la bien laver avec de l’eau. Tout ce qu’il y a d’ordure dans le creux des lettres, doit en être enlevé soigneusement. Sur le marbre et sur les pierres calcaires dures on peut employer, pour le nettoiement, une solution faible d’acide muriatique; quelquefois même des instruments d’acier ne suffisent pas pour éloigner toutes les matières dures fixées dans les creux. La pierre doit être bien mouillée; si l’inscription se trouve, comme à l’ordinaire, sur un plan vertical, le surplus de l’eau découlera très-vite. Si elle Page:26occupe une position horizontale, l’eau ne doit pas y rester dans une quantité trop abondante.

Quand le papier n’est pas trop fort, on l'imbibe, à l’éponge, du côté qui doit être appliqué à la pierre; l’autre côté, de cette manière, conservera un peu plus de force. L’éponge doit être assez forte et consistante. Pour le papier très-fort, il vaudra mieux le tremper en pleine eau, afin de l’en bien saturer. Si, pendant l’opération, le papier devient trop sec (ce qui parfois arrive par l’effet du soleil et du vent), on peut le retremper sans crainte même du côté de face.

III. Cestampage. modifier

Application du papier mouillé à la pierre. Emploi de la brosse.

On applique le papier, de son côté mouillé, à la pierre, en commençant par le haut, surtout quand elle se trouve dans une position verticale, comme à l’ordinaire. Quand le plan de l’inscription est horizontal, il n’y a pas de difficulté; il faut un peu plus d’habileté, quand il est convexe, comme celui des colonnes milliaires. Si l’inscription se trouve dans une position très-haute, enchâssée, par exemple, dans une muraille, l’application du papier, à l’aide d'une échelle, offre, quelquefois, de sérieuses difficultés. Pour bien fixer le papier, un mouchoir ou l’éponge sèche suffit, pourvu que, quand le monument est en plein air, le vent ne souffle pas trop fort. Le tampon de linge, recommandé par Mr. Tastu, sera rarement à la disposition du voyageur épigraphiste; il ne pourra, du reste, qu’être utile. Les bulles d’air, qui pourraient demeurer sous le papier, doivent être chassées vers le bas ou vers les côtés de la feuille.

Vient ensuite l’emploi de la brosse, lequel est la partie essentielle de toute l’opération. La brosse (ou vergette plate), doit avoir des crins assez longs et serrés, comme les brosses moyennes à habits; elle sera plus facile à manier, si elle est faite à la manière des brosses pour chevaux, ou si elle a un manche ou une poignée qui se trouve dans un plan plus haut d’environ 5 à 8 centimètres que la brosse elle-même; on battra ainsi plus facilement le papier. On frappe donc avec la brosse, en commençant par le haut de la pierre, aussi fort que possible, afin que le papier entre dans chaque ciselure de l’inscription. Peu importe que le papier se brise çà et là dans les creux. En général, ces fissures n’empêchent pas l’usage de l’estampage; Page:27on peut aussi y remédier en mettant une nouvelle feuille de papier, bien mouillée d'avance, sur les endroits où les fissures se sont produites. De même, les plis du papier, qui peuvent rester, ne nuisent en rien; il faut les frapper jusqu’à ce qu’ils disparaissent. Quand on ne frappe pas très-fort, l’estampage reste trop plat et ne donne pas une reproduction fidèle de l’original. Le frappement, à l’ordinaire, ne fait aucun dommage à la pierre ou au bronze; cependant, si la pierre est déjà détériorée ou si le métal est très-mince, il sera bon de frapper un peu moins fort. Quand tout le plan de l’inscription est bien pénétré par le papier, il y a, pour retirer l’estampage, deux méthodes différentes, applicables selon les circonstances. On peut laisser le papier sur l’inscription jusqu’à ce qu’il soit sec; mais cela n’est possible, en général, que sur des inscriptions posées horizontalement et quand on a du temps et pleine liberté de disposer du monument en question. La plupart des fois on sera obligé de retirer à l’instant le papier de la pierre; ce qu’on fait, sans aucun péril de gâter l’estampage, en le détachant soigneusement avec les deux mains, et de haut en bas. On le met de suite à sécher au soleil, ou, au moins, sur un plan quelconque de bois.

IV. Transport, envoi et conservation des estampages. modifier

Le papier, une fois sec, conserve l’empreinte avec la plus grande stabilité; on n’a pas besoin de l’augmenter par un trempage à l’eau de colle de riz ou de farine, exécuté, à la fin de l’opération, encore sur la pierre, comme le recommande Mr. Tastu. On peut rouler le papier ou le plier (en se gardant de faire les plis au travers de l’écriture), pour lui donner un format plus commode. Dans ce format, on peut transporter (en porte-feuilles, caisses de bois, ou rouleaux de tôle, etc.) et envoyer les estampages sans le moindre péril de les endommager. En les mettant à la poste, sous bande (‘by bookpost’), on fera bien de les recouvrir d’une enveloppe assez grande d’un papier carton pas trop faible. Pour les conserver, on recommande de ne pas les laisser roulés, mais de les étaler dans des caisses de la grandeur du papier employé (45 sur 56 centimètres). On peut plier les estampages plus grands pour les réduire à ce format. Pour faciliter l’emploi des estampages, il est bon de noter le lieu de provenance sur chaque feuille (surtout quand une seule inscription en exige plusieures). Des rouleaux Page:28volumineux ou des masses de papier d’un très-grand format se gâtent beaucoup plus facilement, surtout aux marges. Il n’y a que l’humidité, et une pression extraordinaire se joignant à l’humidité, qui puissent détruire les estampages.

Il ne faut jamais passer dans le creux des lettres de l’empreinte un trait de crayon rouge ou noir, ce que Mr. Tastu recommande. Car il est évident qu’en faisant cela, on détruit le caractère de copie purement mécanique, qui constitue le mérite de l’estampage. Il faut donc se garder d’altérer ce caractère, en ajoutant ou en ôtant le moindre trait.



Druck von W. Pormetter in Berlin C., Neue Grünstrasse 30.