Grand dictionnaire universel du XIXe siècle/Provençale (OBSERVATIONS SUR LA LANGUE ET LA LITTÉRATURE)

Administration du grand dictionnaire universel (13, part. 1p. 322).

Provençale (OBSERVATIONS SUR LA LANGUE ET LA LITTÉRATURE), par A.-W. de Schlegel (Paris, 1818, gr. in-8°). Schlegel a cherché à donner dans cet ouvrage l’histoire des diverses langues qui ont été parlées simultanément ou successivement dans les Gaules, dans les pays compris entre les Pyrénées et le Rhin. Son livre offre des vues générales pleines d’intérêt et des observations de détail très-précieuses.

Avant de parler de la langue et de la littérature des troubadours, Schlegel cherche à établir les principes généraux de la philologie grammaticale et indique la division des langues en trois grandes familles : langues sans aucune structure grammaticale, langues qui emploient des affixes et langues à inflexions, ou, pour employer la terminologie moderne, langues monosyllabiques, langues agglutinantes et langues à flexion. Il est le premier savant qui ait indiqué cette grande classification, sur laquelle repose aujourd’hui toute la science du langage. Schlegel divise aussi les langues à flexion en deux grandes familles : les langues synthétiques et les langues analytiques ; celles-ci emploient l’article devant les substantifs et les pronoms personnels devant les verbes ; elles ont recours aux verbes auxiliaires, suppléent par des prépositions aux désinences des cas et usent d’adverbes pour exprimer les degrés de comparaison, tandis que les synthétiques se passent de tous ces moyens. Mais cette division est peut-être trop absolue.

Ces préliminaires conduisent l’auteur à la langue provençale, « dont il parle, dit M. Raynouard, excellent juge sur ces matières, en homme de talent qui, par des études profondes et par une sagacité ingénieuse, a suppléé aux avantages inappréciables que procure à d’autres littérateurs l’usage habituel de l’idiome, car il a peu varié depuis les troubadours ». Schlegel repousse pourtant l’hypothèse chère à Raynouard d’une langue romane primitive, intermédiaire entre la langue latine et les langues romanes modernes, hypothèse qui est aujourd’hui universellement abandonnée ; il la regarde comme contraire aux analogies qu’on observe dans l’histoire des langues.