Grand dictionnaire universel du XIXe siècle/ÉPERNON (Anne-Louise-Christine DE FOIX DE LA VALETTE D’), fille du précédent, petite-fille, par sa mère, de la duchesse de Verneuil et de Henri IV

Administration du grand dictionnaire universel (7, part. 2p. 686).

ÉPERNON (Anne-Louise-Christine de Foix de La Valette d’), fille du précédent, petite-fille, par sa mère, de la duchesse de Verneuil et de Henri IV, née en 1624, morte en 1701. Elle fut une de ces jeunes femmes de très-haut rang qui, frappées dans leur amour ou dans leur orgueil, allèrent peupler le couvent des Carmélites, dont Mme  Acarie venait d’ouvrir les portes, rue Saint-Jacques.

L’abbé Montis a écrit une vie de Mlle  d’Épernon (Paris, 1774, in-12), de laquelle il résulte que son héroïne prit le voile par le seul amour de Dieu et par dédain des vanités de ce monde. Le trop pieux abbé n’a pas voulu lire ou n’a point connu les mémoires de Mademoiselle et ceux de Mme  de Motteville, nous ne parlons pas de Brantôme, le médisant quand même et auquel il ne faut pas ajouter grande foi. Mais, entre l’auteur des Dames galantes et le panégyriste, il y a place pour la vérité, et cette vérité se trouve dans les écrits des deux nobles dames que nous venons de nommer, et qui, toutes deux, aimèrent tendrement celle dont nous parlons ici.

Le couvent des carmélites possède encore deux portraits de Mlle  d’Épernon. L’un la représente déjà âgée, à cinquante ans environ : sa figure est pâle, maigre, allongée ; les austérités, les ennuis, l’ombre du cloître ont mis là leur empreinte.

L’autre portrait de Mlle  d’Épernon, qui a été peint par Beaubrun et gravé par Edelinck, la représente toute jeune encore, pleine de charme et de grâce, de vie et de gaieté, le sourire aux lèvres, l’amour dans les yeux : c’est ainsi qu’elle était à vingt ans. Alors elle ne songeait point à ceindre sa taille délicate du cilice de sainte Thérèse : elle était de tous les jeux, de tous les bals, de tous les divertissements de la cour ; belle, de haute noblesse, adorée, elle vivait insouciante, heureuse, lorsqu’un jour on vint annoncer devant elle que le chevalier de Fiesque avait été tué au siège de Mardyck. À cette nouvelle, on vit pâlir et chanceler la petite-fille de Henri IV. Revenue à elle, elle se retira dans ses appartements, et, depuis, ne reparut plus à la cour, ne songea plus qu’à son salut.

En dépit de son père, qui rêvait pour sa fille une illustre alliance, et qui, pour empêcher sa prise de voile, en appela au parlement, au roi, au pape, malgré les doux reproches et les prières de son frère Candale, qui aimait tendrement sa sœur, Mlle  d’Épernon prit la résolution d’entrer au Souvent des carmélites. C’était en 1648, et elle avait vingt-quatre ans : l’année d’après, elle faisait profession, et échangeait son nom, un des plus grands de l’aristocratie française, contre celui d’Anne-Marie de Jésus, sous lequel elle vécut jusqu’à sa mort, survenue en 1701.