Germain de Montauzan - Les Aqueducs antiques/Chapitre 1 - §3

§ III. — De Tibère aux Flaviens. Troisième aqueduc sous Claude.

Ralentissement des travaux publics sous Tibère. Caligula. Entreprises incohérentes. — Tibère sépara les Trois-Gaules, Lyonnaise, Belgique, Aquitaine, en trois gouvernements distincts. On sait le mouvement d’insurrection qu’eut à réprimer le premier gouverneur officiel de la Lyonnaise, Acilius Aviola. Cette révolte, provoquée chez les Andicaves, et les Turoniens (Angevins et Tourangeaux), puis chez les Trévires et les Éduens, par l’excès des impôts[1], se termina promptement par la défaite de l’Éduen Sacrovir. L’alerte éprouvée put suggérer quelques précautions dans les exigences du fisc à l’égard des populations gauloises, et ouvrir une période d’économies ayant pour conséquence un arrêt dans le développement des travaux publics. D’ailleurs, Tibère, absorbé par sa politique méfiante et son inquiète jalousie du pouvoir, loin de s’occuper des provinces avec la même sollicitude qu’Auguste, ne songea guère aux embellissements des villes. Il négligea même ceux de Rome, et n’accomplit aucun travail grandiose, laissant inachevés les seuls qu’il eût entrepris, la construction du temple d’Auguste et le relèvement du théâtre de Pompée[2].

Quant à Caligula, qui séjourna quelque temps en Gaule, il laissa un triste souvenir de son passage à Lyon, où il inaugura son troisième consulat en l’an 40 : souvenir de prodigalités fastueuses, de rapines effrontées, de cruautés inouïes et d’excentricités ridicules. Il donna, près du fameux autel, des jeux alternés avec des concours d’éloquence grecque et latine, que concluaient de bizarres sanctions[3]. Le nom des jeux (miscelli) semble indiquer leur variété : combats de gladiateurs, courses de chars, naumachie peut-être. On n’eut évidemment pas à construire un nouvel aqueduc pour ces joutes, qui n’étaient pas prévues de longue date : on a vu plus haut, d’ailleurs, quels moyens existaient de remplir les bassins dans la presqu’île[4].

D’autre part, nous savons que ce prince avait le goût et même la manie des travaux publics. Son règne ayant été très court (37 à 41), la plupart de ceux qu’il avait entrepris n’étaient pas achevés, ou même avaient été abandonnés à l’état d’ébauches[5]. Citons avant tout les deux grands aqueducs de la région Tiburtine, qui furent repris et terminés par Claude (Aqua Claudia et Anionovus)[6]. Caïus ayant l’esprit déséquilibré, des projets extravagants naissaient dans sa cervelle en même temps que certains autres fort raisonnables. C’est ainsi qu’il eut l’idée de bâtir une ville au sommet des Alpes, fit aplanir des montagnes et surélever des plaines, pour le seul plaisir d’entreprendre des choses extraordinaires, tandis qu’il reprenait, sans assez de constance d’ailleurs pour le faire aboutir, le projet conçu par César de percer l’isthme de Corinthe[7]. Souvent, sous prétexte d’améliorer ou de construire plus beau, il opéra des bouleversements que son successeur dut réparer ; il avait notamment renversé un certain nombre d’arcades de l’aqueduc Virgo, ainsi que l’atteste une inscription apposée par Claude lui-même sur ces arcs relevés[8]. Caligula avait eu besoin de leur emplacement pour un amphithéâtre qu’il faisait construire et que, naturellement, Claude n’acheva pas.

Quand une de ces idées venait à ce maniaque, instantanément il se lançait dans l’exécution, et malheur au subordonné qui ne se mettait pas rapidement à l’œuvre, il risquait sa vie. À ces fantaisies de construction la caisse du fisc fut promptement épuisée. Tibère avait laissé deux milliards sept cents millions de sesterces. En moins d’un an, ils furent dissipés. Alors tous les systèmes de rapines furent pratiqués par Caligula pour y suppléer : droits perçus sur tous les gains des métiers, confiscations d’héritages, fraudes au jeu, quêtes éhontées, ignobles bénéfices sur la prostitution, condamnation à mort de riches citoyens, et vente aux enchères de leurs biens accaparés, etc. ; les faits dépassent l’imagination[9]. Si pendant son séjour à Lyon, en l’an 40, la fantaisie lui prit de faire commencer un nouvel aqueduc, ce n’est donc pas la façon de se procurer les fonds qui dut l’embarrasser beaucoup. Mais la fixité dans les projets étant chez lui, comme chez beaucoup de déments, en raison inverse de l’impatience de la première heure, il est à supposer que si ces travaux hydrauliques furent entrepris, ils ne furent qu’ébauchés, comme ceux de Rome, et qu’il fut réservé de même à son successeur de les reprendre et de les achever.

Claude. Sa sympathie pour Lyon. Lyon colonie Claudienne. Construction d’un troisième aqueduc (aqueduc de la Brévenne). Claude (Tiberius Claudius), fils de Drusus et frère de Germanicus, était né à Lyon le jour même, selon Suétone ; de la dédicace de l’autel de Rome et d’Auguste. Conserva-t-il pour sa ville natale et pour le pays des Gaules une affection qui leur ait valu plus tard les bienfaits dont il les gratifia ? On peut le croire. Ce prince, auquel reste imprimée une marque ineffaçable de ridicule, n’en est pas moins digne à nos yeux d’une réelle sympathie. Il y a lieu d’être surpris du mélange de niaiserie et de très ferme bon sens qui se rencontre dans ce caractère d’empereur[10]. Ses actes d’excellente politique et de sage administration étant nombreux et d’une authenticité indiscutable, on serait porté à croire à beaucoup d’exagération dans les traits d’imbécillité que l’histoire lui prête. C’était sans doute un de ces hommes d’esprit lent, susceptibles de réflexion excellente, mais sujets à des absences dépensée, souvent interdits, gauches et bégayants, quelquefois au contraire sottement hardis, capables pourtant, dans des circonstances importantes, de s’exprimer convenablement devant une assemblée.

C’est ainsi que son discours en faveur des nobles Gaulois déjà citoyens romains, et auxquels il s’agissait d’accorder ou de refuser l’accès au sénat et à toutes les dignités romaines, sut faire valoir de justes et sages raisons[11], qui, présentées par l’empereur lui-même, devaient triompher des dispositions des sénateurs, peu favorables au projet. On a retrouvé à Lyon, en 1528, une partie considérable de ce discours, gravé sur une table de bronze qui est encore une des pièces les plus précieuses du musée de la ville[12]. Il est d’une éloquence bien molle et bien diffuse, mais il respire une sympathie sincère à l’égard des Gaulois, et méritait bien que l’assemblée du confluent témoignât sa gratitude en le faisant graver sur le bronze et afficher sur l’un des édifices qui avoisinaient l’autel fédéral. Quant aux Lyonnais eux-mêmes, ils n’étaient pas directement intéressés à la mesure nouvelle, puisque dès la fondation de leur colonie, ils possédaient le plein droit de cité[13] : comme Claude le constatait au cours de son argumentation, il y avait déjà des Lyonnais au sénat.

Ils avaient néanmoins des raisons toutes spéciales de reconnaissance à l’égard de Claude. En l’an 43, quelques années avant le discours au Sénat, qui est de l’an 48, l’empereur avait traversé la Gaule pour tenter une expédition en Bretagne, qui fut rapide et couronnée de succès. Il passa deux fois par Lyon, à l’aller et au retour, et y fut accueilli avec enthousiasme. Le second séjour surtout fut triomphal. Dans ces manifestations, il faut faire la part de la réjouissance officielle et banale. Mais il est un indice qui suffit par lui-même à prouver la sincérité de l’allégresse témoignée : c’est que les Lyonnais demandèrent et obtinrent d’ajouter le nom de Claude à la désignation officielle de leur colonie. Celle-ci s’appela désormais Colonia Copia Claudia Augusta[14] Lugudunum. Ce nom n’aurait pas été donné sans raisons positives. Sans aucun doute, il consacrait et perpétuait le souvenir de bienfaits notoires, parmi lesquels on n’hésite pas à citer la construction d’un nouvel aqueduc. La découverte, au xviiie siècle, sur le versant septentrional de la colline de Fourvière, d’une trentaine de tuyaux de plomb[15], tous marqués aux initiales TI. CL. CAES. (Tiberius Claudius Cæsar), indique bien une canalisation nouvelle, datant de ce règne, et l’on doit naturellement penser qu’elle correspondait à un surcroît de débit, donc à un aqueduc nouveau.

Une semblable création est d’autant plus vraisemblable de la part de cet empereur que Rome lui dut les deux plus beaux de ses aqueducs, puis le port d’Ostie, travail non moins admirable ; il fit creuser aussi un canal d’écoulement pour le lac Fucin[16]. Que ses goûts pour les grands ouvrages d’hydraulique aient pris plaisir à s’exercer en faveur de sa ville natale, il n’est rien de plus logique.

Deux aqueducs existaient déjà pour la ville de Lyon, celui du Mont-d’Or et celui de Craponne. Le choix reste, pour l’attribution à Claude, entre les deux autres : l’aqueduc du Mont Pilat ou du Gier, et celui de la Brévenne. Le même principe de bon sens en vertu duquel, avant tout autre indice, les eaux les plus rapprochées sont recueillies d’abord, désigne l’aqueduc de la Brévenne comme antérieur à l’autre. Ajoutons qu’il part du même massif que celui de Craponne, mais du versant opposé, ce qui l’oblige à un parcours beaucoup plus long, moindre toutefois que celui de l’aqueduc du Gier, avec des difficultés à surmonter bien moins considérables. Enfin, il est des raisons dignes d’attention sérieuse pour attribuer ce dernier à un règne ultérieur, bien que ce ne soit pas jusqu’ici l’opinion courante. Elles seront exposées plus loin. J’admets donc, sous réserves bien entendu, comme on doit le faire quand on n’a pas en main des preuves d’une évidence absolue, mais en m’appuyant sur de bonnes probabilités, que l’aqueduc datant du règne de Claude est celui de la Brévenne.

Agrandissement possible du territoire de la colonie. Bienfaits supposés de Claude à l’égard de Lyon. — On a fait remarquer par des comparaisons qui ne manquent pas de valeur, que les divers aqueducs ainsi construits pour Lyon, et ne desservant que Lyon, ne pouvaient être, dans toute leur étendue, que sur le territoire de la colonie : « Il en était de ces aqueducs, dit M. Allmer[17], comme de ceux qui sont connus ailleurs. Les cinq ou six aqueducs qui amenaient de l’eau à Vienne étaient tous sur le territoire de Vienne ; celui qui d’une trentaine de kilomètres portait à Vaison les belles eaux de la fontaine de Grosel — le dieu celtique Graselos — avait son point de départ près de Malaucène, sur le terrain de Vaison ; l’aqueduc de 52 kilomètres de long qui alimentait Nîmes prenait naissance à la source de la fontaine d’Eure, à Uzès sur le territoire de Nîmes, qui de ce côté se prolongeait jusqu’à l’Ardèche, ou peu s’en faut. Le magnifique aqueduc qui abreuve Carthage est construit en entier sur le territoire de Carthage.  » C’est juste. Mais on a peine à croire que le domaine primitif de la colonie de Lugdunum ait pu dépasser la ligne de montagnes qui clôt à l’ouest ce qui d’après la dénomination usuelle constitue « les environs de Lyon ». Au delà des crêtes d’Iseron et de Pollionnay, c’est en quelque sorte un autre pays. Si l’on admet le principe de M. Allmer, rien n’empêche de penser que, pour donner aux Lyonnais le droit d’aller chercher l’eau par delà cette limite, Claude se soit déterminé à agrandir le territoire de la colonie. Ce serait encore un des motifs pour lesquels Lyon aurait conféré à cet empereur l’hommage de l’éponymie. Au reste, ce fait d’annexion serait d’autant moins invraisemblable que l’on a cru aussi pouvoir attribuer à Claude l’addition à la colonie de certains territoires situés dans la Narbonnaise, entre autres celui de Valence qui serait même devenu pour Lyon une importante source de revenus. Ce n’est là toutefois qu’une conjecture[18].

M. Steyert[19], dans son Histoire de Lyon, attribue encore à Claude l’établissement de plusieurs voies nouvelles, dont la mieux identifiée serait le compendium de Vienne, route abrégée entre les deux villes ; il s’appuie sur ce que l’on a retrouvé, au village de Solaize, une des bornes milliaires de cette route dont l’inscription porte nettement le nom de Claude, avec la date de la troisième année de sa puissance tribunice, qui est précisément l’an 43, date de son séjour à Lyon[20]. La coïncidence est intéressante, mais n’est pas une preuve absolue, car les bornes milliaires se remplaçaient de temps à autre. En somme sans nier que Claude ait gratifié Lyon de bienfaits nombreux et importants, le plus authentique de tous est encore, à ce qu’il semble, la construction de l’aqueduc.

Incendie de Lyon. Lyon pour Néron contre Vindex. — Le règne de Néron fut pour Lyon une époque d’épreuves. La plus grave, et qui aurait pu entraîner sa ruine complète si la cité n’eût été encore en pleine vigueur de jeunesse, fut l’incendie qui survint en l’an 65. D’après Sénèque, le désastre n’aurait pas laissé pierre sur pierre : « Lugdunensis colonia exuta est, écrit-il à son ami Lucilius ; una nox interfuit inter urbem maximum et nullam. Lugdunum, quod ostendebatur in Gallia, quaeritur[21]. » Il exagère sans doute, soit que les premières nouvelles d’une catastrophe[22] dépassent, en général la réalité, soit que, par artifice de rhéteur, il charge les couleurs sombres du tableau pour mieux faire ressortir sa thèse de la fragilité des choses humaines. Mais tout en faisant, la part de l’exagération, et quelle qu’ait pu être la cause de ce désastre, on doit convenir qu’il fut terrible. Il est à peu près certain qu’une partie importante de la ville officielle, tout autour du forum, fut détruite. Mais ce qui lui permit de se relever avec une rapidité surprenante, en admettant même que toute la colline de Fourvière, soit toute la rive droite de la Saône, ait été ravagée, c’est que le feu n’avait pas pu se propager dans l’île d’Ainay, ni dans la presqu’île du confluent. Or l’île était le grand entrepôt du commerce et par conséquent le centre et la source de la richesse de la ville. Les grands négociants, les corporations opulentes, la population du confluent, tous ceux dont les demeures et les biens n’avaient pas été atteints par le sinistre durent s’efforcer communément, dans leur propre intérêt, de hâter le relèvement de la ville haute. Tous avaient en effet trop d’avantages à maintenir la suprématie de Lyon en face d’autres cités rivales, Autun et Vienne. La première brillait déjà par la splendeur de ses monuments, par la culture littéraire de ses habitants et par les écoles qui commençaient à s’y fonder. La seconde surtout, Vienne, à qui les Lyonnais n’avaient pas pardonné l’expulsion dont ils avaient été l’objet et qui marquait l’origine de leur colonie, grandissait, chaque jour et leur portait ombrage. Il fallait que Lyon prouvât sa vitalité et sa force en se relevant au plus tôt de ses ruines.

Néron lui vint en aide, en envoyant une somme de quatre millions de sesterces. Tacite[23], qui mentionne ce don, le signale comme une dette de reconnaissance de la part du souverain, qui aurait reçu des Lyonnais cette même somme dans des circonstances difficiles que l’auteur ne précise pas. Peut-être l’avaient-ils envoyée l’année précédente pour aider à réparer les désastres de l’incendie de Rome ; la subvention de Néron n’était dès lors qu’un trop juste retour.

En tout cas, grâce aux subsides qui durent lui parvenir de tous côtés, Lyon mit peu de temps à renaître. Trois ans après, au moment de la révolte fomentée par Julius Vindex, gouverneur de la Belgique ou peut-être même de la Lyonnaise, la ville était en état de prendre position avec fermeté contre le légat et son parti, pour le prince qui l’avait secourue. La défaite de Vindex sous les murs de Vesontio (Besançon) n’empêcha pas le succès de la révolution, car, étouffée en Gaule, elle se déclarait à Rome peu après, forçait Néron à se tuer, et mettait sur le trône impérial Galba, naguère, gouverneur d’Espagne citérieure, en faveur de qui s’était organisé le mouvement.

De Galba à la fin du règne de Domitien. Fortune inégale. — Galba fit sentir durement aux Lyonnais sa rancune, en confisquant leurs revenus, tandis qu’il donnait de nombreux gages de sa reconnaissance aux autres villes, à Vienne[24] en particulier, qui avait soutenu Vindex. Mais Lyon eut bientôt sa revanche. Quelques mois après, Galba était immolé, et, tandis qu’Othon lui succédait à Rome, Vitellius était proclamé empereur par les légions de Germanie. Fabius Valens, son lieutenant, imposait à Vienne une dure contribution, au nom de Vitellius, qui se donnait pour le vengeur de Néron. En se rendant de Cologne à Rome, Vitellius lui-même traversa Lyon, où il fut reçu avec chaleur en cette qualité. Si son règne eût été moins éphémère, les Lyonnais auraient pu compter sur sa sympathie. Mais sa fin lamentable survenue la même année (69) et l’avènement de Vespasien infligèrent une nouvelle déception à la colonie. Celle-ci, dont la population comprenait beaucoup de vétérans des armées du Rhin, avait acclamé avec d’autant plus d’entrain Vitellius, l’élu des troupes de Germanie. Vespasien, élu des légions d’Orient, était pour elle un étranger, et, comme rival heureux de Vitellius, presque un ennemi. À peine eut-il triomphé de l’insurrection des Bataves, des Trévires et des Lingons, qu’il donna, semble-t-il, une marque de méfiance à Lyon, en déplaçant la cohorte qui y était campée pour l’envoyer en Afrique : il la remplaça par une autre que lui-même avait formée[25].

Son règne et celui de Titus ne paraissent pas avoir constitué pour la ville une époque brillante. Elle devait avoir, du reste, beaucoup à faire pour se relever entièrement de ses ruines, car, passé le premier élan qui suivit l’incendie, les vicissitudes des années subséquentes lui avaient sans doute peu laissé le loisir de s’en occuper. Domitien, une dizaine d’années avant son avènement, en l’an 70, passa quelque temps à Lyon[26]. Devenu empereur, il prit une mesure qui contribua beaucoup à augmenter l’importance du commerce lyonnais, déjà si florissant : ce fut d’ordonner que dans diverses provinces, et notamment dans les Gaules, les vignes fussent arrachées et remplacées par le blé, dont la pénurie était devenue inquiétante. Il en résulta un trafic énorme des vins d’Italie, et Lyon, centre des transits, en bénéficia largement[27]. C’est à cette époque, ou peu après, que furent inaugurées des relations suivies et en quelque sorte officielles entre les négociants de Lyon et ceux d’Italie. Une corporation se forma qui prit le nom de splendidissimum corpus negotialorum Cisalpinorum et Transalpinorum et qui eut son siège social en partie à Lyon, en partie à Milan. Lyon, sous ce règne, acheva donc de se relever. L’influence de Domitien, grand bâtisseur[28], put y contribuer.

  1. Tacite, Ann., iii, 40.
  2. Suétone, Tibère, 47.
  3. Suét., Caligula, 20. « On raconte que les vaincus y payaient les prix dus aux vainqueurs, puis qu’on les contraignait à composer les éloges de ceux-ci. Quant à ceux qui avaient été jugés les plus mauvais, il leur était ordonné d’effacer leurs écrits avec une éponge ou même avec leur langue, à moins qu’ils ne préférassent être battus de verges ou plongés dans l’eau tout près de là. » Ce concours inspirait un effroi légitime à ceux qui l’affrontaient.

    Palleat ut nudis pressit qui calcibus anguem,
    Aut Lugdunensem rhetor dicturus ad aram

    (Juvénal, sat., I, 43, 44.)
  4. V. ci-dessus, p. 18.
  5. Il acheva pourtant le temple d’Auguste et le théâtre de Pompée. Il éleva les murs et les temples de Syracuse (Suét., Calig. 21).
  6. Frontin, De aquis, 13.
  7. Suét., Cal., 37.
  8. Ti. Claudius. Drusi F. Caesar. Augustus. Germanicus
    Pontifex Maxim. Trib. potest. V. imp. XI. PP. cos. design. IIII
    Arcus ductus aquae. Virginis. disturbatos per. C. Caesarem
    Afundamentis. novos fecit. ae. restituit.

  9. Suét. Cal., 38 à 42.
  10. Suétone, Claude, 3, 15.
  11. Tacite (Annales xi, 24) reproduit le discours de Claude, en observant son sens général, mais sans scrupuleuse fidélité, d’ailleurs éloquemment.
  12. V. Allmer et Dissard (ouv. cité) I, p. 58, et P. Fabia, Revue d’Histoire de Lyon, t. VII, 1908, Claude et Lyon, p. 15, ssq.
  13. V. Mommsen, Hist. romaine, trad. Cagnat et Toutain, ix, p. 111.
  14. Le nom d’Augusta, ou bien datait d’Auguste, comme nous l’avons supposé plus haut, ou bien fut donné en même temps que celui de Claudia, en l’honneur de Claudius Augustus « l’empereur Claude  ». Les trois premières désignations : Colonia, Copia, Claudia, sont représentées dans les inscriptions par les trois lettres CCC.
  15. Ces tuyaux sont aujourd’hui perdus. Ils avaient été vus par un témoin digne de foi, le P. De Colonia (ouv. cité, p. 54). La question de leur emplacement sera discutée dans un des chapitres suivants.
  16. Suétone, Claude, 20.
  17. Allmer et Dissard, ouv. cité, II. p. 161.
  18. À cette opinion, émise et soutenue par M. Hirschfeld il y a une vingtaine d’années, C. 1. L., t. XIII, p. 229, M. Philippe Fabia, professeur à l’Université de Lyon, a tout récemment (Revue d’Histoire de Lyon, t. VII, art. cité, p. 12), opposé des arguments très solides, qui, sans viser à la détruire, tendent à l’infirmer et la réduisent à la valeur d’une simple hypothèse. Des objections encore plus décisives sont présentées à la suite par M. Fabia contre une seconde conjecture du même auteur, d’après laquelle ce serait à Claude que la colonie de Lyon aurait dû le privilège du droit italique c’est-à-dire, pour les habitants, l’exemption de l’impôt personnel et de l’impôt foncier, le sol devenant susceptible de propriété quiritaire.
  19. Ouv. cité, p. 227.
  20. TICLAVDIVSDRVSIF
    CAESARAVGVST
    GERMANICVS
    PONT.MAX.TR.POT ĪĪĪ
    IMP. ĪĪĪ COS ĪĪĪ PP
    VII
  21. Ad Lucil., xci.
  22. Celle-ci venait de lui être annoncée par son ami, le Lyonnais Æbutius Liberalis, alors dans tout l’émoi provoqué par les premières informations.
  23. Ann. xvi, 13.
  24. V. P. Eabia (Revue d’Hist. de Lyon, t. I, 1902). La querelle des Lyonnais et des Viennois.
  25. La 1re Flavia. (V. Hirschfeld, C. I. L., t. XIII, p. 252).
  26. Tac, Hist., vi, 85-86.
  27. V. Allmer et Dissard, ouv. cité, t. II, p. 450. — Gsell, Essai sur le règne de l’empereur Domitien.
  28. Gsell, Domitien, p. 90, ssq.