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VIE DE KANT


Le nom de Kant est d’origine écossaise ; il s’écrivait par un C (Cant) et c’est notre philosophe qui substitua au C le K qui, en allemand, correspondait mieux à la prononciation de son nom. Immanuel Kant était le quatrième enfant de Jean Georges Kant, sellier à Kœnigsberg, et d’Anna Hegina Reuter. Il naquit le 22 avril 1724. Le jeune Kant reçut dans sa famille une éducation essentiellement religieuse dans l’esprit du piétisme protestant. On appelait ainsi une forme du protestantisme dans laquelle l’esprit de discussion et de critique devait céder le pas à la piété. C’était parle cœur plutôt que par la raison qu’il fallait interpréter l’écriture. Le piétisme impliquait en outre, dans la vie de tous les jours, une sévérité de mœurs et une austérité toutes particulières. Cette éducation, qui fut surtout l’œuvre de la mère de Kant, parait avoir exercé sur le jeune homme une influence durable, bien que le philosophe, fort peu mystique de sa nature, ne soit pas resté absolument fidèle aux idées religieuses de ses parents. Elle fut complétée d’ailleurs au Collegium Fredericianum où Kant fit ses études secondaires jusqu’en 1740, par le directeur de ce gymnase, le pasteur Franz Albert Schulz, qui était un des plus fervents apôtres du piétisme.

De 1740 à 1746, Kant suivit comme étudiant les cours de l’université de sa ville natale, s’occupant tout particulièrement de Philosophie, de Mathématiques et de Théologie. Là encore il eut pour maître le pasteur Schulz, qui était professeur ordinaire de Théologie à l’université.

De 1740 à 1755, il remplit les fonctions de précepteur dans trois familles différentes, aux environs de Kœnigsberg.

Il passa ensuite à Kœnigsberg l’examen appelé en Allemagne Habilitation, qui ouvre les portes de l’enseignement académique; il commença la série de ses cours à l'automne de 1755. 11 continua à enseigner jusqu'en 1797, d'abord comme Docent et ensuite, à partir tic 1770, comme professeur ordinaire. Il prit sa retraite après le semestre d'été de 1797 et mourut le 12 février 1804.

La vie de Kant ne parait pas avoir présenté d'événement qui soit digne d'être noté. Il ne se maria pas 1 et vécut uniquement pour la philosophie et pour la science. Nous disons à dessein pour la science, car son enseignement et ses écrits ne furent pas seulement philosophiques. Il fit au début de sa carrière des cours de Mathématiques et de Physique, auxquels il ajouta même en 1700 un cours de Géographie physique. L'ouvrage scientifique le plus important que Kant ait publié est l'Histoire naturelle générale ■ et théorie du ciel (1755) dans laquelle, avant Luplucc, il fait dériver le système solaire d'une nébuleuse, suivant les lois de la gravitation*. Il est vrai qu'à .partir de la publication de la Critique de la liaison pure les préocciijiatioiis philosophiques l'emportèrent déiinitivement chez lui.

Les traits essentiels du caractère de Kanl paraissent avoir été, avec une certaine, austérité protestante, reste de son éducation piélisle, un profond sentiment du devoir, une parfaite loyauté dans ses relations avec ses collègues et ses amis, une horreur naturelle et comme instinctive de la duplicité et du mensonge 9. Ce fut avant tout un hemme de principes, vivant par la raison plus que par le sentiment et sa morale est certainement l'expression lidèlé de son caractère. On a beaucoup parlé, et non sans ironie, de la régularité de sa vie, de ses relias pris toujours exactement à la même heure et durant toujours le même temps, de ses promenades solitaires, toujours au même endroit, si régulières que les habitants de Koenigsberg pressentaient.quelque événement extraordinaire

1. Il y pensa deux fois, mais réfléchit trop longtemps et ne se décida pas.

2. Cet ouvrage a pourtant un objet philosophique: Conciliation "tu mécanisme avec la téléologi.e.

3. Son mépris pour le mensonge éclate surtout dans la.Métaphysique des moeurs. Il est sur ce point d'une rigueur absolue ne permettant pas le mensonge par politesse, défendant même celui qui a pour motif un sentiment de charité. quand par hasard elles n’avaient pas lieu. Cette vie était en harmonie avec son esprit méthodique, mais on se tromperait fort si l’on concluait de ces faits que Kant eût été une sorte de maniaque et de misanthrope. Dieu au contraire il aimait la société des hommes ; son plus grand plaisir était celui de la conversation et ses amis le recherchaient pour sa bonne humeur, son esprit et même son enjouement.

Au point de vue politique ses tendances libérales, parfaitement d’accord avec sa doctrine de la valeur absolue de la personne humaine, doivent être notées. Hien qu’il n’ait jamais été mêlé à la politique active, il s’intéressa toujours vivement aux grands événements de son temps. Il admirait profondément Rousseau ; il fut avec les révolutionnaires français contre la monarchie absolue ; il avait été auparavant avec les Américains contre les Anglais dans la guerre de l’indépendance.

Nous allons faire connaître maintenant les principaux ouvrages de Kant, en nous limitant à la période dite critique. Kant, en effet, suivit d’abord la philosophie dogmatique d’inspiration Leibnitiennc queWolIT avait répandue en Allemagne. Vers 1702, sous l’influence de Hume, il inclina vers l’empirisme et c’est seulement à partir de 1770 qu’il commença à élaborer la philosophie critique qui devait être sa véritable philosophie. Ce fut, d’après son propre témoignage, Hume lui-même, qui le t réveilla du sommeil dogmatique » et qui l’amena à chercher un système qui |iernilt de concilier l’empirisme sceptique de Hume avec le rationalisme dogmatique de Leibniz et de Wolff.


Notes de Kant modifier


Notes du traducteur modifier