Fables de La Fontaine (éd. 1874)/L’Oracle et l’Impie
XIX
L’ORACLE ET L’IMPIE
Vouloir tromper le ciel, c’est folie à la terre.
Le dédale des cœurs en ses détours n’enserre
Rien qui ne soit d’abord éclairé par les dieux :
Tout ce que l’homme fait, il le fait à leurs yeux,
Même les actions que dans l’ombre il croit faire.
Un païen, qui sentait quelque peu le fagot[1],
Et qui croyait en Dieu, pour user de ce mot,
Par bénéfice d’inventaire,
Alla consulter Apollon.
Dès qu’il fut en son sanctuaire :
Ce que je tiens, dit-il, est-il en vie ou non ?
Il tenait un moineau, dit-on,
Prêt d’étouffer la pauvre bête,
Ou de la lâcher aussitôt,
Pour mettre Apollon en défaut.
Apollon reconnut ce qu’il avait en tête :
Mort ou vif, lui dit-il, montre-nous ton moineau,
Et ne me tends plus de panneau :
Tu te trouverais mal d’un pareil stratagème.
Je vois de loin ; j’atteins de même.
- ↑ Quelque peu irréligieux.
Attention : la clé de tri par défaut « oracle et l impie » écrase la précédente clé « oracle et l'impie ».